Page:Laprade - Œuvres poétiques, Les Symphonies, 1878.djvu/48

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adah.

Ô frère de la mort, ô sommeil que j’envie !
Dans ma suprême attente, hélas ! tu me trompais !
Je souffre, en ton linceul, les horreurs de la vie :
Tu n’as pu me donner ni l’oubli, ni la paix.

Je ne demandais pas à ta douce magie
De verser à mon cœur des songes superflus ;
J’invoquais pour tout bien la froide léthargie.
Heureux qui dort sans rêve et ne s’éveille plus !

Je bornai là mes vœux. Je ne dois plus entendre
Ce vain nom du bonheur, sans objet, sans échos :
Si Dieu même ici-bas s’offrait à me le rendre,
Je le refuserais ! J’ai besoin du repos.


la neige.

Tombe sans bruit, neige éternelle ;
Couvre de ton linceul ces prés jadis si verts.
Tombe sans bruit, neige éternelle,
Sur ce corps où brillaient tant de charmes divers,
Sur cette âme qui fut si belle.
Tombe sans bruit, neige éternelle,
Enveloppe à jamais ce corps et l’univers.

Tombe sans bruit, neige éternelle,
Étouffe, en même temps, la crainte et le remords.
Tombe sans bruit, neige éternelle,
Interdis le réveil à tout ce qui s’endort,