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communiquent beaucoup plus de chaleur qu’il n’en recevroit d’un poids égal d’eau bouillante ; et d’ailleurs, on sait que l’eau pouvant se conserver fluide, quoique sa température soit de plusieurs degrés au-dessous de zéro, elle se transforme alors en glaçons, pour peu qu’on l’agite, et le thermomètre que l’on y plonge, monte à zéro, par la chaleur que ce changement développe.

Sans la pression de l’atmosphère, la glace fondue se réduiroit en vapeurs ; mais cette pression contient la force répulsive que la chaleur communique aux molécules fluides, et maintient la glace fondue, sous forme d’eau, jusqu’à ce que la chaleur soit assez grande pour que sa force répulsive l’emporte sur la pression de l’atmosphère. À cet instant, l’eau entre en ébullition et se réduit en vapeurs ; le degré de température de l’eau bouillante, varie donc avec la pression de l’atmosphère : il est moindre au sommet des montagnes, qu’au niveau des mers ; et dans un récipient dans lequel on peut raréfier et condenser l’air à volonté, on peut accroître ou diminuer à volonté, la chaleur de l’eau bouillante. Ainsi, la chaleur rend la mer fluide, et la pression de l’atmosphère l’empêche de se réduire en vapeurs.

Tous les corps que nous pouvons faire passer de l’état solide à l’état fluide, offrent de semblables phénomènes ; mais la température à laquelle leur fusion commence, est très-différente pour chacun d’eux. Le mercure, par exemple, devient solide vers quarante degrés au-dessous de zéro, comme on s’en est assuré par l’expérience : il commence à se fondre à ce degré de température ; il entre en ébullition, à la température de 376° et à la pression d’une colonne de mercure de 0me,76 ; en sorte qu’à cette pression de l’atmosphère, l’intervalle de la température comprise entre la fusion et l’ébullition, intervalle qui, pour l’eau, est de cent degrés, s’élève à 416°, pour le mercure.

Il existe des corps qui ne peuvent pas devenir fluides, par les plus grandes chaleurs que nous pouvons exciter. Il en est d’autres que le plus grand froid qu’ils éprouvent sur la terre, ne peut pas réduire à l’état solide : tels sont les fluides qui forment notre atmosphère, et qui, malgré la pression et le froid auxquels on les a soumis, se sont jusqu’ici maintenus dans l’état de vapeurs. Mais leur