Aller au contenu

Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 10, part. 1, L-Leo.djvu/383

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LEOP

roi des Belges, fils du précédent et de Louise d’Orléans, né à Bruxelles le 9 avril 1S35. Comme héritier présomptif du trône, il reçut le titre de duc de Brabant, ’fut nommé général-major et, .lorsqu’il fut majeur, il alla siéger au sénat, où il prononça plusieurs discours sur des questions d’intérêt local. En 1853, il épousa la princesse Marie, fille de l’archiduc Joseph, palatin de Hongrie. Deux, ans plus tard, il se rendit à Paris pour y visiter l’Exposition universelle et y séjourna plusieurs semaines. Grand amateur de voyages, il parcourut la plus grande partie de Europe et poussa ses explorations jusqu’aux confins de l’Asie Mineure. À la mort de son père (10 décembre 1865), il monta sur le trône sous le nom de Léopold II. Héritier de la sagesse et de la modération paternelle, le jeune souverain s’est constamment attaché à suivre la voie tracée par Léopold Ier’ et s’est concilié l’affection du peuple en se montrant constamment sympathique aux développements de la liberté. En 1868, la loi relative aux chemins de fer belges et la cession de l’exploitation des lignes du Luxembourg à une compagnie française amenèrent entre le gouvernement belge et la cour des Tuileries un conflit qui attira vivement l’attention de l’Europe, mais qui, après do longues négociations entre M. Frère-Orhan et notre ministre plénipotentiaire, M. de La Guéronnière, se termina par un arrangement (avril 1869). Au commencement de l’année suivante, les élections pour la seconde Chambre ayant donné la majorité au parti clérical, Léopold II dut accepter la démission du ministère libéral que présidait M. Erère-Orban, et appeler un des chefs du parti catholique, M. d’Anethan, à former un nouveau cabinet. Quelques mois après éclatait entre la Prusse et la France (19 juillet 1870) une guerre qui devait être désastreuse pour notre pays. Le roi Léopold et ses ministres se prononcèrent pour la plus stricte neutralité et obtinrent des deux belligérants que le territoire de la Belgique serait respecté. Pendant les années précédentes, Léopold II avait été cruellement frappé dans ses affections de famille. Son beau-frère, l’empereur Maximilien, avait été fusillé au Mexique (18 juin 1SC7) ; sa sœur, l’impératrice Charlotte, était devenue folle à la suite de cette catastrophe ; enfin, au commencement de L8r>9, son fils et son héritier au trône, te duc de Brabant, mourait k l’âge de dix ans, après" une douloureuse maladie.

LÉOPOLD’(Paul-Frédéric-Emile), prince régnant de Lippe, né à Detmold en 1821. Il reçut une bonne éducation, entra ensuite dans l’armée prussienne, où il servait avec je grade de major lorsqu’il succéda en 1851 à son père, le prince Alexandre-Léopold. Presque aussitôt après son avènement, il entra en collision avec l’Assemblée des états, à cause des modifications qu’il voulait apporter ù la loi électorale de 1849, et bientôt les lois et les institutions libérales que son père avait octroyées a la principauté se trouvèrent réduites k néant par les mesures des ministres Annibal Fischer et de Ohejmb. Sous ce dernier surtout, qui parvint en 1856 au pouvoir, la réaction reprit la haute main dans i’administrution ecclésiastique et dans l’enseignement public. Le prince se tint à l’écart de la diète des princes convoquée à Francfort en août 1863 par l’empereur d’Autriche. Lors du conflit austro-prussien de 1866, il’ demeura l’allié delà Prusse. Le contingentlippois prit dans le corps d’armée du général Vogel de Falckenstein une part active k la bataille de Kissingen, et en 1870 i ! figura également dans les armées qui envahirent la France en 1870. Le prince Léopold a épousé en 1852 la princesse Elisabeth de Schwarzbourg-Rudolstadt, de laquelle il n’a pas eu d’héritier.

LÉOPOLD H D’AUTRICHE, ex-grand-duc de Toscane, fils déFeruinand III et de Marie-Louise de Bourbon de Naples, né à Florence en 1797, mort à Rome en 1870. Quoique son enfance, jusqu’en 18U, se fût écoulée dans l’exil en Allemagne, il avait reçu une éducation tout italienne. Son père le tint constamment éloigné des affaires publiques et le maria en 1817 à une princesse de Saxe, dont il n’eut que deux filles. En 1824, Léopold devint grand-duc de Toscane. Les premiers événements de son règne furent : le dessèchement des maremmes, entreprise médiocrement conduite ; le voyage du graudduc k Vienne en 1830, où il alla se retremper aux leçons de Metternich ; le système d’espionnage et de vexation adopté par la police appelée Ouon governo ; la suppression de I’Ajj- thotogie (1833), suivie de l’expulsion de tous les Italiens distingués réfugiés en Toscane, et, la même année, le mariage en secondes noces de Léopold avec la sœur de Ferdinand II de Naples, Marie-Antoinette de Bourbon, qui fit sentir son influence en Toscane par. la protection accordée aux artistes en même temps que par une recrudescence de réaction cléricale. Les encouragements que Léopold accorda ensuite aux savants, ainsi que la douceur relative de son gouvernement, lui valurentune assezgrande popularité. En 1847, après les réformes de Pie IX, il se résigna, poussé par la force des choses, à accorder une nouvelle loi sur la presse, l’institution d’une garde civique, la suppression du buon governo et enfin, bien tardivement, l’octroi djune constitution (15 février 1848). Contraint d’envoyer des troupes en Lombardie et de

LEOR

nouer avec Charles-Albert une alliance peu sincère de sa part, le grand-duc présenta son second fils à la candidature du trône de Sicile ; mais le second fils dé Charles-Albert lui fut préféré.

Effrayé par les désordres de Livourne, qui menaçaient de s’étendre à toute la Toscane, Léopold, qui avait subi à contre-cœur le ministère Guerrazzi et l’Assemblée constituante, se mit à correspondre secrètement avec l’Autriche. Sur l’invitation qui lui en fut adressée par Radetzky, il s’enfuit de Sienne le 7 février 1849, et, refusant les offres généreuses que lui faisait le gouvernement de Turin, il alla rejoindre le pape à Gaëte. Trois mois plus tard, le parti modéré, triomphant à la suite d’une émeute, l’invita k rentrer à Florence, mais à la condition que les Autrichiens n’entreraient pas en Toscane. Le lendemain, la Toscane était occupée par les Autrichiens. Ce jour-là, la dynastie de. Lorraine prononça elle-même sa déchéance.

Léopold revint de Gaiite entièrement autrichien. Rentré dans sa capitale le 28 juillet 1849, il put se convainare de l’impossibilité d’une réconciliation entre les Toscans et lui..Cette scission ne devint que plus profonde à la suite des événements principaux de cette restauration, c’est-à-dire : l’occupation étrangère de sept années ; la constitution annihilée par les baïonnettes étrangères et supprimée par décret du 7 mai 1852 ; les procès de religion et le grand procès de lèsemajesté intenté à Guerrazzi età ses amis, qui subirent cinq ans de prison préventive ; le rétablissement de la peine de mort à partir de 1852, etc.

Au printemps de 1859, Léopold résista jusqu’au dernier moment aux demandes qui lui étaient faites, au nom de la Toscane, par Neri Corsini et qui se résumaient en ceci : constitution, alliance avec le Piémont, guerre à l’Autriche. Lorsqu’enfin le grand-duc consentit à accepter ce programme, il était trop tard. On lui demanda alors une abdication qu’il refusa. Une manifestation pacifique du peuple et de l’armée apprit au grand-duc le sentiment unanime de ses sujets. Le même jour, 27 uvrir1859, Léopold quitta la Toscane, escorté par une foule considérable qui lui cria : « Bon voyage I » sans lui adresser aucune injure. Retiré en Allemagne, -où il possédait de vastes et riches domaines, Léopold publia un acte d’abdication, daté de Voeslau (1859), en faveur de son fils aîné, Ferdinand, puis vécut paisiblement dans l’exil, sans chercher, comme les Bourbons-de Naples, a fomenter la guerre civile. Il était venu habiter Rome lorsqu’il mourut. Pie IX lui fit faire des funérailles royales. Outre deux filles, il avait eu de son second mariage quatre fils ; Ferdinand, né en 1835, qui depuis la mort do son père se fait appeler Ferdinand IV ; Charles, né en 1839 ; Louis, né en 1847, et Jean, né en 1852.

LÉOPOLD 1er, prince d’Anhalt-Dessau, feld-maréchal de Prusse. V. Anhalt.

LÉOPOLD (Frédéric-Fr.-Pierre), prince d’Anhalt-Dessau, petit-fils du précédent. V. Anhalt.

LÉOPOLD l«r, grand-duc de Bade. V. Bade.

LÉOPOLD, prince dk Brunswick. V. Brunswick.

LÉOPOLD, duc de Lorraine. V. Lorraine.

LÉOPOLD (Jean-Frédéric), médecin et naturaliste allemand, né k Lubeck en 1576,

mort en 1711. Reçu docteur en médecine, il parcourut une partie de l’Europe, et revint se fixer à Lubeck pour y exercer sa profession. Son mince bagage littéraire se compose de lielalio de itinere suecico (Londres, 1720 in-8")-

LÉOPOLD (Achille-Daniel), littérateur allemand, né en 1051, mort en 1722, sur lequel ou ne possède aucun renseignement. Il habitait Lubeck et y a publié, entre autres ouvrages : Noua titeraria septentrionis et maris Balihici Lubecencia (Lubeck, 1698).

LÉOPOLD (Achille-Daniel), littérateur et érudit allemand, né à Lubeck en 1691, mort en 1753, fils du précédent. Aveugle-né, il acquit, malgré son infirmité, les connaissances les plus variées et les plus étendues, apprit les langues, la philosophie, la jurisprudence, la théologie, l’histoire, la musique et s’adonna surtout aux belles-lettres et à la poésie. Sa mémoire, soigneusement cultivée dès sa naissance, était devenue prodigieuse. Nous citerons de lui : Collyre spirituel (Lubeck, 1734, iu-so), recueil de trois cents sonnets ; Poésies diverses (Hnmbourg, 1732, in-S°) ; Commentatio de excis ita naiis (Lubeck, 1726), etc.

LÉOPOLD (Jean-Dietrich), naturaliste et biographe allemand, né k Ulm en 1702, mort en 1736. Après avoir étudié la médecine k Strasbourg et à Tubingue, il retourna dans son pays natal pour y exercer sa profession. Il a publié : Delicix sylvestres florx Ulmensis (ulm, 1728, in-8<>) ; De quibusdam medicis Ulmensibus de republica microcosmica bette meritis (Ulm, 1731, in-4<>).

. LÉOPOLD (Georges-Auguste-Sides), littérateur allemand, né à Leitnbaeh en 1755, mort en 1827. Il devint pasteur protestant, assesseur du consistoire du comté de Hoh’nstein, inspecteur des ecclésiastiques du pays et s’attacha à populariser les procédés de

LEOR

culture perfectionnés. Léopold cultivait avec succès la poésie et la musique. Outre divers écrits sur l’agriculture, on a délui : Pensées sur l’histoire delà musique (1780) ; Joies et douleurs de MUller (1781, 3 vol.) : Mélanges (1781) ; l’Hiver (1788), poème didactique en cinq chants.

LÉOPOLD (Charles-Gustave de), poète suédois, né en 1756, mort en 1829. Il se fit recevoir docteur en philosophie et fut attaché en 1782 à la bibliothèque de Stralsund, puis en 1784 à celle de Liden à Upsal. Le roi Gustave III ayant exprimé le désir de voir transformer en opéra son drame de Helmfeld, Léopold s’acquitta de ce travail à la grande satisfaction de ce prince, avec lequel il vécut dès lors dans une grande intimité. Nommé successivement membre de l’Académie suédoise, bibliothécaire de Drottningholm (1787), secrétaire du roi (1789) et représentant de ce prince en Finlande (1790), il se vit, après l’assassinat de Gustave, traduit devant la cour criminelle, comme coupable de jacobinisme, et jugea prudent, bien qu’il eût été acquitté, de se retirer à Linkœping, où il vécut dans la retraite jusqu’au jour où le jeune roi Gustave IV Adolphe le rappela et le nomma conseiller de chancellerie. Après la révolution de 1809, il fut anobli, devint en 1818 secrétaire d’État et perdit, complètement la vue en 1822. Léopold s’essaya dans tous les genres de poésie, sauf dans l’épopée, et fut le chef de l’école suédoise qui s’attachait à imiter la littérature française. Ses tragédies d’Odin (1790) et de Virginie sont encore placées au nombre des chefs-d’œuvre de la littérature suédoise. Il avait lui-même donné une édition de ses Œuvres (Stockholm, 1814, 3 vol.), qui fut complétée après sa mort (Stockholm, 1831-1833, 3 vol.)

LÉOPOLDINIE s. f. (lé-o-pol-di-nl — de Léopold, nom d’homme). Bot. Genre d’arbres, de la famille des palmiers, tribu des arécinées, croissant sur les bords du fleuve des

Amazones.

LEOPOLDONE s. m. (lé-o-pol-do-né). Numistn. Ancienne monnaie d’argent du grandduché deToscane. nommée aussi francescone suivant le règne sous lequel elle était fabriquée,

— Encycl. Le leopoldone ou francescone était l’écu ou pièce de 10 pauls, fabriqué à la taille de 12 pièces 1/3 à la livre, au titre de il onces (917 millièmes). Ces pièces avaient pour type l’effigie du prince, et au revers i’écu aux armes couronné et entouré du col. lier de l’ordre de la Toison d’or. Sur plusieurs, cet écu est soutenu par deux aigles ou porté en cœur par l’aigle impériale couronnée. On lit autour des teopoldones les plus récents la légende : lex tua véritas (ta loi est la vérité), et sur ceux de fabrication antérieure, cette autre : DIRIGE, DOMINE, GRESSUS meos (Seigneur, dirigez mes pas), ou celle-ci, plus ancienne : in te, domine, speravi (Sei-gneur, j’ai mis en vous mou espérance).

Ces pièces, qui avaient des coupures décimales : i, 2, 5 et 10 pauls, ont disparu de la circulation lors de l’érection du grand-duché de Toscane en royaume d’Etrurie. Elles sont rares aujourd’hui et leur valeur réelle, qui est de 5 fr. 50 environ, est de beaucoup dépassée dans le commerce.

LEOPOLDSTADT, ville forte de l’empire d’Autriche, dans la Hongrie, comitat et à 24 kilom. O. de Neutra, dans une plaine marécageuse, sur la rive droite de la Waag ; 2,308 hab. Arsenal ; hôtel des invalides. Commerce de cuirs et de laine.

LÉORIËR - DEL1SLE (Pierre - Alexandre), manufacturier français, né à’ Valence (Dauphiné) en 1744, mort k Montargis en 182G. Il avait d’abord embrassé la carrière militaire, et il était officier de dragons lorsqu’il fut obligé de donner sa démission k la suite d’un démêlé avec l’un de ses supérieurs. Jeté sans fortune sur le pavé, il fut heureux d’accepter la direction de la papeterie de Langlee, près de Montargis, et, trouvant cet établissement à peu près ruiné, il chercha des procédés économiques de fabrication pour relever cette manufacture. Ses essais s effectuèrent sur les plantes et les écorces des végétaux communs. Le Supplément aux Loisirs des bords du Loing (1784, in-18) contient une tentative de fabrication du papier avec de l’herbe, de la soie et des chiffons. Puis il annonça ses découvertes dans ï’Épître dédicaloire des Œuvres du. marquis de Villette (Londres, 1786, in-io). Ce livre, aujourd hui très-rare, offre cette curieuse particularité que les cent cinquante-six premières pages sont imprimées sur papier d’écorce de tilleul, et que les vingt et un feuillets suivants sont fabriqués avec les végétaux ci-après : guimauve, orties, houblon, mousse, roseaux, conferves, écorce d’osier, de saule, de peuplier, d’orme, de chêne, de racine, chiendent, bois de fusain, coudrier, bardane, pas-d’àne, chardons, etc. À la suite de discussions d’intérêts, Léorier-Delisle quitta la papeterie de Langlee et fonda la manufacture de Buges. Plus tard il acquit la papeterie de Langlee, fabriqua le papier des assignats et obtint la fourniture de l’Administration du timbre. L’établissement ne prospéra point ; ruiné par la crise commerciale de 1806, Léorier fut exproprié, et vint mourir misérable à Montargis.

LEOT

379

LEORIS a. m. (lé-o-riss). Mamm. Syn. da

LORIS.

LÉOS, héros éponyme d’Athènes qui, pour délivrer sa patrie d’un fléau qui la dévastait, consentit à sacrifier ses trois filles. On éleva à Athènes, en l’honneur de l.éos et des trois victimes, un temple qui reçut le nom de Leocorium et de Leonaticum.

LÉOST11ÈNE, général athénien et disciple de Démosthène, mort en 323 avant J.-C. Après la mort d’Alexandre, il fut mis a. la tête des troupes destinées à affranchir la Grèce de la tyrannie macédonienne (323 av. J.-C). Il eut d’abord quelques succès contre Antipater ; mais il fut tué d’un coup da pierre en assiégeant la ville de Lamia, en Thessalie. V. Lamiaquk (guerre), et Aktipater.

L1ÎOTADE (Louis BoNAFOua, en religion frère), né k Montclar (Aveyron) en 1812, mort en 1850. Frère des Ecoles chrétiennes, il remplissait les fonctions d’économe au pensionnat Saint-Joseph, à Toulouse, quand, au mois d’avril 1847, il fut accusé du crime d’attentat à la pudeur et d’homicide volontaire sur la personne d’une jeune ouvrière, nommée Cécile Combettes. Condamné pour ce fait, le 4 avril de l’année suivante, à la peina des travaux forcés k perpétuité, il mourut au bagne de Toulon le 26 janvier 1850.

Nous allons faire un récit impartial et exact des faits, tel qu’il résulte de l’examen des piècesdu procès. Le 16 avril 1847, vers six heures et demie du matin, on découvrit un cadavre de jeune fille dans une partie reculée du cimetière Saint-Aubin, à Toulouse. Ce cadavre reposait sur les genoux, sur l’extrémité des pieds et sur les coudes, la face contre terre, les vêtements dans un ordre parfait comme s’ils avaient été arrangés à dessein. II se trouvait à 21 centimètres du pied d’un mur en terre qui sépare le cimetière du jardin des frères des Ecoles chrétiennes, la hauteur de ce mur étant d’un peu moins de 3 mètres. On reconnut que ce corps était celui de Cécile Combettes, apprentie brocheuse chez un relieur nommé Conte. Les hommes dé l’art constatèrent que cette jeune ouvrière, qui était ûgée de moins de quinze ans, avait été victime d’un attentat à la pudeur.’ et que sa mort était due k des coups nombreux appliqués sur sa tête, pendant la vie, en sorte que le meurtre n’avait été commis que pour assurer l’impunité du premier crime, pour étouffer la voix d’un témoin accusateur. Toutefois, le viol n’avait pas été consommé : malgré d’énergiques efforts, le coupable n avait pu que déchirer les organes de Cécile, qui étaient dans un état affreux.

Les premières investigations de la justice relevèrent les faits suivants : la veille, 15 avril, Conte, oui travaillait pour les frères, avait dû leur livrer une certaine quantité de livres reliés. Vers neuf heures dans la matinée, il fit placer la plus grande partie de ces livres dans une grande corbeille ; le reste fut empilé dans une petite ; puis il partit, accompagtié d’une ouvrière âgée, appelée Marie Roumagnac, quitportait la grande corbeille, et de Cécile Combettes, qui portait la petite. Arrivé k la maison des frères, Conte déposa les deux corbeilles dans le vestibule, puis, sur l’ordre de son maître, Marie Roumagnau revint k l’atelier. Quant a. Cécile, Conte lui donna son parapluie à garder, et lui recommanda de l’attendre dans ce vestibule, pour remporter les corbeilles vides. Alors Conte, aidé du portier, monta les livres dans la chambre du directeur, où il rest» assez longtemps. Quand il descendit, il était plus de dix heures et quart ; il ne trouva pas Cécile ; son parapluie était resté contre le mur. Interrogé sur la disparition de la jeune ouvrière, lo portier dit qu’elle était peut-être sortie pendant qu’il parlait à quelqu’un, k moins qu’elle ne fût allée au pensionnat. Conte, lui, exprima l’opinion qu’elle s’était ennuyée de l’attendre, et partit. Cécile ne reparut plus. Coule, tout entier aux préparatifs d’un voyage qu’il devait faire il Auch, ne s’occupa guère d’une disparition si singulière. Seulement vers une heure, sa femme, accompagnée d’une tanto de la jeune fille, alla demander celle-ci k l’établissement des frères ; le portier ne put affirmer qu’elle fût réellement sortie, et comme les femmes ne peuvent circuler dans la maison que dans des cas très-rares et moyennant une permission spéciale, on ne put pas pousser plus loin les recherches. Les perquisitions faites pendant le reste de la journée et de la nuit ne fournirent aucun éclaircissement, et le lendemain seulement on découvrit la cadavre a l’endroit que nous avons désigné. Qui avait pu commettre ce double crime ? Les premiers soupçons des magistrats se portèrent sur les frères ; la position du cadavre près de leur mur semblait les accuser plus que d’autres ; de plus, les désordres effroyables remarqués dans les organes de la victime faisaient présumer que la tentative de viol et l’assassinat qui l’avait suivie ne pouvaient être attribués qu’à la brutalité de la continence condensée d’un religieux : un débauché ordinaire, un laïque libertin s’y serait pris autrement, du moins en ce qui concernait l’attentat à la pudeur. Cette prévention défavorable domina tout lo procès et dirigea l’instruction. Les frères l’aggravèrent singulièrement en refusant d’abord aux magistrats la possibilité de se livrer pleinement aux in-