Page:Laplace - Exposition du système du monde, 2e ed, 1798.djvu/62

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grandeur des degrés en France, indiquoient ces écarts ; mais les erreurs inévitables des observations, laissoient des doutes sur cet intéressant phénomène, et l’Académie des sciences, dans le sein de laquelle cette grande question fut vivement agitée, jugea avec raison, que la différence des degrés terrestres, si elle étoit réelle, se manifesteroit principalement dans la comparaison des degrés mesurés à l’équateur et vers les pôles. Elle envoya des académiciens à l’équateur même, et ils y trouvèrent le degré du méridien, égal à 99552me,3, plus petit de 465me,6, que le degré correspondant à 51° de hauteur du pôle ; d’autres académiciens se transportèrent au nord, à 73°,7 environ, de hauteur du pôle, et le degré du méridien y fut observé de 100696me,0, plus grand de 1143me,7, qu’à l’équateur. Ainsi, l’accroissement des degrés des méridiens, de l’équateur aux pôles, fut incontestablement prouvé par ces mesures, et il fut reconnu que la terre n’est pas exactement sphérique.

Ces voyages fameux des académiciens français, ayant dirigé vers cet objet, l’attention des observateurs ; de nouveaux degrés des méridiens furent mesurés en Italie, en Allemagne, en Afrique et en Pensylvanie. Toutes ces mesures concourent à indiquer un accroissement dans les degrés, de l’équateur aux pôles.

L’ellipse étant, après le cercle, la plus simple des courbes rentrantes ; on regarda la terre, comme un solide formé par la révolution d’une ellipse autour de son petit axe. Son applatissement dans le sens des pôles, est une suite nécessaire de l’accroissement observé des degrés des méridiens, de l’équateur aux pôles. Les rayons de ces degrés étant dans la direction de la pesanteur, ils sont, par la loi de l’équilibre des fluides, perpendiculaires à la surface des mers dont la terre est, en grande partie, recouverte. Ils n’aboutissent pas, comme dans la sphère, au centre de l’ellipsoïde ; ils n’ont ni la même direction, ni la même grandeur que les rayons menés de ce centre à la surface, et qui la coupent obliquement, par-tout ailleurs qu’à l’équateur et aux pôles. La rencontre de deux verticales voisines, situées sous le même méridien, est le centre du petit arc terrestre qu’elles comprennent entr’elles : si cet arc étoit une droite, ces verticales seroient parallèles, ou ne se rencontreroient qu’à une distance infinie ; mais à mesure qu’on le courbe, elles se