Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/284

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Champs, outils, greniers pleins, troupeaux, maisons prospères
Attestant les sueurs, les vertus de nos pères…
Sur la terre et ses fruits ils ont domaine entier ;
Mais c’est peu, quand jouir reste le seul métier ;
C’est trop peu ! pour grossir les profits du partage,
Ils mettent follement l’avenir au pillage.

La dernière forêt, tombant sous leur viol,
Des sommets décharnés s’écroule avec le sol.
Ils dévorent le sein de la mère nourrice ;
Après eux, s’il le faut, que tout son lait tarisse.
L’œuvre du peuple est faite ! Il va fêter en paix
Le bien-être, seul dieu de leurs rêves épais.

Voyez-la s’élever la cité de l’orgie !
Des fleurs couvrent le sang dont sa base est rougie ;
L’édifice, enrichi des dépouilles du temps, ’
Convie aux longs festins ses impurs habitants.
Écoutez ! c’est la chair qui chante sa victoire
Et des sottes vertus nargue la vieille histoire.

Un regard aux splendeurs de ces autels sans dieu !
Car l’éternelle nuit va descendre avant peu.
En vouant aux plaisirs cette ville rebelle,
Oublieux de la mort, l’homme a bâti pour elle ;