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sur les probabilités.

coutume de donner sa confiance sur les plus importans objets de la vie, qu’est due la propagation de ces erreurs qui, dans les temps d’ignorance, ont couvert la face du monde. La Magie et l’Astrologie nous en offrent deux grands exemples. Ces erreurs inculquées dès l’enfance, adoptées sans examen, et n’ayant pour base que la croyance universelle, se sont maintenues pendant très long-temps, jusqu’à ce qu’enfin le progrès des sciences les ait détruites dans l’esprit des hommes éclairés, dont ensuite l’opinion les a fait disparaître chez le peuple même, par le pouvoir de l’imitation et de l’habitude, qui les avait si généralement répandues. Ce pouvoir, le plus puissant ressort du monde moral, établit et conserve dans toute une nation des idées entièrement contraires à celles qu’il maintient ailleurs avec le même empire. Quelle indulgence ne devons-nous donc pas avoir pour les opinions différentes des nôtres, puisque cette différence ne dépend souvent que des points de vue divers où les circonstances nous ont placés ! Éclairons ceux que nous ne jugeons pas suffisamment instruits ; mais auparavant, examinons sévèrement nos propres opinions, et pesons avec impartialité leurs probabilités respectives.

La différence des opinions dépend encore de