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CHAPITRE XIII.

Du flux et du reflux de la mer.

Quoique la terre et les fluides qui la recouvrent, aient dû prendre depuis long-temps, l’état qui convient à l’équilibre des forces qui les animent ; cependant, la figure de la mer change à chaque instant du jour, par des oscillations régulières et périodiques, connues sous le nom de flux et de reflux de la mer. C’est une chose vraiment étonnante, que de voir dans un temps calme et par un ciel serein, la vive agitation de cette grande masse fluide dont les flots viennent se briser avec impétuosité contre les rivages. Ce spectacle invite à la réflexion, et fait naître le desir d’en pénétrer la cause : mais pour ne pas s’égarer dans de vaines hypothèses ; il faut, avant tout, connoître les loix de ce phénomène, et le suivre dans tous ses détails.

Au commencement de ce siècle, et sur l’invitation de l’Académie des Sciences, on fit dans nos ports, un grand nombre d’observations du flux et du reflux de la mer : elles furent continuées, chaque jour, à Brest, pendant six années consécutives, et elles forment par leur nombre, et par la grandeur et la régularité des marées dans ce port, le recueil le plus complet et le plus utile que nous ayons en ce genre. Mille causes accidentelles pouvant altérer la marche de la nature, dans ces phénomènes ; il est nécessaire de considérer à-la-fois un grand nombre d’observations ; afin que les effets des causes passagères, venant à se compenser mutuellement, les résultats moyens ne laissent appercevoir que les effets réguliers ou constans. Il faut encore, par une combinaison avantageuse des observations, faire ressortir les phénomènes que l’on veut déterminer, et les séparer des autres, pour les mieux connoître. C’est en discutant ainsi les observations, que je suis parvenu aux résultats suivans qui ne laissent aucun doute.