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Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 5.djvu/365

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LIVRE XV.

Je discutai, dans le Mémoire qui contient ces recherches, le principe de la gravitation universelle et la manière dont il avait été employé par Newton et par ses successeurs. La propagation instantanée qu’ils supposaient à cette force me parut peu vraisemblable. Déjà Daniel Bernoulli avait soupçonné que le retard d’environ un jour et demi des plus grandes marées sur les instants des syzygies pouvait dépendre du temps que l’attraction de la Lune emploie à se transmettre à la mer. Une transmission aussi lente n’est pas, sans doute, admissible ; mais cette transmission, quoique incomparablement plus prompte, peut cependant être successive, et il était intéressant d’en calculer les effets. Je trouvai que son effet le plus sensible serait une inégalité séculaire dans le moyen mouvement de la Lune, croissante comme le carré du temps, et que, pour expliquer par ce moyen l’inégalité déduite des observations par Mayer, il fallait supposera l’attraction terrestre une vitesse de transmission près de huit millions de fois plus grande que celle de la lumière. Maintenant que nous connaissons la vraie cause de l’équation séculaire de la Lune, nous pouvons affirmer que la première de ces vitesses est au moins cinquante millions de fois plus grande que la seconde.

Lagrange envoya en 1774, à l’Académie des Sciences, un beau Mémoire sur les variations des inclinaisons et des nœuds des orbites planétaires. Mémoire qui parut dans le Volume de l’Académie de la même année. Ce grand géomètre y détermine les mouvements des orbites par la méthode de la variation des éléments ; mais, au lieu de l’inclinaison et de la longitude du nœud, il considère deux autres variables, qui sont les produits de l’inclinaison par le sinus et par le cosinus de la longitude du nœud, et il détermine leurs expressions différentielles. Cette transformation des variables, dont il a fait ensuite un heureux usage dans sa théorie de la libration de la Lune, a l’avantage de réduire les équations différentielles qui déterminent les inclinaisons et les nœuds d’un système d’orbites à des équations différentielles linéaires à coefficients constants et dont le nombre est double de celui des planètes. Ayant ramené les variations séculaires de l’ex-