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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 1, part. 1, A-Am.djvu/52

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LII
PRÉFACE.

Comme tout ce qui sort de la plume de M. Vapereau, le Dictionnaire des contemporains est très-bien écrit ; on y retrouve à chaque ligne le normalien qui s’est nourri de la moelle des génies de l’antiquité.

Cependant cette critique manquerait encore de justice si nous n’ajoutions pas que le Dictionnaire des contemporains est un des livres qui nous ont le plus aidé dans notre travail. Il nous a épargné une correspondance pénible et fastidieuse. La biographie contemporaine est un champ que M. Vapereau a péniblement défriché à notre profit, et s’il ne l’a semé que de guimauves, s’il n’a pas jugé à propos de rompre un peu la monotonie du coup d’œil en l’émaillant de quelques bouquets de ces plantes aromatiques que l’art culinaire appelle assaisonnements, nous ne pouvons nous empêcher de reconnaître que le Dictionnaire des contemporains est une œuvre éminemment utile, où l’on trouve une foule de renseignements précieux et presque toujours exacts.


OUVRAGES LEXICOGRAPHIQUES, ENCYCLOPÉDIQUES, BIOGRAPHIQUES
CHEZ LES NATIONS ÉTRANGÈRES

Il nous reste à jeter un coup d’œil sur les travaux encyclopédiques qui ont été entrepris chez les différents peuples du globe : les Anglais, les Allemands, les Italiens, les Espagnols, les Arabes, etc. Ici, nous avons un choix à faire, car les matériaux sont considérables. Dans cette course rapide, nous ne pouvons guère que mentionner sommairement ; toutefois, nous nous arrêterons plus longuement sur le Dictionnaire anglais de Johnson, et sur celui de la Crusca, qui jouissent d’une réputation européenne méritée.


Encyclopédie (the Cyclopedia), par Chambers, publiée en 1728, en 2 volumes in-folio. C’est le premier dictionnaire ou répertoire encyclopédique qui ait paru dans la Grande-Bretagne. L’auteur, qui avait exercé dans sa jeunesse la profession de fabricant de globes, était un homme laborieux et fort honnête ; mais ce n’était pas un savant. Quoi qu’il en soit, l’idée qu’il avait conçue et qu’il mit courageusement à exécution était féconde, et il lui reste l’honneur d’avoir mis, le premier, la pioche dans un champ vaste et jusqu’à lui inexploré. Son plan fut celui-ci : considérer les diverses matières, non-seulement en elles-mêmes, mais analogiquement, dans leurs rapports avec les autres branches. Pour atteindre ce résultat, il imagina un système fort ingénieux de renvois, au moyen duquel les détails accessoires se trouvaient rattachés aux parties principales. Son ouvrage eut cinq éditions en moins de dix-huit années. L’auteur étant mort en 1740, l’Encyclopédie fut revue et augmentée. Le dernier remaniement a été opéré sous la direction du savant docteur Abraham Rees, qui en a publié une édition en 45 vol. <span style="white-space:nowrap;"><abbr class="abbr" title="in-quarto">in-4<sup style="font-size:70%;">o, à laquelle les plus grands écrivains de l’Angleterre se sont empressés d’offrir leur collaboration. Aujourd’hui, en Angleterre, l’Encyclopédie de Chambers est dépassée de bien loin, et son plus beau fleuron est d’avoir suggéré à Diderot l’idée de l’Encyclopédie du XVIII siècle. C’est ici le cas de dire, en retournant le beau vers d’Hippolyte :


Et moi, père inconnu d’un si glorieux fils.

Dictionnaire de la langue anglaise, par Samuel Johnson, regardé comme le meilleur, peut-être, qui existe dans aucune langue. En 1740, deux libraires de Londres s’associèrent pour l’entreprise d’un dictionnaire qui répondit plus complétement aux besoins de la langue que les ouvrages qui existaient déjà en ce genre, et, sur la recommandation de Warburton, ils chargèrent Johnson de la rédaction de ce vaste travail, qui fut publié en 1755. C’est une œuvre d’un mérite incontestable, et l’on a droit de s’étonner qu’elle soit celle d’un seul homme, quand on pense que, pour l’accomplir, il fallait d’abord se livrer à tant d’études, de lectures, de recherches et de réflexions. Johnson excelle dans l’art si difficile de fixer le sens d’une expression ; ses définitions, nettes, précises, exactes, portent le cachet d’un sens droit, d’une grande sagacité et d’une clarté lumineuse. On admire aussi l’heureux choix de ses exemples, tous empruntés aux poëtes, aux écrivains, aux philosophes et aux théologiens les plus éminents de l’Angleterre. Lui-même avait eu le soin de les choisir et de les souligner dans ces divers auteurs, où ses copistes les transcrivaient ensuite. Tous ces fragments, détachés du corps qui leur donnait le mouvement et la vie, sont néanmoins choisis avec un tel art, un tel goût, que la lecture en est encore attrayante, au point que l’historien Robertson assure qu’il a lu le dictionnaire de Johnson d’un bout à l’autre. Souvent le lexicographe anglais allie l’humour à la gravité de ses définitions, et on ne peut s’empêcher de reconnaître qu’il le fait avec un rare bonheur. Johnson qui, en sa qualité de tory, détestait Walpole et l’acte de l’excise, dû aux wighs, définit ainsi ce mot : « Excise, taxe odieuse levée sur notre bien-être et décidée, non par les juges naturels de la propriété, mais par des misérables aux gages de ceux à qui elle doit