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Page:Laporte - Émile Zola, 1894.djvu/26

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à un million de lecteurs ; il est d’autant plus dangereux que, loin d’effrayer celui qu’il frappe, il provoque et attire sa curiosité et la pimente de toutes les séductions affriolantes de la passion et du vice ; c’est un foyer permanent de putréfaction et de destruction. Où veux-je en venir, en signalant ce mal moral, produit par le mal physique de l’auteur ? À ceci, que l’écrivain qui conserve assez de sens moral pour avoir conscience des maladies de son esprit, doit veiller à sa plume et n’oublier jamais qu’il est responsable de la santé et de la vie de ceux qui liront son livre.

Étudier l’homme d’après son physique, son moral, ses goûts, dans ses tendances psychologiques, analyser son œuvre, d’après sa méthode expérimentale, dans ses fatalités scientifiques et littéraires, tel est mon but, n’hésitant pas à avouer « que je me sens une sorte de sympathie pour l’auteur qui m’attire à lui par son audace, mais cette sympathie inavouée m’irrite davantage contre son œuvre. Je suis désespéré de voir tant de force, de talent, de vigueur si mal employés. Je le condamne pour être ce qu’il est et pour n’être pas ce qu’il pouvait être… » (Mes Haines, p. 55.)