Et je sais que mon ironie
Les irrite encore à Berlin.
Je sais qu’excitant l’espérance,
Lus dans nos plus humbles cantons,
Mes vers ont, au nom de la France,
Fait pleurer les soldats bretons ;
Que, dans nos revers pleins de gloire,
Pour entretenir sa vigueur,
Maint fils du Rhône ou de la Loire
Se les est récités par cœur.
D’autres sont orateurs sublimes ;
J’ai rêvé de moindres emplois.
Pourquoi donc m’ôter à mes rimes ?
Assez de gens feront les lois !
Et cependant, puisqu’on m’invite
À des maux qu’il faut partager,
Oublions tout et partons vite ;
Restons autant que le danger.
C’est pourquoi de ces deux années
Vous eûtes de si faibles parts ;
Pourquoi dans ces tristes journées,
À peine arrivé, je repars.
C’est ainsi que je vous délaisse,
Mes chers petits, mes seuls amours,
Que je passe au loin ma vieillesse,
Sans vous embrasser tous les jours.