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Page:Laplace - Œuvres complètes, Gauthier-Villars, 1878, tome 6.djvu/408

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des molécules des corps. Pour admettre cette hypothèse, il faut supposer les dimensions de ces molécules si petites, relativement aux intervalles qui les séparent, que leur densité soit incomparablement plus grande que la moyenne densité de leur ensemble. Une molécule sphérique, d’un rayon égal à un millionième de mètre, devrait avoir une densité plus de six milliards de fois plus grande que la densité moyenne de la Terre, pour exercer à sa surface une attraction égale à la pesanteur terrestre ; or les forces attractives des corps surpassent considérablement cette pesanteur, puisqu’elles infléchissent visiblement la lumière, dont la direction n’est point changée sensiblement par l’attraction de la Terre. La densité des molécules surpasserait donc incomparablement celles des corps, si leurs affinités n’étaient qu’une modification de la pesanteur universelle. Au reste, rien n’empêche d’adopter cette manière d’envisager tous les corps : plusieurs phénomènes, et entre autres la facilité avec laquelle la lumière traverse dans tous les sens les corps diaphanes, lui sont très favorables. Nous avons d’ailleurs, dans l’extrême rareté des queues des comètes, un exemple frappant de la porosité presque infinie des substances vaporisées, et il n’est point absurde de supposer la densité des corps terrestres moyenne entre une densité absolue et celle des vapeurs. Les affinités dépendraient alors de la forme des molécules intégrantes et de leurs positions respectives, et l’on pourrait, par la variété de ces formes, expliquer toutes les variétés des forces attractives, et ramener ainsi à une seule loi générale tous les phénomènes de la Physique et de l’Astronomie. Mais l’impossibilité de connaître les figures des molécules et leurs distances mutuelles rend ces explications vagues et inutiles à l’avancement des sciences.


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