Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/261

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Dormez où votre espoir a jeté sa racine ;
Marthe jalouse en vain votre place divine ;
A cette âme qui s’use à des soins superflus
Le Christ a répondu déjà pour ses élus ;
« Le trépied fume encor sur les flammes pressées,
« Les fruits mûrs sont cueillis, les amphores dressées,
« Le miel et le froment pétris dès le matin,
« La salle radieuse est ouverte au festin,
« Les hôtes sont joyeux ; mais une voix réclame…
« Marthe, qu’avez-vous fait pour les besoins de l’âme ?
« Vous avez préparé le pain du serviteur,
« L’esclave est satisfait, mais qu’aura le Seigneur ?
« Croyez-vous que la chair calme sa faim divine ?
« N’a-t-il pas une soif que votre cœur devine ?
« A sa lèvre altérée il faut un vin plus doux,
« Vin qu’a versé Marie, ô Marthe, et non pas vous !
« Ne l’accusez donc pas d’être l’arbre inutile ;
« A qui s’endort sur moi le sommeil est fertile !
« Le travail de plusieurs qui s’en seront vanté
« Portera moins de fruit que cette oisiveté.
« Votre cœur s’est troublé du soin des choses vaines,
« Une seule, pourtant, est digne de vos peines,
« O Marthe, et votre sœur avant vous en fit choix ;
« Assise à mes genoux, elle écoute ma voix ;
« Nul ne lui ravira cette place chérie,