Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/120

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Ceux qui m’aiment d’amitié sûre,
À me voir ce front soucieux,
Craignant de toucher la blessure,
Devant moi sont silencieux.
Hélas ! je ne vois plus sourire
Les yeux indulgents de l’aïeul ;
Et, parmi nous, il semble dire :
Mon cœur est seul.

Sais-je, au moins, ce que tu dois être,
Toi qu’il endort sur ses genoux ?
Seras-tu digne de l’ancêtre ?
Auras-tu son cœur fier et doux ?
Je tremble, hélas, qu’un Dieu sévère
Ne te frappe, innocent filleul !
Tu n’auras pas connu ta mère !…
Mon cœur est seul.



III

LES FEUILLES MORTES



Chaque arbre a perdu sa couronne,
Et le rameau, chauve et tremblant,
Aux coups d’un vent aigu, frissonne
Sous ses longs fils de givre blanc.

Mais la feuille, encore amassée
En tapis, au bord du chemin,
Offre à ta rêveuse pensée
Un doux sentier jusqu’à demain.