Page:Laprade - Essais de critique idéaliste, Didier, 1882.djvu/72

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à défaut de la philosophie, ne nous prouve-t-elle pas combien l’humanité est faillible ? Il n’y a donc pas pour les choses humaines de progrès fatal, impossible à éviter, certain comme le développement des choses de la nature. Prétendre que la condition de l’homme et ses œuvres terrestres iront en s’améliorant à l’infini, c’est affirmer d’abord qu’il est impossible à l’homme de prévariquer, et que la présence de l’humanité sur ce globe, que ce globe lui-même, sont éternels, deux affirmations également inadmissibles. Le simple bon sens nous démontre que l’humanité aura un terme en ce monde, comme les nations, comme les individus ; enfin le pouvoir qu’a l’homme de résister à tout ce qui pourrait l’améliorer est un fait malheureusement trop évident. Cette faculté de résistance peut-elle prévaloir contre les desseins de dieu ? Non sans doute ; mais il n’est pas au pouvoir de Dieu de violenter le libre arbitre de l’homme.

J’admets qu’à travers les résistances et les prévarications individuelles, Dieu conduise l’humanité par des voies inconnues vers un but fixé d’avance. Cette parole si souvent citée, « l’homme s’agite et Dieu le mène [sic] », peut être invoquée à l’appui d’un progrès nécessaire et continu. Mais rien ne saurait prévaloir contre la faculté accordée à l’âme de se déterminer et de choisir. La liberté, c’est l’essence même de l’être humain. L’humanité reste à jamais libre, en ce monde, de s’élever ou de déchoir, de se sauver ou de se perdre. S’il est infiniment probable que