Page:Laprade - Poèmes évangéliques, Lévy, 1860.djvu/71

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— « Non ; à d’autres présents je crois Dieu plus propice.
Je n’égorgeai jamais, sur les autels anciens,
Les brebis et les bœufs comme les Pharisiens.
Sur les sables fumants des plaines d’Idumée,
J’offrais ma propre chair de jeûnes consumée,
Et mes vils appétits, et tout penchant grossier,
Retranché par l’esprit plus aigu que l’acier.
Non, je n’ai pas prié dans ces enceintes vides
Où tombent des docteurs les paroles arides,
Mais au temple de vie, où mes sens immolés,
Dans la lumière et l’air se sont renouvelés ;
Je m’y dépouille encor, chaque fois que j’y plonge,
De quelque impur lambeau de haine et de mensonge.
Donc, vous qui me suivez dans le lit des torrents,
Rendez-vous comme moi nus, maigres, ignorants ;
Chassez loin dans l’oubli toutes vieilles doctrines,
Et que la vieille chair sèche sur vos poitrines. »
— « Ta voix, maître, nous semble inviter à la mort ! »
— « Nul ne vivra toujours sans s’immoler d’abord,
Sans avoir traversé, voyageur intrépide,

La région du vide et le sable torride.
Écoutez le désert : « Sur mes sables sans fin
« J’endure le soleil et la soif et la faim ;
« Je n’ai ni frais manteau de gazon, ni ceinture