Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/137

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Rempli chacun des jours de ce temps passager ;
Si chaque heure, éprouvant mon active tendresse,
Ainsi que son angoisse avait eu sa caresse !
Mais que d’instants perdus en futiles soucis,
Qui, donnés à vos maux, les auraient adoucis !
Rien n’absoudra mon cœur, expiant ces journées
Du devoir filial lâchement détournées.
Quand de ce lit sacré je m’écartais d’un pas,
Pourquoi votre regard ne m’appelait-il pas ?
Pourquoi garder ainsi toute votre agonie
Sans partager son poids avec l’enfant bénie,
Laissant mes yeux dormir, par un sublime effort,
Quand les vôtres veillaient en face de la mort ?
Ah ! durant cette nuit, fin de votre martyre,
Peut-être accusiez-vous mon amour sans le dire !
Mais non ! et votre adieu, si clément et si doux,
Fut rempli de pardon et nous a bénis tous.
J’ai besoin des vertus de ce pardon si tendre ;
Contre ces nuits d’horreur lui seul peut me défendre !
Des spectres du passé qui m’attirent entre eux,
Un remords filial serait le plus affreux.


LA VISION.

À des maux effacés ne donnons plus de larmes ;
L’ombre de nos douleurs là-haut n’existe plus ;
Le souvenir qui reste à l’âme des élus,
À l’éternelle paix ajoute encor des charmes.

C’est pour toi, pour vous tous, ô mes êtres chéris !
Pour laisser mon exemple à ta foi défaillante,