Page:Laprade - Psyché, 1857.djvu/285

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Tu nous raconteras tes merveilleux voyages
Dans les flancs de la terre et dans ceux des nuages.
Le peuple des esprits, sur la brume bercé,
Dans sa langue, avec toi, n’a-t-il pas conversé ?
Les ombres t’ont guidé sur leurs grèves funèbres ;
Tu sais ce que la mort couve dans ses ténèbres.
Tu connais la cité des rêves, leurs travaux ;
Tu vis, avec les fils de leurs mille écheveaux,
Leurs doigts industrieux tresser les broderies
Dont le sommeil déroule à nos yeux les féeries.
Dans leurs champs nébuleux quelles fleurs cueillent-ils,
Pour en tirer ces sucs et ces philtres subtils
Qui, versés par les airs de leur urne d’ivoire,
Font certains jours chargés de vague et d’humeur noire ?
Créant, à notre insu, dans nos cœurs agités,
L’aversion sans cause ou les affinités,
Quelle main lie et rompt ces invisibles trames
Qui, du premier regard, unissent quelques âmes ?
Car dans tous ces secrets tu lis à découvert
Sur ce pâle rivage où t’emporte l’hiver.

Mais ne montais-tu pas vers la sphère meilleure
Que le soleil de vie enveloppe à toute heure,
Dans un globe encor pur et dont les habitants
Portent au fond du cœur un éternel printemps,
Dans un de ces palais où l’âme se repose,
Quand l’idéal l’attire et la métamorphose,
Quand, reine après la lutte où te mal est dompté,
Elle dépose en Dieu sa libre volonté,
Et que, prêt à s’unir avec sa créature,
Pour l’ineffable hymen Dieu la juge assez pure ?