Pour tendre à l’impossible, à l’inconnu qu’elle aime ;
Lasse des biens réels, elle a fui son Dieu même.
A l’arbre offert par toi cueillant le fruit fatal,
Du souffle de ta bouche Eve enfanta le mal.
Par toi, des noirs fléaux l’urne, captive encore,
Épancha ses torrents sous la main de Pandore.
Tu prêtas à Psyché sa lampe et son poignard,
Comme pour forcer Dieu de subir ton regard :
Oubliant que l’amour est la seule puissance
Qui force l’idéal à souffrir violence !
Vois ton œuvre aujourd’hui, vois ces jardins déserts,
Vois la veuve immortelle, errant sur l’univers.
Sur les pas de Psyché tu vas régner en maître,
O toi qui perdis l’âme ! ô désir de connaître !
Par les fureurs du corps et celle de l’orgueil
Tu conduis le troupeau des humains au cercueil :
Les uns, pâles, penchés vers toute chose obscure,
Sourds aux voix de l’esprit, dissèquent la nature ;
D’autres plongent, sans frein, au fond des voluptés,
Cherchant leur infini dans les sens exaltés :
Tous blasphémant l’amour et la beauté féconde,
Ces hôtes merveilleux qu’ils ont chassé du monde ;
Prolongeant jusqu’au bout votre éternel péché,
Eve, ô sein trop fécond ! Pandore ! et toi Psyché !
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