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XXXIII
PRÉFACE.

rurgie, commerce, économie politique, encyclopédiana, équitation, escrime, danse, finances, forêts et bois, géographie ancienne, géographie moderne, géographie physique, grammaire et littérature, histoire, histoire naturelle, jeux mathématiques et jeux de société, jurisprudence, logique, manufactures, marine, mathématiques, médecine, musique, natation, pêche, philosophie, physique, système anatomique, théologie, etc.

Ceux de ces dictionnaires qui ont encore conservé quelque valeur sont les suivants : Antiquités, par Mangez ; Architecture, par Quatremère de Quincy ; Artillerie, par Cotty ; Musique, par Ginguené et Framery ; Théologie, par Bergier ; Histoire naturelle des vers, commencée par Lamarck et Brugnière, continuée par Deshayes, et surtout Grammaire et Littérature, par Dumarsais, Marmontel et Beauzée. Cette collection est précédée d’un vocabulaire universel, qui sert de table pour tout l’ouvrage, car la table spéciale, annoncée d’abord par les éditeurs, n’a point été publiée.

« Il y a trente-trois ans à peine, dit M. Brunet dans son Manuel du libraire, que l’on a terminé cet ouvrage, dont la confection a demandé tout juste un demi-siècle. C’est, à coup sûr, la collection la plus vaste qu’ait jamais produite la librairie française, et nous pouvons même ajouter celle d’aucun pays ; mais, pendant le long espace de temps qui s’est écoulé de 1782 à 1832 (et de cette dernière époque jusqu’à nos jours), toutes les sciences ont fait d’immenses progrès, et il résulte de là que plusieurs des parties importantes de cette encyclopédie, commencées depuis longtemps, sont aujourd’hui fort arriérées, bien qu’on y ait ajouté des suppléments, tandis que d’autres parties, plus nouvellement composées, sont jusqu’ici les meilleurs dictionnaires qui aient paru dans les sciences dont ils traitent. » L’ouvrage entier a coûté 3 000 francs aux premiers souscripteurs.

Dictionnaire Philosophique de Voltaire, publié en 1764. — Les premiers articles de ce dictionnaire furent écrits vers 1752. Le plan de cet ouvrage fut conçu à Potsdam, à ce qu’assure Collini. « Chaque soir, dit-il, j’étais dans l’usage de lire à Voltaire, lorsqu’il était dans son lit, quelques morceaux de l’Arioste ou de Boccace ; je remplissais avec plaisir mes fonctions de lecteur, parce qu’elles me mettaient à même de recueillir d’excellentes observations, et me fournissaient une occasion favorable de m’entretenir avec lui sur divers sujets. Le 28 septembre, il se mit au lit fort préoccupé : il m’apprit qu’au souper du roi, il s’était amusé de l’idée d’un dictionnaire philosophique, que cette idée s’était convertie en un projet sérieusement adopté, que les gens de lettres du roi et le roi lui-même devaient y travailler de concert, et que l’on en distribuerait les articles, tels que Adam, Abraham, etc. Je crus d’abord que ce projet n’était qu’un badinage ingénieux, inventé pour égayer le souper ; mais Voltaire, vif et ardent au travail, commença dès le lendemain. »

Les éditeurs de Kehl ont agrandi le dictionnaire philosophique en refondant, dans un seul tout, plusieurs ouvrages de Voltaire, dont l’analogie porte sur la forme et sur le fond. Ce sont : 1° les Questions sur l’Encyclopédie ; 2° les articles insérés dans l’Encyclopédie ; 3° plusieurs articles destinés par l’auteur au Dictionnaire de l’Académie ; 4° un grand nombre de morceaux publiés depuis plus ou moins longtemps, et où n’avaient rien à voir les gens de lettres de S. M. prussienne. Tels sont les éléments du Dictionnaire philosophique que l’on connaît.

On a comparé avec raison le Dictionnaire philosophique de Voltaire à sa correspondance. Voltaire s’y montre, en effet, comme dans sa correspondance, un causeur vif et étincelant et un causeur universel ; il parle tour à tour de théologie et de grammaire, de physique et de littérature ; il discute tantôt des points d’antiquité, tantôt des questions de politique, de législation, de droit public, et cela sans jamais prendre le ton dogmatique du professeur, sans jamais quitter le ton dégagé de l’homme du monde. Ne lui demandez pas la méthode et la langue de la philosophie et des sciences ; il n’entend pas prendre le long chemin ni se présenter avec le lourd appareil d’un enseignement d’école. Il va, bride abattue, jetant les éclairs de sa raison sur les divers sujets qui s’offrent à lui, déchirant tous les voiles, faisant fuir tous les fantômes graves et mystérieux. Le respect du bon sens le rend quelquefois superficiel ; le respect du bon goût lui ôte constamment l’envie de paraître savant et profond. Ouvrez le Dictionnaire philosophique au mot Abc ou Alphabet, et voyez comment Voltaire y parle de la langue primitive. « Que diriez-vous d’un homme qui voudrait rechercher quel a été le cri primitif de tous les animaux, et comment il est arrivé que, dans une multitude de siècles, les moutons se soient mis à bêler, les chats à miauler, les pigeons à roucouler, les linottes à siffler ?.. Chaque espèce a sa langue. Celle des Esquimaux et des Algonquins ne fut point celle du Pérou. Il n’y a pas eu plus de langue primitive et d’alphabet primitif que de chênes primitifs, et que d’herbe primitive. » Voilà une question lestement tranchée. Cette facile solution ne saurait évidemment nous dispenser de consulter les Max Muller et les Renan sur la filiation des langues et l’origine du langage. Un physicien de nos jours sourirait en lisant l’article Air : mais que dites-vous de ce trait qui termine l’article : « On nous parle d’un éther, d’un fluide secret ; mais je n’en ai que faire ; je ne l’ai vu ni manié, je n’en ai jamais senti, je le renvoie à l’esprit recteur de Paracelse. Mon esprit recteur est le doute, et je suis de l’avis de saint Thomas Didyme, qui voulait mettre le doigt dessus et dedans. » N’est-ce pas là le positivisme d’Auguste Comte, moins la forme pédantesque ?

Malgré ce positivisme, l’auteur du Dictionnaire philosophique est déiste ; il s’arrête dans cette région moyenne qui lui paraît