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Causes célèbres, a servi de première base à l’auteur. L’abbé de l’Épée, fondateur de l’institution des sourds-muets, trouve un jour sous des haillons un jeune sourd-muet de huit ou neuf ans, et le recueille. Bientôt il découvre que son élève doit le jour à un membre de la haute magistrature d’une des principales villes de France. L’oncle maternel du jeune sourd-muet, à qui la tutelle en avait été confiée, voulant s’assurer d’une fortune immense que la mort du comte d’Arancour (nom substitué par égard au véritable) laissait à son fils unique, avait égaré son pupille dans les rues de Paris, sûr que l’infirmité de celui-ci lui ôterait tout moyen de réclamation. De plus, il suborna des témoins, et un faux extrait mortuaire constata la mort du jeune comte. Mais il avait des complices que le remords poursuivit, et de plus un fils vertueux, à qui jadis le jeune sourd-muet avait sauvé la vie au prix d’une grave blessure reçue au bras droit, blessure dont la cicatrice n’avait pas disparu. Il en résulte que l’abbé de l’Épée peut accabler l’usurpateur de preuves convaincantes, et obtenir pour son élève la restitution de son nom et de ses biens.

La pièce, d’une couleur un peu trop pastorale, n’en obtint pas moins un grand succès. Monvel jouait en perfection le rôle de l’abbé de l’Épée. La pièce est restée au répertoire.

ABBESSE s. f. (a-bè-se — rad. abbé.) Supérieure d’un monastère de filles ayant titre d’abbaye : On la fit abbesse, sans que, dans un âge si tendre, elle sût ce qu’elle faisait. (Boss.) Le corps d’Abailard fut porté au Paraclet, dont Héloïse était abbesse. (Hénault.) Pour moi, je mettrais la petite avec sa tante ; elle serait abbesse quelque jour ; cette place est toute propre aux vocations un peu équivoques : on accorde la gloire et les plaisirs. (Mme de Sév.) Nous vîmes entrer majestueusement l’abbesse à cheveux gris, armée de sa crosse. (De Broglie.)

Abbesse perpétuelle, Celle qui était nommée à vie. || Abbesse générale, Abbesse dont l’autorité s’étendait sur plusieurs abbayes.

— Le nom d’abbesse se donnait aussi à la supérieure d’un chapitre de dames, et lui conférait, à défaut d’une autorité réelle, une haute considération dans le monde et un rang très-élevé.

— Par antiphrase et triv., Femme qui tient une maison de prostitution, que l’on appelle alors couvent.

Encycl. L’institution des abbesses est postérieure à celle des abbés. Les abbesses étaient autrefois élues par leurs communautés ; on les choisissait parmi les plus anciennes et les plus capables de gouverner. Les abbayes de filles conservèrent longtemps en France ce droit d’élection, parce qu’elles n’avaient pas été comprises dans le Concordat entre Léon X et François Ier (V. abbaye). Les abbesses n’avaient que l’administration du temporel de leurs couvents ; pour le spirituel, elles relevaient de l’évêque diocésain. Un décret du concile de Trente porte que celles qu’on élit abbesses doivent avoir au moins quarante ans d’âge et huit ans de profession. Leur position et leurs immenses revenus leur donnaient un rang très-élevé dans le monde, et des familles puissantes, et même souveraines, se montrèrent souvent jalouses d’obtenir ce titre pour une fille de leur maison.

ABBEVILLE, chef-lieu d’arrond. (Somme), à 45 kil. d’Amiens et à 157 de Paris. Pop. aggl. 18,626 h. — pop. tot. 20,058 h., autrefois capitale du Ponthieu. L’arrondissement a 11 cant., 171 comm. et 140,738 h. Place de guerre ; port sur la Somme. Nombreuses manufactures de draps, moquettes et tapis. Commerce considérable de céréales, de graines oléagineuses, d’ardoises, de bois de construction, etc. L’église de St-Vulfran, qui date du XVIe siècle, est un morceau magnifique. Musée communal renfermant de nombreuses collections d’histoire naturelle et de curieuses antiquités, entre autres une pirogue celtique, de belles amphores et des armes romaines. Patrie du poëte élégiaque Millevoye, du musicien Lesueur et du géographe Sanson. En 1763, le chevalier de La Barre y fut jugé et exécuté.

ABBEVILLOIS, OISE s. (a-be-vi-loi). Géograph. Habitant d’Abbeville : Un abbevillois. Une abbevilloise.

— Adj. Qui est propre à Abbeville ou à ses habitants : Les mœurs, les coutumes abbevilloises.

ABBIATEGRASSO, village de la délégation de Pavie, en Italie. C’est près de là que Bayard fut tué, en 1524.

ABBITIBE s. des 2 g. (ab-bi-ti-be). Géogr. Peuple de l’Amérique du Nord.

— S’empl. aussi adjectiv. ; Le peuple abbitibe. La population abbitibe.

ABBON, surnommé le Courbe, moine de St-Germain-des-Prés, mort en 923. Il écrivit en vers latins la relation du siège de Paris par les Normands. Il a laissé la réputation d’un mauvais poëte, mais d’un historien exact. M. Guizot a donné la traduction française du Siège de Paris.

ABBON, abbé de Fleury, né près d’Orléans, vers 945, mort en 1004. Il fut un des plus savants religieux de son temps et remplit quelques missions diplomatiques auprès du saint siège. Son Abrégé des vies de 91 papes (publ. à Mayence, en 1602) est encore estimé.

ABBOT (Georges), archevêque de Cantorbéry, théologien anglican, né en 1562, mort en 1633. Ses écrits les plus importants sont une Description de l’univers et une Histoire des massacres de la Valteline.

ABBOTSFORD (pr. angl. a-beut-sfeurd), magnifique manoir, construit et décoré par W. Scott, à qui il a servi de résidence, et qui l’a rendu à jamais célèbre. Il est situé près des abbayes de Melrose et de Jedburgh, dans le comté de Roxburgh, en Écosse, sur la rive méridionale de la Tweed, à 45 kil. S.-E. d’Edimbourg. L’entrée d’Abbotsford est une imitation de celle du palais de Linlithgow (Écosse), où naquit Marie Stuart. Sous la voûte d’un vestibule ouvert, orné de cornes de cerf pétrifiées, une porte à deux battants donne accès dans une grande salle ornée de vitraux, et pavée en marbre blanc et noir des Hébrides ; les murs sont couverts de riches boiseries de chêne sculpté, où l’on voit représentées les armoiries des plus puissantes familles de l’Écosse. Cette salle communique, à droite, avec le cabinet de travail de W. Scott, éclairé par une seule fenêtre, garni des livres dont ce grand écrivain se servait le plus souvent, et orné de deux portraits de Claverhouse et de Rob-Roy. Du cabinet de travail on passe dans la bibliothèque, tout en chêne, qui renferme, outre 20,000 volumes et des manuscrits précieux, un buste de W. Scott, par Chantrey, avec un autographe, la canne de Swift et un sarcophage d’argent, trouvé au Pirée et offert au romancier par Byron. Le salon, décoré d’une tenture chinoise envoyée à W. Scott par le pape, renferme encore un beau portrait de Dryden, et une urne d’argent remplie d’ossements du Pirée, autre présent de Byron à son ami. La salle à manger, en chêne, sculpté d’après les plus curieux modèles de Melrose, renferme la remarquable collection des portraits authentiques de lord Essex et du duc de Montmouth, par Leslie ; d’Hogarth, par lui-même ; d’Olivier Cromwell, de Charles II d’Angleterre, de Charles XII de Suède, de Prior, de Gay, de la duchesse de Buccleugh et enfin celui de Marie Stuart, peinte par Amias Canrood, le lendemain de son exécution, et donné à W. Scott par un noble prussien. L’arsenal, qui clôt l’énumération des pièces importantes de ce beau et intéressant domaine, est une salle basse, éclairée seulement par deux fenêtres, qui s’ouvrent en face l’une de l’autre. Il est rempli d’armes de toutes les époques et de tous les pays, et de têtes d’animaux. On y remarque surtout : le fusil de Rob-Roy, les pistolets de Claverhouse, une épée donnée par Charles Ier à Montrose, et les pistolets que portait Napoléon à Waterloo. Abbotsford appartient aujourd’hui à sir Hope, époux de la petite-fille de W. Scott.

ABBT (Thomas), littérateur allemand, né à Ulm en 1738, mort en 1766. Ses écrits ont contribué à la renaissance de la littérature allemande. On cite surtout son traité Du Mérite, trad. en fr. par Dubois (1767). Par son ouvrage De la Mort pour la patrie (1761), il avait contribué à relever le courage de ses concitoyens pendant la guerre de Sept-Ans.

ABC s. m. (mot formé des trois premières lettres de l’alphabet). Livre dans lequel les enfants apprennent les lettres et les premiers éléments de la lecture : Les abc ne sont point rares, les bons ne sont pas communs, et les meilleurs ne sont pas sans défauts. (Beauzée.)

À ces vieux rudiments, fléaux du premier âge,
      Même à cet antique Abc,
        Dont l’esprit fut vexé,
Je me suis opposé, non sans quelque courage.
Fr. de Neufchateau.

— Alphabet : Quand nous avons dit que les marchands de Tyr enseignaient leur abc aux Grecs, nous n’avons pas prétendu qu’ils eussent appris aux Grecs à parler. (Volt.)

— Fig. Les principes, les éléments d’un art, d’une science quelconque : L’abc de la philosophie, de la politique, de l’astronomie, etc. C’est le fondement et l’abc de toute notre morale. (Pasc.) De pareils exercices ne sont que l’abc de l’école des filous. (Le Sage.) Notre siècle peut-il prononcer sur une science dont il ne connaît pas même l’abc ? (Fourier.)

— Par ext. Nom donné à quelques ouvrages scientifiques élémentaires : Abc du dessin. Abc musical. Abc du pianiste. L’abc du style.

N’en être qu’à l’abc d’une science, d’un art, d’un métier, N’en avoir que les premières notions, || Renvoyer quelqu’un à l’abc, Le traiter d’ignorant, || Par abc. Par toutes les lettres de l’alphabet. || Il l’a maudit par abc, Il lui a donné toutes les malédictions possibles :

Et l’on voit le marchand, à bon droit courroucé,
Maudissant mille fois l’auteur par abc.
Chez l’épicier du coin envoyer le libelle.
(Satiriques du XVIIIe siècle.)

— On dit aussi, mais plus rarement, abcd, dans les mêmes sens : Savant jusqu’à l’abcd. (J.-B. Rouss.) Nous voilà tous ignorant l’abcd de la langue et de la poésie. (Le Brun.) Il va trouver le premier archevêque venu et lui demande sa bénédiction pour un abcd religieux. (F. Soulié.)

ABCÉDANT (ab-sé-dan) part. prés. du v. Abcéder : Cette tumeur abcédant, le malade sera soulagé.

ABCÉDÉ, ÉE (ab-sé-dé) part. pass. du v. Abcéder : Tumeur abcédée. Glandes abcédées.

— Prend être pour exprimer l’état, et avoir pour exprimer l’action : Lorsque les amygdales sont abcédées, on doit attendre, pour les ouvrir, que le foyer soit bien formé. Cette tumeur a abcédé. Ces glandes ont abcédé.

ABCÉDER v. n. ou intr. (ab-sé-dé — du lat. abscedere, s’écarter ; l’é fermé du rad. se change en è ouvert devant une syllabe muette : il abcède ; excepté au futur et au conditionnel : abcédera, abcéderait). Dégénérer en abcès, se transformer en abcès : Cette tumeur abcédera bientôt. (Acad.)

S’abcéder, v. pr. Se terminer en abcès : La tumeur s’abcédera.

ABCÈS s. m. (ab-sè — du lat. absessus, division, séparation). Méd. Amas de pus formé dans une cavité accidentelle ou naturelle du corps : Racine mourut, d’un abcès au foie. Plusieurs sont proches de mourir, qui ne sentent pas la fièvre prochaine ou l’abcès prêt à se former. (Pasc.) Il avait dans la poitrine un abcès qui s’est crevé tout d’un coup et l’a étouffé. (Mme de Sév.) Il lui perça une espèce d’abcès à la région du foie. (L. Racine.) Il y avait longtemps que Madame était malade d’un abcès qui se formait dans le foie. (Volt.) Deux jours après, l’abcès perça de lui-même. (Volt.)

C’est une épée, un glaive favorable,
Qui dans ses mains, malgré lui secourable,
M’ouvrant le flanc pour abréger mon sort,
Perce l’abcès qui me donnait la mort.
J.-B. Rousseau.

Encycl. Les abcès sont toujours la conséquence d’une inflammation. Si cette inflammation est franche, aigüe et à marche rapide, l’abcès est dit chaud, aigu ou phlegmoneux ; si au contraire elle se développe lentement et presque sans causer de douleur, l’abcès prend le nom de froid ou de chronique. Lorsque le pus formé dans un point subit une sorte de migration, s’accumule dans un tissu primitivement sain, il forme un abcès par congestion ; lorsque l’abcès constitue à lui seul toute la maladie, on l’appelle idiopathique ; lorsqu’il se trouve lié à la présence d’une affection morbide dont il est une manifestation, il se nomme symptomatique. Il est dit constitutionnel, s’il se développe sous l’influence d’une maladie constitutionnelle ; métastatique, s’il se produit par une sorte de transport subit du pus, dans un point éloigné d’une partie qui est en état de suppuration. — Le signe le plus positif d’un abcès est une tumeur à laquelle on peut communiquer un mouvement de fluctuation. L’abcès diffère de l’épanchement purulent en ce que, dans ce dernier, le pus est accumulé dans une cavité naturelle ; de l’infiltration purulente, en ce que dans l’infiltration, le pus n’est pas séparé des tissus par une membrane de nouvelle formation ; du kyste purulent, en ce que la membrane du kyste est plus épaisse, — Un abcès qui ne se cicatrise pas devient un ulcère. — La gravité des abcès varie avec leur cause, leur nature, leur siège, leur étendue. Le traitement consiste à débarrasser la partie du pus qu’elle contient et à favoriser le rapprochement et l’adhérence des parois de la poche. On peut hâter ou différer l’ouverture d’un abcès aigu, en raison de circonstances diverses. Pour ouvrir un abcès froid, on attend généralement que la tumeur devienne gênante. Quant aux abcès par congestion, ils exigent la plus grande prudence et ne doivent être ouverts que lorsqu’ils ont acquis une étendue considérable. L’instrument tranchant convient pour l’ouverture des abcès chauds ; l’emploi d’un caustique pour celle des abcès froids et des abcès par congestion. — On donne souvent, par extension, le nom d’abcès à des amas d’urine, de matières stercorales, etc., qui se trouvent hors des voies qui leur sont destinées : de là les abcès urineux, stercoraux, etc. Le mot dépôt est plus convenable s’il ne s’y trouve pas de pus.

ABCHASE ou ABCHASIEN s. et adj. (ab-ka-se, ab-ka-si-in). Géogr. Peuple du Caucase.

ABCISSE s. f. V. abscisse.

ABD, mot arabe qui entre dans un grand nombre de noms propres orientaux, et qui signifie serviteur : Abd-Allah, serviteur de Dieu ; Abd-el-Kader, serviteur du Dieu puissant, etc.

ABDALLAH s. m. (de l’ar. abd, serviteur ; Allah, Dieu). Religieux solitaire, chez les Persans. Il est connu, en Turquie, sous le nom de derviche. — On dit aussi abdal et abdalas

ABDALLAH, père de Mahomet, né à la Mecque, vers 545, mort en 570. Il fut, dit-on, conducteur de chameaux, et, d’après les légendes arabes, recherché en mariage par une reine de Syrie. On ne sait d’ailleurs rien de certain sur sa vie.

ABDALLAH, oncle d’Aboul-Abbas, le premier calife abbasside, à l’élévation duquel il contribua par le massacre des princes ommiades. À la mort de son neveu, il revendiqua le califat et fut tué en 755.

ABDALLAH-BEN-ZOBAÏR (bène), calife de la Mecque, fut élu l’an 680 par les habitants de la Mecque et de Médine, qui voulaient se rendre indépendants de Yesid, calife de Syrie. Il régnait depuis douze ans, lorsqu’il fut assiégé dans sa capitale par Abd-el-Mélek ; il périt après une résistance désespérée.

ABDALLATIF, historien et médecin arabe, né à Bagdad en 1162, mort en 1231. M. Silvestre de Sacy a donné une traduction française (Paris, 1810) de sa Relation de l’Égypte, ouvrage important pour l’histoire et les antiquités de cette contrée.

ABDALLIHS s. m. pl. (ab-dal-li). Géogr. Nom d’une tribu qui habite dans l’ouest de l’Afghanistan ; c’est la plus puissante, la plus nombreuse, la plus civilisée : Achmed-Shah, de la race des abdallihs, profita des troubles que la mort de Nadir-Shah amena en Perse, en 1747, pour affranchir les Afghans de la domination persane, se constituer souverain d’un empire afghan indépendant, et fonder la dynastie des Douranhis ou des abdallihs. (Encycl.)

ABDALLITE s. m. (ab-dal-li-te — de l’ar. abd, serviteur ; Allah, Dieu). Membre d’un ordre de derviches voyageurs.

ABDELAVI s. m. (ab-dèl-a-vi), Espèce de melon ou de concombre qui croît en Égypte et en Arabie. Les Orientaux mangent ses fruits crus ou cuits, et les regardent comme un aliment très-sain. Avec son suc, auquel ils ajoutent un peu de sucre, ils font une boisson d’une saveur agréable et rafraîchissante.

ABDEL-HAMID, sultan des Turcs (1774-1789). Sous son faible gouvernement, la Russie s’empara des provinces au sud du Danube, ainsi que de la Crimée.

ABD-EL-KADER (Sidi-el-Hadji-Ouled-Mahiddin), célèbre chef arabe, né vers 1807, sur le territoire des Hachems, aux environs de Mascara, fils du marabout Sidi-el-Mahiddin. En 1832, il commença à prêcher la guerre sainte, et, à la tête de 10,000 cavaliers, il vint assiéger Oran ; mais le général Boyer, qui commandait nos troupes, le força à battre en retraite. En 1834, il conclut avec le général Desmichels un traité qui lui constituait un véritable royaume limité par le Chélif, et dont Mascara était le chef-lieu. Plus tard il remporta contre le général Trézel un avantage qui redoubla le fanatisme des Arabes. Le maréchal Clauzel, le général Bugeaud, le duc d’Orléans avec le maréchal Valée, luttèrent encore avec énergie contre cet ennemi souvent vaincu, mais toujours infatigable et jamais abattu. Sa puissance n’avait fait que s’augmenter par suite des conditions avantageuses que lui avait faites le général Bugeaud, par le traité de la Tafna (3 mai 1837). La prise de la Smala, par les chasseurs du duc d’Aumale, en 1842, le força à se réfugier dans le Maroc, dont l’empereur Abd-er-Rahman se décida, en 1844, à attaquer les positions françaises. La victoire d’Isly, remportée par le maréchal Bugeaud, força Abd-er-Rahman à cesser de soutenir la cause d’Abd-el-Kader ; mais celui-ci trouva dans l’énergie de son caractère la force de lutter encore, soit contre le Maroc, soit contre les Français jusqu’en 1847. Après avoir vu périr dans une dernière affaire ses plus dévoués partisans, il se rendit au général Lamoricière, demandant à être mené à Saint-Jean-d’Acre ou à Alexandrie. Mais on le fit embarquer pour la France avec sa famille, et il fut détenu successivement au fort la Malgue, au château de Pau et à celui d’Amboise. Napoléon III lui rendit la liberté à l’occasion de la proclamation de l’empire. Alors il se retira à Brousse, avec toute sa suite, où il vécut dans la retraite jusqu’au tremblement de terre qui détruisit cette ville en 1855. De là il se rendit à Damas, où le massacre des Maronites servit à faire éclater sa grandeur d’âme, en lui fournissant l’occasion de protéger les chrétiens au péril même de sa vie. Aujourd’hui il habite la Mecque, lieu de sépulture du Prophète. Abd-el-Kader est actuellement âgé de 56 ans ; son visage est pâle et d’une beauté régulière, pleine de gravité et de mélancolie. Le tour de ses paupières, peint en noir, donne à ses yeux une grande expression de fatigue et de souffrance. De petites moustaches, peu fournies, et une barbe noire ; ornent sa figure. Son langage est riche en expressions métaphoriques, et les images gracieuses, qui sont un des caractères de la poésie orientale, abondent dans sa conversation : « Vous devez avoir froid, lui disait le préfet de Toulon, chargé de le recevoir. — Oh ! non, répondit-il, la chaleur de votre amitié fait fondre pour moi la glace de l’air. »

Le nom d’Abd-el-Kader est acquis à l’histoire, où il occupe une place glorieuse à côté des Judas Machabée, des Witikind, des Bolivar et de tous ceux qui ont lutté vaillamment pour l’indépendance de leur pays.

ABDEL-MÉLEK, calife de Damas (685-705). Il conquit l’Irak puis la Mecque, et s’avança en Afrique jusqu’à Carthage. Il passe pour avoir le premier fait frapper de la monnaie arabe.

ABDEL-MOUMEN (mou-mè-ne), calife almohade d’Afrique (1130-1163), était fils d’un potier. Il conquit le Maroc et le sud de l’Espagne.

ABDÉNAGO, nom chaldéen d’Azarias, un des jeunes Hébreux, compagnons de Daniel, qui furent jetés dans la fournaise ardente. V. Azarias.

ABDÉRAME (Abd-el-Rahman), septième émir ou vice-roi d’Espagne, sous le calife Yesid, ne fut pas plus tôt maître des forces musulmanes de la péninsule, qu’il mit à exécution le projet qu’il nourrissait depuis longtemps d’envahir la France. Il pénétra en Aquitaine à la tête d’une armée formidable, ravageant tout sur son passage, et s’avança triomphant jusque vers la Loire, entre Tours et Poitiers.