Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/277

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Une forme éclatante, aussitôt reconnue,
Apparaît à Konrad et descend de la nue.

C’est l’astre souriant, c’est le premier soleil
Qui de son âme en pleurs hâta le doux réveil,
La sainte Béatrix, au désert rencontrée,
Qui d’un monde inconnu lui découvrit l’entrée,
Lui barra le chemin de la forêt des sens.
Et tourna vers le ciel ses désirs grandissants.

C’est elle, en sa beauté qui subjugue et qui flatte,
Avec son regard d’aigle et sa robe écarlate,
La vierge qui nous ouvre, au fond du paradis,
Les cercles radieux aux vivants interdits,
Celle qui lui versa l’ardeur des grandes choses,
Et, le touchant au front de ses mystiques roses,
Le força de gravir, par les sentiers étroits,
Ces sommets de l’amour couronnés par la croix.

L’allégresse entrevue et longtemps poursuivie
Apparaît sur le seuil de la nouvelle vie ;
L’ange qui fait choisir entre les deux chemins,
Se penchant sur Konrad, saisit ses pâles mains ;
Et, comme un fils en pleurs tiré d’un mauvais rêve,
Dans la réalité le réveille et l’enlève.

Il monte, il voit là-bas fuir nos sanglants sommets
Témoins des noirs combats terminés à jamais ;
Il respire, et baigné d’une clarté croissante,
Se sent vivre, étonné de la douleur absente.
Il monte, il monte ; il voit, dans son joyeux essor,