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Il fut facile, avec une matière première aussi riche que le foie de notre sujet, d'obtenir plusieurs grammes de ce pigment pour l'analyser.

Analyse du pigment ferrugineux.

Desséché à 110 degrés et refroidi sur l'acide sulfurique, puis calciné au rouge sombre dans un creuset de platine, il noircit sans dégager aucune fumée ni aucune odeur ; il présente une légère incandescence, puis, par refroidissement, reprend une couleur rouge-brun foncé. La perte de poids subie par la calcination est de 17,5 p. 100. Le résidu de la calcination, repris par l'acide chlorhydrique, s'y dissout entièrement. Cette solution chlorhydrique, précipitée par l'ammoniaque en présence d'un excès de chlorure ammonique, donne un précipité volumineux d'hydrate ferrique brun-rouge. Recueilli sur un filtre sans cendres et calciné de nouveau, avec les précautions usitées pour le dosage de l'oxyde ferrique, ce précipité donne 98 p. 100 du résidu dissous dans l'acide chlorhydrique. Le dosage colorimétrique du fer sur cette solution chlorhydrique (en ayant soin de prendre comme liqueur titrée également une solution chlorhydrique de fer), donne une proportion de fer concordante avec la pesée d'oxyde ferrique. Nous avons vu plus haut que le pigment dissous dans l'acide chlorhydrique chaud laisse une petite partie insoluble sous forme de flocons blanchâtres. Ces flocons, recueillis sur un filtre sans cendres, lavés et desséchés, donnent un poids de 2,5 p. 100 environ de la quantité de pigment soumise à la dissolution. C'est une matière organique : le filtre, calciné avec son contenu, ne laisse pas de résidu appréciable.

La conclusion qui découle de ces résultats, c'est que le pigment est constitué essentiellement par un hydrate ferrique de formule 2 Fe2O3, 3 H20. J'ai proposé de l'appeler rubigine (de rubigo, rouille), nom qui rappelle à la fois sa composition et son apparence. Le pigment, à son état naturel, est certainement bien plus hydraté ; mais il ne contient, sauf une toute petite quantité de matière organique et d'impuretés minérales, que de l'hydrate ferrique et de l'eau ; il est à l'état de solution colloïdale. On le voit en effet reprendre partiellement cet état après qu'on l'a isolé, lorsqu'on le place dans de l'eau suffisamment débarrassée de la soude du traitement. Cette solution colloïdale est coagulée par un grand nombre de sels, mais tout spécialement par une trace d'acide fort. Il s'agit évidemment d'un hydrate ferrique différent de ceux que l'on étudie ordinairement en chimie minérale.