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Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/305

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Voici l’accent plus sombre et la voix surhumaine
Et les âpres conseils de la vertu romaine
Qui défend aux grands cœurs, quand tout plie à la fois,
De fléchir sous un maître et de survivre aux lois.


CATON D’UTIQUE.

« Ma mort absout ton cœur de sa morne tristesse ;
J’ai compris cet abattement
Qui vient, malgré ta flamme et malgré ta jeunesse,
T’accabler ainsi par moment.

Quand je renonce à vivre et succombe à ma tâche,
Et meurs en condamnant les dieux.
Du mal qui m’a tué tu peux, sans être un lâche,
Pleurer à la face des cieux.

Les lois ont succombé ! j’ai vu rire la foule
Autour de leur temple abattu ;
Avec la liberté, dans les âmes s’écroule
L’espoir dernier de la vertu.

j’ai vu prostituer l’honneur des laticlaves
Aux tribuns changés en flatteurs.
Pour premiers citoyens Rome a de vils esclaves ;
Le sénat s’ouvre aux délateurs !

Que Rome soit soumise avec la terre entière
Je reste à jamais indompté !
Ce fer dans ma poitrine ouvre à mon âme fière
Un chemin vers la liberté.