Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/210

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Vous avez du travail creusé le dur sillon,
Et soutenu, trente ans, cette lutte obstinée,
Prix que met votre Père au pain de la journée.

Pour des travaux plus lourds, s’ils sont plus apparents,
Quand Dieu vous appela loin du toit des parents,
Quand, loin de la famille et de ces douces fêtes,
Vous avez commencé la tâche des prophètes,
L’anathème, l’exil, les indignes soupçons,
Vous ont payé, comme eux, du prix de vos leçons.
Contre vous, tout miracle et toute œuvre qui fonde
Suscita le vain peuple et les princes du monde.

Pour vous aimer, au moins, pour être aimés de vous,
Vous vous étiez choisi des frères entre tous ;
Et, le jour de l’épreuve et de la calomnie,
Voilà que l’un vous vend, que l’autre vous renie !

Enfin, cédant sous l’homme, à l’aspect de la croix,
Le Dieu connut en vous nos doutes, nos effrois.
Votre voix, défaillante en prières plaintives,
Repoussait le calice au jardin des Olives.
Comme nous, vous avez frémi devant la mort ;
Votre cœur s’est roidi d’un inutile effort,
Et, pour suprême horreur, à votre heure dernière,
Vous avez pu vous dire abandonné du Père !