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Page:Laprade - Les Voix du silence, 1865.djvu/42

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Mais l’ennui, ce jour-là, mille poids étouffants,
Avaient résisté même au baiser des enfants.

L’ombre des mauvais jours, la crainte des jours pires,
Passaient entre mon cœur et ces jeunes sourires ;
Devant ce cher soleil voilé d’un crêpe noir,
Les spectres de mes morts étaient venus s’asseoir.
J’avais froid dans les os ; le brouillard de novembre
Semblait percer les murs et pleuvoir dans ma chambre.
Incapable d’effort, étendu près du feu,
Je m’écoutais souffrir sans pouvoir prier Dieu.
Sombre, amer, je songeais, cédant presque à l’envie,
A ces âpres détours du combat de la vie
Où va mon pauvre esprit, si souvent abattu
Sous le corps douloureux dont il s’est revêtu ;
Tel qu’un frêle soldat qui, dans sa main trompée,
Saisirait un roseau quand il cherche une épée.
Et devant le destin, sans plus noble souci,