Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/346

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Pour l’amour filial, ah ! que de jours perdus !
Dans votre âme inquiète et si prompte aux alarmes,
Combien un fils meilleur, par ses soins assidus,
En sourires divins aurait changé de larmes !

Ma Mère ! avez-vous su comme je vous aimais ?
Comme en vous j’ai vécu, comme, dès mon enfance,
Envers le monde et Dieu, vous fuies ma défense ?
Tel que je l’ai senti, je ne l’ai dit jamais.

Mais votre âme lisait au-dedans de moi-même ;
Silencieux, absent, je vous restais uni ;
Vous connaissiez mon cœur et vous m’avez béni,
Et le mot de bon fils fut votre adieu suprême.

Ah ! j’en avais besoin pour calmer le remord
De tant de jours ô tés aux maternelles joies,
Et perdus, loin de vous, le long des folles voies,
Et qui m’accusaient tous à votre lit de mort !

La nuit s’est faite en moi depuis cette heure affreuse ;
La source de mon sang me semble avoir tari,
Je cherche une espérance en mon cœur appauvri ;
Vous seule et Dieu savez l’abîme qui s’y creuse.