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essai philosophique

Mais si l’incertitude de l’objet en litige et son importance déterminent un plaideur à recourir au tribunal d’appel, il doit trouver dans une plus grande probabilité d’obtenir un jugement équitable, plus de sûreté pour sa fortune, et la compensation des embarras et des frais qu’une nouvelle procédure entraîne. C’est ce qui n’avait point lieu dans l’institution de l’appel réciproque des tribunaux de département, institution par là très préjudiciable aux intérêts des citoyens. Il serait peut-être convenable et conforme au calcul des probabilités, d’exiger une majorité de deux voix au moins, dans un tribunal d’appel, pour infirmer la sentence du tribunal inférieur. On obtiendrait ce résultat si le tribunal d’appel étant composé d’un nombre pair de juges, la sentence subsistait dans le cas de l’égalité des voix.

Je vais considérer particulièrement les jugemens en matière criminelle.

Il faut sans doute aux juges, pour condamner un accusé, les plus fortes preuves de son délit. Mais une preuve morale n’est jamais qu’une probabilité ; et l’expérience n’a que trop fait connaître les erreurs dont les jugemens criminels, ceux mêmes qui paraissent être les plus justes, sont encore susceptibles. L’impossibilité de réparer