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LE LIVRE D’UN PÈRE.

Lorsqu’ils trottaient dans la bruyère,
Comme jadis les quatre preux,
Sur la monture coutumière
Aucun n’était las ou peureux.
Celui qui demeurait à terre
Se suspendait à ta crinière,
Dans les sentiers durs et pierreux.

Quand tu croyais reprendre haleine
Sur un gazon fin et luisant,
À l’ombre, au bord de la fontaine
Où l’on goûtait en s’amusant,
Quelque aîné, désobéissant,
Pour faire, tout seul et sans gêne,
Un temps de galop dans la plaine,
Sautait sur ton dos complaisant ;
Ou bien, durant une heure entière,
Chantant, riant d’un rire fou,
Toute la blonde fourmilière,
Qui par devant, qui par derrière,
Grimpait de tes pieds à ton cou.

Aussi que de mains empressées,
Au retour du bon cheval gris,
T’apportaient le foin par brassées,
Et t’offraient, à l’envi dressées,
Ta part de sucre et de pain bis !

Mais Dieu sait tout ce qu’il endure
De tous ces démons d’écoliers !
Et jamais une égratignure
N’attrista leurs jeux familiers,