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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 1, part. 2, An-Ar.djvu/86

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dil toujours, dans l’application, d’une chose mauvaise que, par précaution oratoire, on parait ne vouloir pas nommer, ce à quoi l’on se décide cependant comme à contre-cœur, et en jetant entre parenthèses la phrase qui fait l’objet de cette allusion ;

« On sait que le mouton n’est pas immortel, et qu’il paye, comme l’homme, un tribut à la maladie et à la destruction. La clavelée, puisqu’il faut l’appeler par son nom, exerce surtout des ravages dans les rangs des bêtes à laine. »

L. Rkybaud.

« En convenant que les anciens ont eu beaucoup de vices qui nous sont étrangers, j’ai presque dit inconnus, il faut avouer, pour être juste, qu’il en est un, sinon le plus odieux, du moins le plus méprisable ; sinon le plus effrayant, du moins le plus à craindre : l’hypocrisie, puisqu’il faut l’appeler par son nom, qui semble appartenir plus particulièrement à nos temps modernes. ». De Jout.

« Ni dans ses doctrines, ni dans ses actes, le clergé français ne donne le moindre prétexte aux accusations d’envahissement amassées contre lui. Les preuves de son esprit d’envahissement seraient-elles donc dans une puissance occulte qui est partout et nulle part, en un mot, puisqu’il faut l’appeler par son nom, dans la congrégation ? » Frayssinous.

3° lia ne mouraient pas. «oui, mais loua étaient frappés. Allusion qui se fait le plus souvent sur le ton de la plaisanterie :

« Un des amis et des correspondants de Mme Récamier, qui se montre le plus à son avantage et qui est tout à feit nouveau pour le public, est le duc de Laval, cousin de M. de Montmorency. C’est lui qui, amoureux longtemps de M">« Récamier, comme l’avait été son cousin et comme l’était son fils, disait que c’était dans la destinée des Montmorency, et ajoutait agréablement :

Ils n’en mouraient peu lous, mais tous étaient frappés. » Sainte-Beuve.

« Pendant un trimestre, la fusillade fut si bien’nourrie, que chaque samedi comptait ses morts. Nulle part on n’a vu un pareil carnage. C’est tout juste s’ils ne mouraient pas ; mais tous étaient frappés, Julio et Présalé, Camélio et Cascarin, Orviétan et Molossard, Choufleury et Perruchon, et chacun se disait en frissonnant-: Il va y avoir, un de ces matins, une tuerie épouvantable ; cet imprudent Argyre n’en sera pas quitte à moins de dix affaires. »

A. CE PONTMARTIN.

« Tout le reste de Paris est enrhumé : Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés, comme vous disiez. Adieu, ma chère enfant, je vous embrasse tendrement, et toute votre grande et petite compagnie. ■

Mme de Skvionb, à sa fille.

« Quand nos troupes vinrent en Italie, ceux qui usèrent sans précaution des femmes et du pain du pays, s’en trouvèrent très-mal. Les uns crevaient d’indigestion, les autres coulaient des jours fort désagréables.

Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés. • P.-L. Courier.

Plu» d’o«

il plu* do Joie

ANI

« Assez souvent M. de la Bédollière et les siens, affichant des teneurs qui ne les ont jamais empêchés de dormir, gémissent sur le tort que les catholiques feraient au monde s’ils conduisaient la chose publique : les arts bannis, les sciences proscrites, tous les agréments de la société perdus, plus d’amour, partant plus de joie, et nulle autre lumière que celle des bûchers. » Louis Veuillot.

Que m’a.

aient-Ils fuit ? nulle

Dans l’application, ces deux vers se rappellent en guise d’épiphonème, et servent à caractériser un état de tristesse, ou simplement de contrariété, qui bannit des esprits l’idée des plaisirs. L’allusion est quelquefois directe, pour exprimer l’absence même de l’amour :

« Aussi, dans quel état de consternation ma pauvre commune de Gigondas se présentait à mes regards effarés 1 Une terreur morne avait succédé aux espérances éveillées par ma nomination. On s’abordait en tremblant ; les tourterelles se fuyaient ; le café était désert. Cauvin ayant organisé, disait-on, une police secrète, chacun se méfiait de son voisin comme d’un dénonciateur : les femmes mêmes se taisaient. On se serait cru à Venise, au plus formidable moment du Conseil des Dix. >

A. DE PONTMARTIN.

« Ce sont là les nouveaux horizons que nous ouvre la Femme (de M. Michelet), horizons pleins encore de variété et d’infini ! L’esprit à côté du cœur !... C’en est trop cette fois ; l’idole est trop séduisante et trop belle pour ne point mériter l’universelle adoration. Lés hommes vont se rendre enfin ; ils sont tristes, ils s’ennuient :

Plu* d’amour, partant plus de joie. 3e ne doute pas qu’ils ne se convertissent bientôt tous au dieu d’hymen, et que le mariage, si longtemps, hélas ! en discrédit, ne refleurisse bientôt avec une force et une vertu Singulières. » P. Delacroix.

■ Il y a, de l’homme à la bête et a tout ce qui existe, des sympathies et des haines secrètes dont la civilisation ôte le sentiment. J’aimais mes vaches, mais d’une affection inégale ; j’avais des préférences pour une poule, pour un arbre, pour un rocher. On m’avait dit que le lézard est ami de l’homme, et je le croyais sincèrement. Mais j’ai toujours fait une rude guerre aux serpents, aux crapauds et aux chenilles.

Que m’avaient-ils fait ? nulle offense. •

Proudhon.

En le* croquant, beaucoup d honneur.

Vers d’une application toujours ironique, pour faire comprendre que le petit doit toujours se trouver très-honoré des libertés, des licences, si loin qu’elles aillent, que le grand sepermet a son égard. Cejte idée est spirituellement exprimée dans le Sénateur de Béranger, qui avait le privilège de dérider le front de Napoléon 1er :

« En quel pays la maxime la plus abominable, la plus contraire au bien public, n’est-elle pas tolérée du puissant auquel elle est favorable ? En quel pays a-t-bn constamment puni l’homme vil et bas qui répète au prince, après Vous leur files, seigneur,

■ En les croquant, beaucoup d’honneur.

Helvétios.

70 Au dire do chacun étaient de petite saints.

Vers qui exprime malicieusement le travers de ceux qui, en- présence d’une accusation, s’attribuent au plus haut degré la veçtu opposée

ut au plus uaui uegre ul

e qu’on leur reproche :

« J’aime mieux encore qu’on dénonce à tort et à travers, j’ai presque dit qu’on calomnie même, comme le père Duchesne, ’ mais avec cette énergie qui caractérise.les âmes fortes et d’une trempe républicaine, que de voir ces ménagements pusillanimes de la monarchie, cette circonspection, ce visage de caméléon et de l’antichambre, pour les plus-forts hommes en crédit ou en place, ministres ou généraux, représentants du peuple ou membres influents des jacobins, qui, au dire de chacun d’eux, sont, tous de petits saints. »

Camille Desmoulins.

8" La faim, l’occasion, l’nerbe tendr

■&g,

Quelque diable aussi ne poussant.,

Vers qui se rappellent pour expliquer une faute, dont on cherche Vexcuse dans des circonstances alléchantes, irrésistibles :

« Le désœuvrement, l’inexpérience, l’herbe tendre et le reste ont tenté les sens d’Emma sans toutefois remuer son cœur’, si bien qu’une charmante petite fille est venue au monde et n’a point demandé à l’état civil la permission de naître. • B. Jouvin.

< Le poète a rencontré sa ’Philis dans un bois, et l’ombre, l’occasion, l’herbe tendre, tout le favorisant, il en a obtenu ce qu’il ne croyait jamais obtenir.

Théophile Gautier,

« J’ai dû vous marquer, si tant est que je vous aie écrit de Milan, comment arrivé là je quittai sagement mon vilain métier. Mais k Paris, la rencontre d’un homme que je croyais

Et, je pense.

Quelque diable aussi me poussant, je partis pour l’armée d’Allemagne, dans le dessein extravagant de reprendre du service. » P.-L. Oourier.

« À la fin, je suivis un groupe de nouveaux arrivants et j’entrai dans le bal.

« Ne vous hâtez pas trop de me crier haro, car, en vérité, j’étais à peu près dans la même position que ce pauvre baudet de La Fontaine. Il pleuvait, je n’avais point de parapluie, et je craignais de gâter mon chapeau neuf. Joignez-y

La faim, l’occasion, l’herbe tendre, et, je pense,

Quelque diable aussi me poussant ;

que de circonstances atténuantes, et où est le

pharisien qui oserait me jeter la première

pierre ? • Victor Fournkl.

9° Puisqu’il faut parler net. Hémis ANI

tiche devenu la formule qui termine une confession pénible à l’amour-propre :

« À la distribution des prix, auxquels je n’avais aucune prétention, et que sans regret je voyais donner à mes qamarades plus jeunes que moi, n’eus-je pas le malheur insigne d’être gratifié do la croix de sagesse, cet éternel partage des ânes de collège ? J’y avais bien quelque droit, puisqu’il faut parler net, car je n’étais ni joueur, ni bruyant, ni indocile. Mais les élèves ne manquèrent pas de crier haro sur le baudet. ». Béranger.

10" Haro iiur le baudet. Clameur

qui s’élève contre quelqu’un sur qui on fait retomber, le plus souvent avec injustice, toute la responsabilité d’une faute générale :

« Et quand enfin la toile était levée et que l’œuvre allait à son but, splendide, éclatante, à travers ses sentiers plus que divins, quel misérable eût osé, je ne dis pas pousser un murmure, mais simplement fermer un œil ? Ah 1 le malheureux, qu’il eût été bien a plaindre 1 Damnation ! il n’a pas écouté Hernani ! 11 est resté froid àBernani ! tJïaro sur le baudet ! » Il y allait véritablement de la vie et de la mort. » J. Janin..

■ Ceux qu’il avait le plus aidés se montraient les plus vils et leS plus amers. Encore s’il n’avait été que malhonnête homme I mais c’était bien pis, il avait été maladroit t Uaro sur le baudet !» A. Achard.

« Pour fêter pieusement l’anniversaire du 24 février, le peuple s’était rendu de tous les points de Paris en pèlerinage à la place de la Bastille. Il avait suspendu des couronnes funéraires aux grilles de la colonne. La police de M. Carlier enleva pendant la nuit ces pieuses. offrandes. L’indignation cette fois fut sérieuse. Le ministre de l’intérieur lui-même crut devoir flétrir un pareil acte. Bref, le haro tomba sur un pauvre officier de paix, qui joua le rôle de l’âne dans cette autre fable des animaux malades de la peste. » H. Castille.

11° Dn loitp, quelque peu clerc... Mots ironiques à l’adresse du pédant qui, dans quelque circonstance que ce soit, s empare du rôle d’accusateur public :

« À Nogent-le-Rotrou, il ne faut point danser, ni regarder danser, de peur d’aller en prison. Gendarmes aussitôt arrivent ; en prison le bal et les violons, danseurs et spectateurs, ’ en prison tout le monde. Un maire verbalise ; un procureur du roi (c’est comme qui dirait un loup quelque peu clerc) voit là-dedans des complots, des machinations, des ramifications ! Que ne voit pas le zèle d’un procureur du roi ! » P.-L. Courier.

« Paul-Louis, quelque peu clerc, écoute leurs récits, recueille leurs propos, sentences, dits notables, qu’il couche par écrit, et en fait des articles, sans y mettre du sien, sans y rien sous-entendre. » P.-L. Courier.

120 Ce pelé, ce galeux, d’où venait tout leur

mal. Vers qui résume, avec autant d’énergie que d’injustice, la réprobation générale dont une personne ou une chose est 1 objet :

Je suis convaincu qu’on exagère l’influence pernicieuse du tabac, qui joue dans le concert des récriminations contemporaines le rôle do l’âne de la fable. Il est le pelé, le galeux, soit, et vous criez haro ; mais ce n’est pas de lui que nous vient tout le mal. Les moralistes savent cela aussi bien que moi. »

Edmond Texier.

13» Mmiger l’herbe d’nutrui t Exclamation qui sert à exprimer pittoresquement le prétendu crime d’un pauvre diaule qui, le plus souvent, n’a commis qu’une peccadille ; Mais si, pour ce métier, un hiJmrae a trop de cœur. S’il veut tout du mérite, et rien de la faveur, Si, mis entre sa place et l’honneur, il résigne L’emploi dont il vivait, pour rester "dans sa ligne ; Après un mot d’estime et de compassion, Nul ne se souviendra de sa belle action ; Il est pauvre, inutile, et chacun le délaisse ; Et qu’il se garde alors d’avoir une faiblesse ! Un harr- général s’élève contre lui : Il a, le malheureux, mangé l’herbe dautrui ! Ponsard,

140 Quelcrimo abominable ! Phrase

exclamative qui sert à exagérer plaisamment la gravite d’une faute très-légère :

« Le procès de la sculpture serait bien long à faire. On connaît son obstination k revêtir tout le monde du costume antique, et son horreur pour le vêtement moderne n’est un mystère pour personne. Un frac à une statue, quel crime abominable ! Vite une cravate blanche à ce magot de bronze ! »

Jïevue de l’Instruction publique.

15° Rien que la mort n’était capable D’expier son forfait.

Vers auxquels on fait allusion dans les

mêmes circonstances que pour l’application précédente :

« Notez ceci, je vous en prie. Altiéri vend tes manuscrits dont il a la garde ; il est pris sur le fait ; on trouve cela fort bon ; personne n’en dit mot ; on lui donne un meilleur emploi. Moi, je fais un pâté d’encre ; tout le monde, crie haro ! J’ai beau dépenser mon argent, traduire, imprimer à ifbs frais un texte nouveau, je n’en suis pas moins pendable, et rien que la n.ort n’est capable, etc. Je vous embrasse. Mille respects à M">e Clavier. ». P.-L. Courier.

1G0 Sel,

a puis

Ces deux vers, qui résument la moralité de toute la fable, sont d’une application fréquente, et, le plus souvent, dans un ordre d’idées sérieux :

« L’histoire de Jean-le-Blanc, sorte d’aigle, nous apprend à nous défier do la sottise des jugements humains, qui ne sortent guèro de l’orbite fixée par la morale de la fable, Selon que vous serez puissant ou misérable, Un jugement de cour vous rendra blanc ou noir.

Le mépris que le civilisé eut toujours pour Jean-le-Blanc, rapproché du respect qu’il porte à l’aigle, n’est qu’un autre mode d’adhésion à cette morale impie. Il est bien difficile de ne pas se laisser aller à une série de réflexions décourageantes, au sujet de ce rapprochement. » Toussenel.

— Allus. littér.

Cet animal est Irès-mécliani : Quand on l’attaque, il se dé rend.

Allusion à deux vers d’une chanson burlesque intitulée la Ménagerie. Cette bouffonnerie, déjà ancienne et très-peu connue, mérite d’être citée ici tout entière, moins certainement à • cause de sa valeur littéraire, qui est toute négative, que pour les deux vers très-plaisants et très-souvent cités qui en ont été tirés : La Ménagerie, chanson-parade, paroles de M. Théodore P... K..., musique d’Edmond

Voici l’heure, c’est le moment ;

Venez voir la ménagerie,

Le superbe tigre royal,

Le grand lion du Sénégal,

L’ours blanc natif de Sibérie,

Le pélican, saignant ses flancs

Pour en nourrir tous ses enfants Parlé ; — Entrez, entrez, î dames, et comme il y a plus de petites bourses que d’grosses,

2» COUPLET.

Vous allez voir le grand serpent,

Le fameux boa tout vivant, Le même qui perdit la via

À l’incendia du grand bazar ;

De plus, le cruel léopard,

Venant du fond de l’Arabie.

Cet animal est très-méchanl :

Qztand on l’attaque, il se défend. Parlé : — On prie l’honorable socilliété de ne pas confondre le serpent boa avec le fameux serpent a sonnettes, ainsi nommé parce que sf morsure fait venir des cloches ! Et combien mon ami Paillasse ?

Ça n’ coût’ que deux sols, etc.

t combien,

■ Nous l’apporta dernièrement. Parlé : — Nous aurons aussi l’honneur de présenter à l’honorable compagnie le grand hareng voyageur, animal surprenant qui a fait cinq cent vingt-cinq lieues sur mer dans un tonneau de moutarde....sans éternuer ; d’aucuns disent qu’à son arrivée, on lui dit : Hareng... sorsl... Le nom lui en est resté. Et combien, mon ami Paillasse, pour voir toutes ces merveilles ?

Ça n’ coût’ que deux sols, etc. 4« COUPLET.

Y a d’plus, que j’ n’ai pas compté.

Les animaux d’ socilliété ;

C’est une chose trop connue

Que r singe, la pie et l’pierrot,

L’âne, la mouche et l’étourneau ;

On en trouve dans chaque rue.

Sur les dindons, je coups court,

On n’ voit plus qu’ {a dans tout’» les cours.