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Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 14.djvu/172

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sique, aux idées élémentaires qui y ont conduit, ce qui présente souvent de grandes difficultés ; car l’esprit humain en éprouve moins encore à se porter en avant qu’à se replier sur lui-même.

Il paraît que Fermat, le véritable inventeur du Calcul différentiel, a considéré ce calcul comme une dérivation de celui des différences finies, en négligeant les infiniment petits d’un ordre supérieur, par rapport à ceux d’un ordre inférieur ; c’est, du moins, ce qu’il a fait dans sa méthode de Maximis et dans celle des tangentes, qu’il a étendue aux courbes transcendantes. On voit encore par sa belle solution du problème de la réfraction de la lumière, en supposant qu’elle parvient d’un point à un autre dans le temps le plus court et en concevant qu’elle se meut, dans divers milieux diaphanes, avec différentes vitesses, on voit, dis-je, qu’il savait étendre son calcul aux fonctions irrationnelles, en se débarrassant des irrationalités par l’élévation des radicaux aux puissances. Newton a depuis rendu ce calcul plus analytique dans sa Méthode des fluxions, et il en a simplifié et généralisé les procédés par l’invention de son théorème du binôme ; enfin, presque en même temps, Leibnitz a enrichi le Calcul différentiel d’une notation très heureuse et qui s’est adaptée d’elle même à l’extension que le Calcul différentiel a reçue par la considération des différentielles partielles. La langue de l’Analyse, la plus parfaite de toutes, étant par elle-même un puissant instrument de découvertes, ses notations, lorsqu’elles sont nécessaires et heureusement imaginées, sont les germes de nouveaux calculs. Ainsi la simple idée qu’eut Descartes d’indiquer les puissances des quantités représentées par des lettres, en écrivant vers le haut de ces lettres les nombres qui expriment le degré de ces puissances, a donné naissance au Calcul exponentiel ; et Leibnitz a été conduit par sa notation à l’analogie singulière des puissances et des différences. Le calcul des fonctions génératrices, qui donne la véritable origine de cette analogie, offre tant d’exemples de ce transport des exposants des puissances aux caractéristiques, qu’il peut encore être considéré comme le calcul exponentiel des caractéristiques.