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Page:Laprade - Psyché, 1857.djvu/185

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d’abnégation, sans vous arracher même l’amertume d’un sourire. Cœur généreux et dévoué, longtemps enchaîné dans une sphère où l’égoïsme des sentiments n’a d’égal que la stérilité des idées ; où tout ce qui perçait de votre haute pensée vous attira plus d’une fois la dérision ; où vos saintes préoccupations du beau et du vrai, si elles venaient à se trahir, étaient taxées de démence ; jamais vous n’avez rendu le mépris pour l’ironie et la haine pour le dédain. Car vous aviez cette vraie bonté qui n’existe qu’avec des conceptions étendues et des passions Réprimées. Que vous importait à vous, amoureux de l’infini, le jugement des âmes vulgaires ? Entre vous et leur dédain, vous aviez votre conscience, vos amis et Dieu. Aussi comme vous étiez calme et doux pour chacun ! comme vous saviez apprécier dans les autres la moindre intention de vertu ! comme vous pardonniez vite les faiblesses de la volonté et l’impuissance de l’esprit, quand vous aperceviez quelques nobles sentiments dans le cœur ! Si bien que de toutes vos richesses intérieures, votre mansuétude et votre universelle sympathie sont encore à mes yeux le miracle de votre grande âme.

J’ai marché à côté de vous durant les années les plus tristes de votre vie si abreuvée de tristesse, et je n’ai jamais entendu sortir de votre bouche une parole malveillante, un jugement sévère, même contre les plus méchants. Quand mon esprit facile à s’indigner, car il ne voyait pas aussi profondément que vous,