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AMBITION.

Voilà de quels espoirs s’aiguise mon courage ;
Voilà pourquoi je lutte et m’excite à l’ouvrage ;
Voilà quels rêves d’or, dans mes nuits sans sommeil,
Me font, sans un murmure, attendre le soleil.
Enfants ! mon cher secours en mes peines amères,
Je vous bénis encor pour toutes ces chimères ;
Mon souci paternel m’est doux et bienfaisant,
Car il aide mon cœur à fuir loin du présent.
Ainsi, grâce à vous tous, et grâce à ma tendresse,
Je puis porter encor mes maux et la vieillesse,
Et, par vos douces mains tiré de ma langueur,
Retrouver quelquefois mon esprit et mon cœur.
Peut-être, aidé par vous, j’achèverai ce livre ;
Vous êtes ma raison d’espérer et de vivre.

Vienne donc la douleur ! Je saurai la braver,
Ayant gardé par vous la force de rêver ;
Voyant, à l’horizon, au bout de mes souffrances,
Mûrir en gerbes d’or mes belles espérances.

Qu’importe le passé, mon travail imparfait,
Si vous faites, demain, ce que je n’ai pas fait !
J’accepte également, et d’une âme ravie,
Le combat de la mort ou celui de la vie ;
J’aurai bien accompli mon devoir et ma loi,
Si vous êtes meilleurs et plus heureux que moi.


Novembre 1873.