Page:Lapointe - Une voix d’en bas - Échos de la rue, 1886.djvu/144

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Et, gagnant les faubourgs, grimpent dans leurs maisons,
Oyant les airs confus des voix universelles
Que les brises des nuits entraînent après elles,
Comme un écho mourant de lointaines chansons.

Mais le bal continue, et l’orchestre sonore
Nous dit que l’Ermitage est plein et danse encore.
Entrons. Que vois-je ici ? des gens en falbala,
Musqués et pommadés ! Le peuple n’est point là ;

Grand Dieu ! de l’artisan j’ai reconnu la fille !
Son pas leste emporte de quadrille en quadrille,
Et sa si douce voix.
En écharpe soyeuse, en robes ondoyantes,
En chapeau frais, mes sœurs, à ces rondes bruyantes,
Est-ce vous que je vois ?

Votre joie est bien triste, ô pauvres vierges folles !
Ces hommes ! vous riez à leurs sottes paroles.
Mes sœurs, souvenons-nous.
Du collier de cristal donné par notre mère.
Quoi ! vous vous détournez des pleurs de votre frère !
Oh ! non, ce n’est pas vous !

Vous, modestes naguère, au feu du punch qui flambe,
Par-dessus la pudeur votre délire enjambe.
Mes sœurs, souvenons-nous
Du petit crucifix, gardien de notre couche.
Quoi ! le nom de Jésus contracte votre bouche ?
Oh ! non, ce n’est pas vous !

Toutes de nos voisins vous étiez respectées ;
Par ces hommes, ici, vous êtes insultées.