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et prit le nom de palais des Arts, après la construction du palais du Commerce.

Au deuxième étage de ce palais du Commerce se trouve le musée des arts et de l’industrie, créé en 1858. Il sa compose de trois sections principales. La première est affectée aux arts et comprend des tableaux de différentes époques, des modèles d’architecture et tout ce qui peut permettre de suivre à travers les âges le développement du sentiment artistique. La deuxième est consacrée à l’industrie. Les soies y tiennent une place naturellement considérable. À côté des soies, des cotons, des fils, etc., de toute nature se trouvent des réductions d’appareils destinés à faire connaître du même coup la matière employée et l’outil. Enfin, une troisième section est consacrée à l’historique de la fabrication des soies et de l’industrie lyonnaise en général. Un cabinet de dessin, une bibliothèque et une salle d’étude sont annexés à ce musée.

Nous mentionnerons encore parmi les monuments : le palais de l’Archevêché, édifice du XVe siècle, dont on vante la chapelle ; l’hôtel de la division militaire ; l’hôtel des Monnaies ; la manufacture des tabacs ; la manutention militaire ; la manutention civile ; l’abattoir ; l’arsenal d’artillerie ; l’entrepôt des douanes ; le grenier à sel ; le mont-de-piété ; le marché couvert ; les casernes de Serin, des Collinettes et de la Part-Dieu ; le Grand-Théâtre, construit de 1827 à 1830 ; le cercle Musical ; le Casino ; le Jardin d’hiver ; le Colisée ; les gares, etc.

Enfin, Lyon compte de nombreux établissements de bienfaisance, parmi lesquels nous citerons : l’Hôtel-Dieu, construit par Soufflot, et dont le jardin renferme le tombeau de Narcissa, fille de Young ; l’hospice de la Charité, qui reçoit les vieillards des deux sexes, infirmes et indigents, les orphelins, les enfants abandonnés et les enfants malades au-dessous de seize ans ; l’hospice de l’Antiquaille, où sont admis les aliénés des deux sexes, les individus des deux sexes atteints de maladies psoriques ou secrètes, et les vieillards des deux sexes à titre de pensionnaires ; l’hôpital militaire ; l’hôpital de la Croix-Rousse ; le dépôt de mendicité ; l’asile des vieillards des deux sexes ; l’hospice des frères de Saint-Jean-de-Dieu ; la Société de charité maternelle ; des crèches ; de nombreuses sociétés de secours mutuels, etc.

Industrie, commerce. La fabrication des soieries, qui occupe le premier rang dans l’industrie lyonnaise, a su conquérir dans le monde entier une réputation justement méritée. Des Italiens, exilés par les luttes sanglantes des guelfes et des gibelins, importèrent à Lyon, au commencement du XVe siècle, le tissage des étoffes de soie. Ils trouvèrent chez les ouvriers lyonnais un esprit inventif, une activité prodigieuse et un grand amour du travail ; aussi l’industrie nouvelle grandit-elle avec rapidité. Henri II la réglementa par des statuts en 1552 ; Henri IV, voulant favoriser la production de la soie en France, fit planter partout une immense quantité de mûriers. Avant l’introduction du tissage des étoffes de soie à Lyon, Avignon et Tours possédaient déjà cette industrie ; mais Lyon l’emporta bientôt par la perfection de la main-d’œuvre, la beauté du dessin, la richesse des étoffes. Chaque année vit naître une combinaison d’où résultait un tissu nouveau destiné à durer autant que la mode, à disparaître avec elle pour faire place à un autre ; et, de nos jours, c’est encore ce qui caractérise la fabrique lyonnaise et fait une grande partie de sa supériorité. « L’industrie des soieries, dit M. Arlès-Dufour, occupa à Lyon, depuis 1650 jusqu’à 1680, de 9,000 à 12,000 métiers ; après la révocation de l’édit de Nantes jusque vers 1760, ce nombre était réduit à 3,000 ou 4,000 environ. De 1760 à 1789, il se releva à 18,000, pour retomber à 3,000 ou 4,000 en 1794. De 1804 à 1812, il remontait à 12,000, et en 1816 à 20,000 ; en 1827, il atteignit 27,000 ; en 1837 il était de 40,000, et à l’époque de la révolution de Février, 50,000 métiers fonctionnaient à Lyon. » De nos jours, le nombre de métiers fonctionnant dans le département du Rhône et les départements voisins est évalué à 120,000. Ces métiers produisent une valeur de plus de 460 millions et occupent près de 140,000 ouvriers, dont une moitié est concentrée dans la ville même. « La fabrique lyonnaise, dit M. Kauffmann, n’a pas, comme l’industrie des toiles de coton, de grandes manufactures où travaillent en commun une quantité considérable d’ouvriers des deux sexes, les femmes séparées de leurs maris, les jeunes filles loin de la surveillance de leurs parents ; le tissage, au contraire, se fait en famille ; les ateliers se composent de 2 à 6 métiers, rarement d’un plus grand nombre, qui sont occupés par les membres de la famille et par les compagnons. La femme tient le ménage, fait les cannettes et donne au tissage le reste de son temps. Les enfants vivent sous les yeux de leurs parents et sont envoyés à l’école, double gage de moralité. Les instruments de travail, c’est-à-dire les métiers, les mécaniques à la Jacquard, les lisses, les plombs, les maillons, les navettes, appartiennent au chef d’atelier. Le prix des façons est payé au mètre courant : il varie naturellement suivant les genres d’étoffes, suivant leur largeur, etc. Ce prix, débattu entre le fabricant et le chef d’atelier, est généralement uniforme pour chaque genre d’ouvrage. La possession en propre des instruments de travail fait à l’ouvrier lyonnais une position bien préférable à celle des autres ouvriers des manufactures, lui assure une sorte de liberté, lui inspire l’ordre, le soin de ses ustensiles. » Si cette organisation du travail au moyen d’ateliers contenant rarement plus de 4 à 5 métiers a de grands avantages au point de vue de la moralité, elle n’est pas néanmoins sans inconvénients au point de vue de la continuité de la production. Sauf quelques étoffes unies, d’un placement régulier et sûr, les fabricants ne font presque jamais confectionner de tissus à l’avance, en sorte qu’aussitôt que les demandes cessent d’arriver les métiers cessent de battre. Les autres branches de l’industrie lyonnaise sont : la fabrication des tulles de soie et des foulards ; la passementerie, qui occupe 800 métiers ; la teinturerie (80 ateliers et 1,500 ouvriers) ; la construction de métiers à tisser, battants, navettes et autres outils ; les fonderies de cuivre, de cloches, de bronze ; l’orfèvrerie ; la bijouterie ; la boutonnerie ; l’ébénisterie ; la peausserie, la chapellerie ; la fabrication d’huiles, de chandelles, de bougies, de liqueurs, de bière, de pâtes alimentaires, de savon, de chocolat, de produits chimiques, de parfumerie, de toiles cirées, de fleurs artificielles, d’aiguilles, d’épingles, etc.

Si Lyon est une ville industrielle de premier ordre, c’est aussi une grande place de commerce. Cette ville, placée presque au centre de la France, à peu de distance des frontières de l’E., est la route des produits allant du N. au S., du S. au N., de l’E. à l’O. C’est la station principale du grand transit des marchandises qui, venant des contrées orientales de l’Afrique et de l’Espagne, débarquent à Marseille et dans les autres ports de la Méditerranée, pour être disséminées en France. Le commerce proprement dit de la place de Lyon s’exerce principalement sur les riches et nombreux produits de son industrie. Lyon achète annuellement pour environ 200 millions de soies de France, d’Italie, du Japon, de l’Inde et de la Chine, et exporte ses soieries principalement en Amérique, en Angleterre et en Russie. D’après le Compte rendu des travaux de la chambre de commerce de Lyon, publié en 1869, l’exportationdes soieries de toute nature s’est élevée :

En 1864, à 408,179,476 fr.
     En 1865, à 428,502,578
     En 1866, à 467,713,083
     En 1867, à 422,944,177

Lorsqu’on embrasse la période décennale qui s’étend de 1859 à 1868, on constate ceci : de 1867 à 1872, la moyenne de l’exportation a été de 465 millions de francs.

1° La profonde décadence du façonné, qui, de 66,152,457 fr. en 1859, est tombé, en 1868, à 7,431,465 fr. ;

2° L’accroissement des exportations d’unis, qui de 201,217,200 fr. se sont élevées, en 1868, à 329,322,360 fr.

À la fin de l’Empire, les affaires se ralentirent considérablement, et ce ralentissement ne fit qu’augmenter en 1870 et 1871, par suite de la guerre néfaste faite à l’Allemagne. Depuis cette époque, le marché de la soierie lyonnaise s’est relevé sensiblement. La draperie et la toilerie, les vins et eaux-de-vie, la houille, les fromages, les marrons, l’épicerie et la droguerie complètent le tableau général du commerce de Lyon,

Lyon est le centre de sept lignes de chemins de fer, qui aboutissent à quatre gares principales, les gares de Vaise, de Perrache, de la Guillotière et des Brotteaux, et qui mettent la ville en communication avec Paris, Marseille, Grenoble, Saint-Étienne, le Bourbonnais, Genève, Bourg. Pour entrer dans Lyon et aller de la gare de Vaise à celle de Perrache, le chemin de fer passe sous le tunnel de Saint-Irénée, appelé aussi tunnel de Fourvières ou de la Quarantaine. Il a 2,175 mètres de longueur, et se trouve à 192 mètres au-dessous de Saint-Irénée. Le plus curieux chemin de fer de Lyon est celui de la Croix-Rousse, appelé communément le chemin de fer de la Ficelle. Il n’a guère que 600 mètres de long et conduit, par une pente de 0m,16 par mètre, aux hauteurs de la Croix-Rousse. Les voitures y sont remorquées par une machine fixe et des cordages en fer, et tandis qu’un train monte, il en descend toujours un autre. On est en train d’en établir un semblable pour monter à Saint-Just et à Saint-Irénée. Le produit des octrois s’est élevé à Lyon, en 1872, à 8,966,792 fr.

Cette ville possède des compagnies d’assurances contre l’incendie, contre la grêle, sur la vie, contre les accidents de tous genres, contre les risques de la navigation sur le Rhône et sur la Saône. La Compagnie lyonnaise d’assurances contre les risques de la navigation est la plus importante.

Mœurs, usages, société, population, etc. La ville de Lyon a longtemps conservé une physionomie à part ; elle avait ses coutumes, ses usages, ses fêtes, qui rappelaient celles du moyen âge, entre autres la fête des Merveilles, établie en l’honneur de saint Pothin. Ce jour-là, une grande procession de bateaux avait lieu sur la Saône ; après cette cérémonie, de jeunes taureaux tout vivants étaient jetés dans la rivière, et des hommes vigoureux combattaient à outrance ces animaux que l’on traînait ensuite dans la rue Écorche-bœuf, pour y être abattus. Sans remonter si loin, il y a une quarantaine d’années seulement, les fêtes populaires étaient encore nombreuses, et se sentaient même parfois de la grossièreté des mœurs du temps passé. Ainsi, le vendredi saint, les bouchers célébraient à Sainte-Foy leur fête de l’Agneau pascal. Un agneau était mis dans une cage à barreaux de fer et suspendu en l’air ; les bouchers, à cheval et munis d’un bâton garni de crocs de fer, passaient au galop, lâchant de dépecer le pauvre animal. Les joutes sur l’eau étaient nombreuses : deux bateaux, maniés par des rameurs forts et vigoureux, passaient rapidement à côté l’un de l’autre. Sur chacun d’eux un homme se tenait debout, tenant une longue lance à la main et portant un plastron sur la poitrine ; un choc terrible avait lieu, comme dans les anciens tournois ; parfois un des adversaires tombait dans l’eau, parfois la chose arrivait à tous les deux ; il n’était pas rare de voir les lances se briser ou même un des deux lutteurs enlever son adversaire à la pointe de sa lance. C’étaient des jeunes gens de la ville ou des lieux voisins qui se livraient à ce divertissement. Le dimanche des Brandons, appelé à Lyon dimanche des Bugnes, de nombreuses bandes de masques s’en allaient en voiture, à cheval, à âne, dans la plaine de Saint-Fons, où toute la ville se portait. Les lazzis, les plaisanteries, les allusions politiques étaient échangés de toutes parts dans ce jour de gaieté, que terminait un bal masqué donné au théâtre, et auquel les damnes du plus grand monde assistaient. Mais le divertissement le plus usuel, le plus répandu, était le jeu de boules. Les Brotteaux étaient alors des terrains vagues appartenant aux hôpitaux ; on n’y voyait que des jeux de boules et des guinguettes. Chaque jour le Lyonnais, après son dîner (tout le monde dînait alors à deux heures), venait faire sa partie de boules ; il y avait le jeu de boules des notaires, celui des avoués, celui des avocats, celui des marchands de soie. Des paris énormes se faisaient sur les parties, et des joueurs venaient de Grenoble, de Valence, de Genève, pour y assister. Une guinguette bien connue alors, celle de la mère Brugousse, attirait de nombreux chalands ; on y buvait de la bière, on y mangeait du jambon, et, dans les chansons populaires du temps, un amoureux promettait à son amoureuse de la mener aux « Brottiaux manger une salade et danser un rigodon. » Aujourd’hui le cercle a remplacé le jeu de boules ; les habitudes de luxe, de faste et d’ennui qui en est la conséquence, ont remplacé cette simplicité charmante, cette gaieté facile. Cette transformation s’est principalement accomplie sous le second Empire et grâce à son action démoralisatrice. Nulle part peut-être cette influence funeste ne s’est fait autant sentir que sur la population lyonnaise, qui comptait le travail, l’économie et la simplicité parmi ses principales vertus. Non-seulement la ville a été fatalement endettée par ses administrateurs, exempts de tout contrôle et ordonnant les dépenses les plus insensées ; non-seulement il y a eu des tripotages et des gaspillages sans nombre ; mais cet amour du luxe, ce besoin de la représentation, dont l’exemple venait d’en haut, ont ébranlé les fortunes les plus sûres, et fait perdre à la place de Lyon une partie du crédit sans bornes dont elle avait joui jusque-là.

La société lyonnaise se divise en trois groupes bien distincts, bien tranchés, bien séparés les uns des autres. Le premier, appelé la société de Bellecour, se compose de tous ceux qui appartiennent à la noblesse, très-nombreuse à Lyon et dans les environs. Tous ses membres vivent entre eux, hostiles aux idées de leur temps ; pétris d’intolérance, prosternés devant le trône et devant l’autel. L’inintelligence, la morgue, l’exclusivisme, naturels aux aristocraties tombées dans une décadence définitive, sont encore augmentés chez eux par l’étroitesse et les petites passions de l’esprit de province. Le second groupe est celui du haut commerce, des fabricants, des marchands de soie, des banquiers, du barreau et de la magistrature. C’est, à proprement parler, l’élite de la société lyonnaise, qui travaille et possède la richesse et le talent. Malgré ces précieuses qualités, on y trouve encore quelque chose d’étroit dans les idées, qui tient aussi bien à la province qu’à la ville elle-même, et, à part quelques honorables exceptions, on y cherche vainement cet amour des lettres et de l’étude qui a fait jadis de Lyon un centre littéraire important. Le troisième groupe est composé des ouvriers en soie, qui forment un monde distinct par le langage, par les habitudes, par le nombre et par la position topographique. L’ouvrier en soie, appelé vulgairement canut, occupe la Croix-Rousse, qui est une ville dans une autre ville. Le canut a son langage à lui, qui se distingue non-seulement par l’accent traînant dont est affectée toute la population lyonnaise, mais surtout par un langage à part, une sorte de patois imagé et pittoresque, où l’on trouve les restes de l’ancienne langue du Lyonnais. Ce langage, qui de plus en plus tombe en désuétude, a été l’objet de recherches philologiques importantes, et quelques petits journaux du cru en usent parfois pour le plaisir de leurs lecteurs. L’ouvrier en soie est économe, travailleur, rangé, et on l’a trop souvent représenté comme un révolté, sans cesse disposé à s’insurger contre l’ordre social. C’est une erreur des plus grossières ; s’il est descendu deux ou trois fois dans la rue depuis le commencement du siècle, c’était ou dans ces moments de crise politique auxquels les autres villes n’ont pas échappé, ou pour cette question des salaires, dans laquelle, il faut bien le dire, tous les torts n’étaient pas de son côté ; le haut commerce lyonnais a toujours montré trop d’âpreté et pas assez d’esprit de conciliation. Ceux qui parlent en termes si injustes de l’ouvrier lyonnais montrent une ignorance profonde, que l’esprit de parti a contribué à propager. Certes, à Lyon comme dans toutes les grandes agglomérations, il existe des éléments mauvais et corrompus. Mais ce n’est point parmi la laborieuse population de la Croix-Rousse qu’il faut les chercher. Là, ce qu’on trouve à peu près partout, c’est l’ordre, le travail, l’esprit de famille. Les repris de justice, les gens sans aveu, les paresseux qui ne veulent pas demander au travail les moyens d’existence, les hommes impurs que le plus souvent la police soudoie dans le but d’amener des émeutes destinées à justifier des mesures compressives, cherchent généralement un refuge dans des repaires immondes, à la Guillotière.

Lyon est incontestablement, en France, la foyer le plus puissant des intrigues jésuitiques, la ville où, surtout dans les classes riches, l’esprit clérical a le plus d’empire. Les passions religieuses ont toujours agité fortement cette ville ; lors de la Saint-Barthélemy, Maudelot, lieutenant du duc de Nemours, fit incarcérer les protestants sous prétexte de les protéger ; puis il laissa des bandes d’assassins se jeter sur eux et les égorger dans les prisons. Plus de 1,000 victimes tombèrent dans ce jour néfaste. Sous la Restauration, Lyon eut beaucoup à souffrir de la réaction royaliste et cléricale ; les prêtres jetaient dans la boue le chapeau de ceux qui passaient à côté d’eux sans les saluer. Pendant le règne de Louis-Philippe, le clergé se contenta d’intriguer sourdement ; mais, avec le second Empire, sous la protection du maréchal Castellane, l’esprit clérical reprit toute son insolente fierté et domina en maître. On ne pourrait compter les couvents, les maisons religieuses, les séminaires qui couvrent le sol lyonnais. La colline de Fourvières est parsemée d’établissements de ce genre, placés fort en vue, comme pour bien signifier que ce sont eux qui dominent. Lyon a été la première à accueillir avec transport le dogme de l’Immaculée Conception, et le 8 décembre est la plus grande fête de la ville. Mais si le cléricalisme y est puissant, s’il y est l’allié naturel de la réaction, s’il travaille activement en faveur d’idées politiques surannées, compressives, d’une intolérance véritablement odieuse, il s’en faut qu’il règne en maître sur les consciences. En face de lui, séparé comme par un abîme qui va sans cesse s’élargissant, se dresse l’esprit démocratique, l’esprit de libre pensée, dont les progrès sont incessants. Nulle part en France, on peut le dire, il n’existe une démarcation si tranchée, si fortement accusée entre ces deux grands partis dont la lutte est le fait capital de l’histoire de notre temps.

La ville de Lyon a été autrefois un centre littéraire important. Son Académie, fondée en 1700, a eu un certain éclat au siècle dernier. En 1754, Voltaire, de passage en cette ville et membre honoraire de l’Académie, assista à une séance tenue exprès pour lui. Parmi les membres figuraient deux abbés et un jésuite, qui ne secouèrent pas la poussière de leurs souliers, mais qui firent très-gracieux accueil à leur collègue. Parmi les personnages illustres ou distingués que Lyon a vus naître, nous citerons : Germanicus, les empereurs Claude, Marc-AUrèle, Curacalla et Géta ; Sidoine Appollinaire, saint Ambroise, Louise Labbé, Philibert Delorme, Audrun, Coysevox, Coustou, le Père Ménétrier, Terrasson, Montucla, les Jussieu, Bonnet, Rolland, Camille Jordan, Jacquard, le maréchal Suchet, Claude Martin, Aimé Martin, Lemot, De Gérando, Jean-Baptiste Say, Bignan, Jal, les deux Ampère, Ballanche, Mme Récamier, Mme Gay, Saint-Jean, Paul et Hippolyte Flandrin, l’éditeur Louis Perrin, mort en 1866, et dont les éditions sont très-recherchées, Hénon, etc.

Le mouvement intellectuel est surtout représenté par les journaux, qui y sont très-nombreux, en y comprenant les feuilles catholiques spéciales. Les journaux politiques importants sont : le Progrès de Lyon, le Journal de Lyon, la France républicaine, le Salut public, la décentralisation.

Nous ne saurions passer ici sous silence deux établissements qui ont rendu et rendent à Lyon de très-grands services. Nous voulons parler de l’École des beaux-arts, dite École de Saint-Pierre, et de l’École La Martinière.

C’est à l’École des beaux-arts que Lyon doit une partie de sa splendeur industrielle. C’est déjà que sortent tous les dessinateurs de la fabrique lyonnaise. Cet établissement, entretenu aux frais de la ville et dont les cours sont suivis par 1,000 à 1,200 jeunes gens, comprend neuf classes : dessin et peinture de la figure, dessin d’après le plâtre, peinture pour la fleur, composition appliquée