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puissante de la collectivité à celle de l’individualisme. Elle est aussi, dans certaines limites, une société de secours mutuels.

Louis Desnoyers, qui avait eu l’idée de cette société vers la fin de 1837, groupa aussitôt un grand nombre d’adhérents, parmi les plus illustres des littérateurs contemporains ; V. Hugo, Villemain, Lamennais, Fr. Soulié, Pr. Arago, A. Dumas, A. Thierry, L. Gozlan formèrent le premier comité chargé d’organiser la société naissante ; H. de Balzac, G. Sand, H. Martin, lî. de Beauvoir rirent partie du second, et déjà à cette date (17 mars 1830), tout ce qui avait un nom dans les lettres avait fait acte d’adhésion ; la société était fondée et dotée de ressources suffisantes.

Pour en comprendre l’utilité, il suffit de se rendre compte de la situation précaire du littérateur qui, une fois son travail livré à un journal, à une revue, n’est plus le maître de le suivre dans les reproductions incessantes qui en sont faites à Paris même, en province et à l’étranger. Il ne recueillait aucun fruit de cette reproduction, que d’autres jugeaient bonne et fructueuse pourtant, puisqu’ils s’emparaient de son article ou de son roman. Il se trouvait, en face de ceux qui vivaient de son propre talent, dans la même position que l’auteur dramatique en face des directeurs de théâtre qui, une fois la pièce imprimée, la faisaient jouer aux mêmes conditions que s’ils l’eussent écrite eux-mêmes. Abus regrettable, pour ne pas dire odieux, et contre lequel l’homme de lettres isolé était impuissant ; il lui aurait fallu dépenser en procès une somme plus que décupla de celle qu’il aurait dû percevoir.

L’association, en se substituant à l’homme de lettres isolé, en forçant les journaux à payer, sous forme d’abonnement, le droit de reproduire les travaux de ses membres, en faisant lire, par des préposés, tout ce qui s’imprime en France et à l’étranger afin do saisir les reproductions faites en dehors d’un contrat passé avec elle, en centralisant le produit des sommes perçues, rond aujourd’hui de très-grands services. Elle a fini par avoir raison de toutes les résistances ; les droits de reproduction sont perçus facilement et sou action est à peine entravés par quelque mauvais vouloir individuel, aussitôt annihilé. La Société, pour rendre son jeu plus pratique, a fait résoudre par les tribunaux ou par les congrès littéraires, les questions litigieuses les plus usuelles ; elle a mis ainsi de son côté

■ le droit et la force. Son autorité même est telle que, depuis 18C5, le comité est constitué en chambre syndicale chargée d’instruire les affaires litigieuses que peuvent lui renvoyer les tribunaux, à titre d’arbitre.

Quelques chiffres feront connaîtra l’importance de la Société à un point de vue qui n’est pas le plus élevé, mais qui est le plus sensible. De l’époque de sa fondation jusqu’en 1SG8, elle a encaissé un million deux cent quarante-trois mille francs payés par les journaux, pour droit de reproduction, et répartis presque intégralement aux auteurs des travaux reproduits ; car la Société se contente, pour ses frais de bureau et de correspondance, d’un prélèvement insignifiant. Pour la seule année 1872, elle a perçu et réparti cent soixante-quinze mille francs en chiffres ronds, c’est-à-dire l’intérêt d’un capital de 3 millions et demi. Ces chiffres sont éloquents ; do telles sommes, arrachées à la piraterie littéraire et rendues aux véritables ayants droit, témoignent de l’utilité de l’institution. À l’aide des cotisations et des dons et legs, la Société s’est, en outre, constitué un fontis de réserve considérable. Plie prélove chaque année sur ce fonds les sommes nécessaires pour venir en aide temporairement à quelques-uns de ses membres ou leur servir des pensions viagères, suivant les cas.

D’après le dernier règlement (1870), la Société des gens de lettres est administrée par un comité composé de vingt-quatre membres titulaires élus ; le président, pris dans son sein, change tous les trois mois ; un délégué, également élu, est chargé des affaires administratives.

Les membres de la Société sont de deux

■ sortes, les membres titulaires ou sociétaires, et les membres adhérents. Pour être sociétaire, il faut déposer au moins deux volumes d’œuvres imprimées et se faire présenter par deux membres titulaires. L’admission est prononcée par le comité, après rapport fait par un de ses membres. La cotisation annuelle est de 12 francs ; le postulant dépose, en outre, 40 francs lors de son entrée, pour apport social. L’admission des adhérents est prononcée de la même façon ; ils sont dispensés du dépôt d’œuvres, de la cotisation et d’apport social ; aussi ne jouissent-ils pas des bénéfices de l’association en tant que société de secours mutuels ; ils en bénéficient seulement au point de vue de la reproduction littéraire et de la protection accordée à tous les membres indistinctement par la Société,

— La Société des gens de lettres a eu successivement pour présidents : Villemain, Victor Hugo, Viennet, Louis Desnoyers, Francis Wey, X-B. Saintine, Léon Gozlan, Michel Masson, Édouard Thierry, Emm. Gouzulès, Paul Féval, Jules Simon, Frédéric Thomas. Eu septembre 1870, la présidence fut offerte à VictorHugo, qui la déclina. Depuis cette époque, il n’est plus élu de président de la Société ; il n’y a plus qu’un président du

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comité, soumis tous les trois mois à l’élection.

Le délégué de la Société est, depuis longtemps, M. Emmanuel Gonzalès.

Quelques desiderata restent encore à satisfaire. On a demandé que la Société ne fût pas seulement chargée de recouvrer des créances et de juger des différends ; quelle défendît chacun de ses membres contre les empiétements des éditeurs, des libraires, des imprimeurs ; qu’elle limitât le pouvoir de la censure et de la commission do’colportage ; qu’elle instituât des prix, des concours publics, des lectures où pussent se faire connaître les débutants ; qu’elle éditât même à certaines conditions les œuvres de ses membres, etc. La Société a fait ce qu’elle a pu, dans une mesure timide, il est vrai, mais il faut convenir qu’elle n’est guère armée contre la censure et la commission de colportage, qu’elle ne peut guère que protester et que, pour les autres innovations réclamées, elle devait être soucieuse de l’intérêt commun et ne pas compromettre le fonds social. Elle a organisé (1872) une librairie qui est appelée à rendre quelques services, quoiqu’elle n’opère qu’avec une prudence peut-être exagérée. C est à améliorer la situation des gens de lettres vis-à-vis des éditeurs ; en se substituant elle-même à ceux-ci autant que possible, que doivent tendre maintenant ses efforts.

Outre une Chronique mensuelle, qui est envoyée gratuitement à tous les sociétaires et dans laquelle sont relatés les demandes elles procès-verbaux d’admission, le sommaire des séances du comité, la liste des ouvrages nouveaux, le mouvement des revues et journaux,les traités conclus avec eux, les décisions judiciaires qui intéressent les’gens de lettres, etc., la Société publie un Bulletin où elle insère des articles de critique et surtout des Nouvelles, dus pour la plupart à des débutants et signalés ainsi à l’attention des journaux de province. Elle a entrepris accidentellement d’autres publications collectives. Le Trésor littéraire (18C5), qu’elle a eu le tort de placer sous le patronage officiel, a soulevé, dans le sein même de la Société et dans le public, de vives discussions, sur lesquelles il est inutile de revenir. Un don de 10,000 francs, sollicité un peu légèrement du ministre de l’instruction publique par le président, Paul Féval, a do même occasionné des débats irritants et fut définitivement refusé par le comité. Ces deux faits ont montré l’esprit d’indépei.idance de la Société et combien il est prudent à ceux qui la dirigent de ne pas l’engager dans la voie de la tutelle administrative. La Société des gens de lettres a encore édité l’Obole des conteurs (180-1, in-18), qui fut vendu au profit des ouvriers cotonniers, dans la grande crise provoquée par la guerre de sécession américaine ; l’Offrande (1873, in-S»), vendu au profit des Alsaciens-Lorrains. Elle a, en outre, organisé à diverses reprises des conférences publiques. Pendant le siège de Paris elle a, au moyen de deux auditions des Châtiments au théâtre de la Porte-Saint-Marlin, offert à la Défense nationale

deux canons montés sur leurs affûts, le Châtiment et Châteaudun.

LETTRÉ, ÉE adj. (lè-tré — rad. lettre). Qui a du savoir, qui est instruit dans les belles-lettres : Un homme lettré. Une femme luttréh. Toute fille lettkée restera fille toute sa vie, quand il n’y aura que des hommes sensés sur la terre. (J.-J. Rouss.) Chacun sait aujourd’hui quand il fait de la prose ; Le siècle est, à vrai dire, un mandarin lettre.

A. hé Musset.

 !~ Zoo !. Qui est marqué do points, do traits, imitant les caractères alphabétiques : Atte

LETTRÉE.

— Subst. Personne lettrée : Le lettré vit plus longtemps que le manœuvre. (E. Pelletan.)

— Nom donné en Chine h des hommes d’une classe particulière, qui cultivent les lettres et exercent les fonctions publiques : On connaît un lettré à la façon aisée dont il fait une révérence. (Montesq.)

LETTRER v. a. ou tr. (lè-tré — rad, lettre). Instruire dans les lettres : Lkttrer le peuple, c’est le civiliser. (V. Hugo.) Il lnus.

LETTRILLE s. f. (lè-tri-lle ; Il mil.). V.

LÉTRILLB.

LETTRINE s. f. (lè-tri-ne — dimin. de lettre). Typogr. Petite lettre qu’on met au-dessus ou a côté d’un mot, pour renvoyer le lecteur a quelque note explicative placée en marge ou au bas de la page. Il Nom donné aussi aux lettres majuscules imprimées au haut des pages ou des colonnes d’un dictionnaire, pour indiquer les initiales des mots que renferme la page ou la colonne.

— Encycl. Typogr. On se servait autrefois, pour les renvois aux notes, de lettres italiques que l’on plaçait, soit entre parenthèses, soit en supérieures ; c’est à ces lettres italiques que l’on a donné le nom de lettrines. On a eu recours ensuite, pour le même usage, aux astérisques placées entre parenthèses et en nombre égal à celui des renvois pour la même page. Aujourd’hui, on a généralement adopté les chiffres, soit supérieurs, soit du corps ; dans ce dernier cas, on met le chiffre entre parenthèses. Ce mode est de beaucoup le plus commode, et l’on

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n’emploie plus gHÔre les deux autres que dans des cas tout à fait rares et particuliers.

LETTRIQUE adj. (lè-tri-ke — rad. lettre). Qui a rapport aux lettres de l’alphabet : Ne devait-on pas s’attendre à trouver dans le Dictionnaire de l’Académie quelques développements instructifs sur la science lettrique, au moins quelques judicieuses réflexions sur l’origine de nos lettres, sur leur forme, etc. ? (Ragon.) Il a fallu toute l’ignorance lettrique de nos latiniers pour arriver à nasaler un y. (Ragon.)

LETTRISÉ, ÉE adj. (lè-tri-zé — rad. lettre). Se dit d’une espèce de vers dont tous les mots commencent par la même lettre, comme ceux du poemo de Léo Placentius, qui débute par le vers suivant :

Plaudiu, jiorcelli, porcorum piqra propago.

LETTSOM (John C’oakley), médecin anglais, né dans une île des Antilles en 1744, mort à Londres en 1815. Envo3’é tout jeune en Angleterre, il y étudia la médecine et la « pharmacie, retourna à la mort de son père aux Antilles, où il donna la liberté à tous ses esclaves, puis revint en Europe, visita la France, la Hollande, prit le grade de docteur à Leyde et se fixa à Londres, où il devint en 1771 membre de la Société royale. On lui doit plusieurs ouvrages estimés, dont les principaux sont : Histoire naturelle de l’arbre à thé (Londres, 1772) ; le Compagnon du naturaliste et du voyageur (Londres, 1772) ; Mémoires sur le dispensaire général de Londres (Londres, 1774), ouvrage traduit en français ainsi que les deux précédents ; Histoire de l’origine de la médecine. (Londres, 1778) ; Essai sur les malheurs du pauvre (Londres, 1794) ; Essai pour répandre la tempérance, la bienfaisance et la science médicale (Londres, 1797) ; Observations sur la persécution religieuse (Londres, 1800). Lettsom était quaker

■ et employait en œuvres de bienfaisance la plus grande partie de ce qu’il possédait.

LETTSOMIE s. f. (lèt-so-mî —de Lettsom, méd. angl.). Bot. Genre de plantes, de la famille des théacées, tribu des ternstreemiées, comprenant plusieurs espèces qui croissent au Pérou, il Syn. d’ARGYRÉE, autre genre de végétaux.

LEU s. m. Ceu). Forme ancienne du mot loup, usité idans la locution : À la queue leu leu, À la file, à la suite les uns des autres, comme on dit que marchent les loups : Marcher à la queue leu leu.

La queue leu leu, Jeu d’enfants, qui consiste à marcher à la file comme les loups : Jouer à la queue leu leu.

LEU (SAINT-) s. m. (sain-leu). Pierre à bâtir, extraite des carrières de Saint-Leu, dans le département de Seine-et-Marne.

LEl) (saint), appelé aussi saint Loup, archevêque de Sens en 009, mort on 623. Il ap ■ partenait a une famille alliée à la maison royale. Il était très-charitable et donnait tout aux pauvres. Un jour qu’il avait tout donné, dit la légende, il arriva qu’il convia plusieurs personnes à dîner, et quand ses serviteurs lui dirent qu’ils n’avaient que la moitié du vin qu’il lui fallait, il répondit : « Je crois que celui qui nourrit les petits oiseaux viendra au secours de notre charité. » Et aussitôt il vint un messager qui dit que cent inuids de vin étaient descendus devant la porte. Lorsque Clotaire, roi de France, entra en Bourgogne, il envoya son sénéchal contre les habitants do Sens pour les assiéger, et alors saint Leu entra en l’église de Saint-Étienne et sonna de la cloche. Quand les ennemis l’entendirent, ils furent saisis de frayeur et s’enfuirent tous. La Bourgogne n’en tomba pas moins au pouvoir des Francs, et Leu fut exilé ; mais une sédition du peuple de Sens força Clotaire à le rappeler. L’Église l’honore le l«r septembre.

Lcu-et-Snint-Gille» (ÉGLISE Sninl-). En

1235, les habitants des rues qui avoisinaientl’abbaye de SaiiH-Magloire obtinrent l’autorisation de construire, rue Saint-Denis, sur le territoire de Suint-Magloire, une chapelle dédiée à saint Gilles et à saint Loup, le grand évoque de Sens. Reconstruite en 1319, cette chapelle fut agrandie à diverses reprises et érigée en paroisse en 1G17. Vers 1727, la façade principale de l’église, sur la rue Saint-Denis, fut complètement défigurée ; il n’y reste plus, d’à peu prés intact, que l’ogive de la porte médiane et les huit colonnes à chapiteaux feuillages qui l’accompagnent. Les deux portes latérales sont contemporaines des bas-côtés et datent, par conséquent, du xvic, siècle. Les deux petites tours carrées et terminées par des flèches d’ardoise sont modernes. L’ubside est décorée de pilastres doriques, de balustrades, de contre-forts avec arcs-boutants, de gargouilles en forme de consoles. L’église, qui était entièrement entourée de maisons, à. l’exception du grand portail et de l’abside, a été dégagée vers 1860, lors du percement du boulevard de Sébastopol.

La nef est recouverte d’une voûte ogivale à nervures croisées. Le chœur et l’abside sont beaucoup plus élevés que la nef. Les baies et les arcs de cette partie de l’église sont eu plein cintre ; mais les cinq travées du rondpoint sont en ogive. On a supprimé le pre LEU

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mier des trois rangs de fenêtres à meneaux qui versaient la lumière dans l’intérieur de 1 édifice. En 1780, l’architecte de Wailly exécuta divers travaux dans le chœur de l’église Saint-Leu-et-Saint-Gilles ; il rehaussa le soi du sanctuaire et le m : iître-autel, et pratiqua au-dessous une chapelle souterraine où 1 on descend par deux escaliers demi-cnculaites, dont l’entrée se trouve dans les bas-côtés.

Cette église était riche en tableaux et en reliques. On y voit encore, dans la première chapelle méridionale, un tableau daté de 1772, représentant le crime, !a condamnation et le supplice d’un soldat qui fut brûlé vif en 1415, pour ayoir frappé de son couteau une image de la Vierge placée au coin de la rue aux Ours, près de l’église Saint-Leu. L’image aurait, suivant la tradition, versé du sang en abondance.. Pour conserver la mémoire de ce prétendu miracle, on célébrait encore une fête annuelle dans les derniers temps qui ont précédé la Révolution. L’église Saint-Leu possède aussi un Saint François de Sales après sa mort, peint par Philippe de Champagne, et une Sainte Geneviève en pierre. L’église Saint-Leu-et-Saint-Gilles est aujourd’hui une des succursales de la paroisse de Saint-Nii.’olas-dcS-Champs.

LEU-D’ESSERENT (SAINT-), bourg et commune de France (Oise), cant. de Creil, arrond. et à 13 kilom. N.-O. de Senlis, sur la rive gauche de l’Oise ; 1,578 hab. Importantes carrières de pierre de taille ; fabrication dû colle forte et de dentelles ; féculeries ; fabrication de crics. Le coteau au pied et sur les pentes duquel est bâti Saint-Leu-d’Esserenl est percé de carrières de pierre dont l’exploitation occupe une partie des habitants. On en extrait une belle pierre connue sous le nom de pierre de Saint-Leu. Quelques-unes de ces carrières ont plusieurs kilomètres de profondeur. Mais la principale curiosité de Saint-Leu est son église, dont un écrivain anonyme a fuit ainsi la description : « (J’est un fort bel édifice sans transsept, d’une forme allongée et terminé en hémicycle à l’E. Lo portail consiste on une grande ogive romane, ornée de trois rangs de zigzags reposant sur de courtes colonnes romanes à chapiteaux rustiques. Derrière ce portail est un porche s’étendant sur toute la largeur de l’église et de 6 mètres de profondeur. Audessus du porche est une vaste salle voûtée avec des arceaux à doubles zigzags, reposant sur des piliers à chapiteaux ornés de figures fantastiques. Le clocher, situé à droite du portail, présente deux étages do légères arcades romanes surmontées d’une flèche octogone à écailles de poisson. Chaque angle est garni d’un élégant clocheton. Les bas-côtés qui tournent autour du chœur et du sanctuaire sont séparés de la nef par de larges arcades à ogives surbaissées, portant sur vingt-quatre gros piliers romans à chapiteaux variés et ornés de feuillages. De minces colonnes gothiques, adossées contre une partie de ces piliers, s’élancent jusqu’à lanaissanco des voûtes. Une galerie circulaire règne au-dessus des arcades. Quarante-deux larges et hautes fenêtres à ogive de la transition éclairent l’intérieur et s élèvent jusqu’à la naissance de la voûte. Une tour romuuo sans flèche s’élève sur chaque bas-côté parallèlement au sanctuaire. Extérieurement, l’église est entourée d’arcs-boutants et de contre-forts au S. et au N. » Autour de ce bel édifice, qui s’élève sur une terrasse plantée d’arbres, se —voient les restes d’un prieuré fondé vers la lin du xic siècle par Hugues, comte de Daminartin, seigneur d’Esserent.

Les successeurs de Hugues, les comtes de Dammartin, ainsi que les comtes do Clermont, accordèrent de nombreux privilèges au prieuré d’Esserent. La foire de (Jreil fut, « vers la même époque, transportée à Saint-Leu, sous la juridiction du prieuré. Les habitants du territoire en dépendant furent exempts du service de guerre, sauf dans lo cas de défense à l’intérieur contre les invasions. Le prieuré avait acquis une immense prospérité quand, en 1359, les Anglais et les Navarrais ne la garnison de Creil y portèrent le pillage et la dévastation. Les moines s’enfuirent, puis parvinrent à rentrer en possession paisible de leur monastère en payant une grosse rançon. Leur nombre légal ne dépassait pas vingt-cinq ; mais ce chiffre se réduisit peu à peu, soit par le relâchement de la discipline, soit par toute autre cause ; car en 1790, lors de la suppression des établissements religieux, le prieuré d’Essèrent comptait à peiné huit à dix desservants.

En 18-46, l’urohiteete Verdier, chargé par l’État de la restauration de la cathédrale de Beauvais, exposa une intéressante Suite de dessins dans lesquels il expliquait avec détail un projet de restauration analogue pour le prieuré d’Esserent, et principalement pour son église, que nous avons décrite ci-dessus. Le ministère lit l’acquisition de ces dessins : mais la révolution de Février, qui survint, â empêché de donner suite au projet, qui est encore à réaliser aujourd’hui.- L’edilice, classé parmi les monuments historiques, est heureusement à l’abri de tout acte de vandalisme et peut attendre ; mais nous n’en hâtons pas moins de tous nos vœux l’heure d’une restauration intelligente qui achèvera de mettre en lumière un des plus curieux monuments de l’archéologie beauvaisine. On peut consulter avec in térét sur l’ancien prieure d’Esserent- : Archéologie