Aller au contenu

Page:Laprade - Œuvres poétiques, Psyché, Lemerre.djvu/83

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.






VI




Ta ceinture d’où pend une lyre d’écaille,
La lente majesté du port et de la taille,
Ce front large et serein, quoique privé des yeux,
Tout m’atteste, ô vieillard, un chantre aimé des dieux.
Dans la sainte Pytho, nourrice des athlètes,
Du laurier des chansons tu viens orner les fêtes.
Mais ce chemin est long ; l’enfant qui te conduit
Va dans les bois sacrés errer jusqu’à la nuit.
Vers ces myrtes épars, si tu me veux pour guide,
Prenons sur la montagne un sentier plus rapide,
Et, devant que Phœbus ne plonge à l’horizon,
Tes pieds auront touché la ville et ma maison.
Je passai là, souvent, sur les bruyères sèches,
En invoquant Diane, armé d’arcs et de flèches,
Et mon bras jeune et fort t’y saura diriger. »

— « C’est un dieu qui t’amène, ô pieux étranger !
Ainsi que tu l’as dit, les dieux que je vénère
M’ont accordé la voix, en m’ôtant la lumière.
Mon âme ne saisit qu’à travers le passé
Le doux tableau du monde à mes yeux effacé.