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sur les probabilités.

reste encore un peu sensible au contact des objets extérieurs, les impressions faibles qu’il en reçoit, transmises au sensorium, peuvent, en se combinant avec les images du rêve d’un somnambule, les modifier et diriger ses mouvemens. En examinant, d’après cette considération, les récits bien avérés des choses singulières opérées par les somnambules, il m’a paru que l’on pouvait en donner une explication fort simple.

Quelquefois les visionnaires croient entendre parler les personnages qu’ils se figurent, et ils ont avec eux une conversation suivie : les ouvrages des médecins sont remplis de faits de ce genre.

Charles Bonnet cite, comme l’ayant souvent observé, son aïeul maternel, « vieillard, dit-il, plein de santé, qui, indépendamment de toute impression du dehors, aperçoit de temps en temps devant lui des figures d’hommes, de femmes, d’oiseaux, de voitures, de bâtimens, etc. Il voit ces figures se donner différens mouvemens, s’approcher, s’éloigner, fuir, diminuer et augmenter de grandeur, paraître, disparaître, reparaître. Il voit les bâtimens s’élever sous ses yeux, etc. Mais il ne prend point ses visions pour des réalités : sa raison s’en amuse. Il ignore d’un moment à l’autre quelle vision va