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LE LIVRE D’UN PÈRE.


Tous ces vieux meubles que j’enlève
Aux chères places d’autrefois,
Avec nous, sans repos ni trêve,
Vont voyager sous d’autres toits.

Mais vous êtes encor les maîtres
Du petit manoir consacré.
Certes, ce toit de vos ancêtres
Ce n’est pas moi qui le vendrai !

Chacun va suivre sa carrière,
Puisque Dieu nous a dit : marchez !
Donc, sans regarder en arrière,
Tous au travail ! allez, cherchez,

Dispersez-vous, la terre est grande !
Mais lorsque après un fier labeur
Vous aurez fait ce que demande
Le besoin, et surtout l’honneur,

Si l’un de vous, tendre et modeste,
Fidèle, épris du souvenir,
Dans l’humble maison qui nous reste
S’applique, un jour, à revenir ;

S’il se fait, sous ces vieilles pierres,
Un nid pour deux vrais amoureux,
Celui-là, parmi tous ses frères,
Ne sera pas le moins heureux.


Septembre 1877.