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PIERRE ET PERNETTE.


Grâce au vaincu joyeux qui s’empressait encor
D’apporter son tribut pour grossir ton trésor…
Mais voici les rochers que nous ne passions guère,
Et nous avons franchi nos anciennes frontières.
Dans mes États nouveaux entrons ; viens sans effroi,
Et connais ces hauts lieux dont le proscrit est roi. »

Sous les sapins, d’abord, ils virent les retraites,
Les huttes de rameaux et les grottes secrètes
Où campaient sous leur chef ses libres compagnons,
Tous enfants du pays, tous connus par leurs noms.
Et, propice à chacun, la jeune messagère
Louait les vieux parents, la promise, la mère.

Puis ils montèrent seuls à ce plateau désert,
Ondulant sur nos monts comme un océan vert.
Tels que de noirs clochers au-dessus des bruyères,
Là, des volcans éteints surgissent les cratères,
Et les blocs de basalte en leurs entassements
Simulent, tout à coup, d’étranges monuments.
Là, dominant au loin la déserte étendue,
PIERRE-SUR-HAUTE[1] en fleurs lève sa tête ardue,
Réservoir des torrents et des ruisseaux discrets
Où s’abreuvent tes fils, cher pays de Forez !
Qui montera là-haut verra tout un royaume,
Tout le pays gaulois du mont Blanc au mont Dôme.

Des aigles au grand vol ce lieu reste ignoré,
Mais l’alouette et moi le tenons pour sacré ;
C’est vers lui qu’éveillé par l’humble cornemuse,


  1. La plus haute cime des montagne du Forez