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tagea son temps entre la culture des lettres, l’étude des sciences naturelles, les œuvres de bienfaisance et de piété et se livra aux plus dures austérités. Il fonda des collèges, des refuges pour les vieillards, des maisons pour les orphelins, dota des religieuses, fit apprendre des métiers à des enfants pauvres, encouragea les lettres, les arts, les manufactures, légua son cabinet d’histoire naturelle au savant Guettard, etc. L’excès de travail joint à l’austérité de sa vie détruisit rapidement sa santé. Il était fort instruit, possédait le grec, le syriaque, le chaldéen, l’hébreu, l’histoire, la géographie, la théologie, les sciences physiques, etc., et il laissa de nombreux ouvrages qu’il ne voulut pas faire imprimer. Nous citerons de lui un Traité sur les spectacles, une Réfutation du livre des Hexaples, des Dissertations contre les juifs pour réfuter le livre intitulé Kisouch emouna (le Bouclier de la foi), des Traductions, des Paraphrases et des Commentaires sur une partie de l’Ancien Testament, une traduction littérale des Psaumes, avec des notes, une paraphrase et de savantes et curieuses dissertations.


ORLÉANS (Louise-Élisabeth D’), reine d’Espagne, sœur du précédent et fille du Régent, née à Versailles en 1709, morte à Paris en 1742. Elle était désignée sous le nom de Mlle  de Montpensier lorsqu’elle épousa, en 1722, don Louis, prince des Asturies. Non seulement elle n’avait ni instruction ni beauté, mais encore elle était dépourvue de toute délicatesse, avait les goûts les plus grossiers et ne prenait aucun soin de sa personne. C’est ainsi qu’on la voyait souvent sans bas ni jupons et qu’il lui arrivait souvent de se montrer sans vêtements à ses femmes. Après l’abdication de Philippe V, Élisabeth fut reine d’Espagne (15 janvier 1724) ; mais, dès le mois d’août suivant, elle devint veuve de Louis Ier. Peu après, elle revint en France, abandonnant la pension de 600,000 livres qu’elle recevait comme reine douairière, se jeta dans une extrême dévotion et mourut ayant à peine trente-deux ans.


ORLÉANS (Louis-Philippe D’), fils du duc Louis, né à Paris en 1725, mort en 1785. Comme son père, il porta d’abord le titre de duc de Chartres. En 1743, il fit la campagne du Rhin sous les ordres du maréchal de Noailles, se distingua par sa valeur à Dettingen, fut promu maréchal de camp, puis lieutenant général, et épousa à son retour Louise-Henriette de Bourbon-Conti. Le duc de Chartres assista ensuite aux batailles de Fontenoy, de Raucoux, de Lawfeld, succéda à son père comme gouverneur du Dauphiné et prit, à la mort de ce dernier, le titre de duc d’Orléans. Envoyé en 1757 à l’armée du Rhin, il prit Winkelsen et assista à l’affaire d’Hastenbeck. Le duc d’Orléans passa les dernières années de sa vie dans sa délicieuse retraite de Bagnolet, entouré d’artistes et de gens de lettres. Il aimait avec passion le théâtre et avait fait construire une salle de spectacle dont Collé composait la plupart des pièces, dans lesquelles le duc jouait lui-même avec les personnes admises dans son intimité. Devenu veuf en 1759, il se remaria secrètement en 1773 avec une femme de beaucoup d’esprit, Mme  de Montesson. Lors de la querelle des parlements avec Louis XV, on s’efforça de le mettre à la tête de la noblesse qui faisait opposition au président Maupeou ; mais il ne tarda pas à se réconcilier avec la cour. C’était un homme affable et bon, qui avait hérité de l’esprit d’inépuisable charité de son père. Il donnait chaque année secrètement plus de 250,000 fr. aux malheureux. De son mariage avec sa première femme il avait eu deux enfants, Louis-Philippe-Joseph, qui devait devenir si célèbre sous le surnom de Philippe-Égalité, et Louise-Marie-Thérèse-Bathilde, depuis duchesse de Bourbon.


ORLÉANS (Louis-Philippe-Joseph, duc D’), dit Égalité, fils du précédent, né à Saint-Cloud le 13 avril 1747, décapité à Paris le 6 novembre 1793. Il porta le titre de duc de Montpensier jusqu’en 1752, et celui de duc de Chartres jusqu’à la mort de son père (1785). Marié, le 5 avril 1769, à Louise-Marie-Adélaïde de Bourbon-Penthièvre, il scandalisa les vieux courtisans, dans les cérémonies de ses noces, par son mépris pour l’étiquette. Ce prince alliait les opinions philosophiques du XVIIIe siècle aux mœurs dissolues de la Régence. Il entra dans la franc-maçonnerie, dont il devint plus tard grand maître, fit donner à ses enfants par Mme  de Genlis une éducation à la Jean-Jacques, s’éprit des institutions et des mœurs anglaises et s’attacha à se faire des partisans par sa prodigalité et par ses manières affables et familières. La vive opposition qu’il fit au coup d’État du chancelier Maupeou contre les parlements, en 1771, commença sa popularité et lui valut d’être exilé pendant quelque temps dans ses terres. Après l’avènement de Louis XVI, il reparut à la cour ; mais bientôt la jeune reine le prit en aversion et saisit toutes les occasions de lui en donner la preuve. C’est alors que commencèrent à se former à la ville et à la cour deux partis, celui de la reine et celui du duc, qui devaient se faire une guerre incessante, acharnée, et se traîner mutuellement dans la boue à l’aide d’insinuations, de calomnies et de pamphlets de tous genres. Ayant sollicité du roi la survivance de la charge de grand amiral de France, que possédait son beau-père, le duc de Penthièvre, le duc de Chartres ne reçut qu’une réponse dilatoire. Tout ce qu’il put obtenir, lorsque éclata la guerre entre la France et l’Angleterre, ce fut de servir comme volontaire sur la flotte de l’amiral d’Orvilliers, où il reçut le commandement d’honneur du vaisseau le Saint-Esprit, dont le commandant réel était le contre-amiral Lamotte-Piquet. À ce titre, il assista au combat d’Ouessant (27 juillet 1778). Dans ce combat, dont le résultat demeura incertain, le Saint-Esprit lutta contre sept gros vaisseaux anglais. D’après les uns, au nombre desquels se trouvait le ministre de la marine, le duc de Chartres montra dans ce combat « un courage froid et tranquille et une présence d’esprit étonnante ; » d’après les autres, c’est-à-dire d’après le parti de la reine, le duc se serait caché à fond de cale pendant l’action. Quoi qu’il en soit, à son retour à Paris, le duc de Chartres fut accueilli par des ovations qui accrurent l’irritation de ses ennemis. Peu après, il reprit la mer. Pendant son absence, les libelles les plus injurieux furent lancés contre lui ; on s’attacha à lui aliéner son beau-père en essayant de persuader à celui-ci que son gendre avait voulu le supplanter dans sa charge et, lorsqu’il revint de sa croisière, non-seulement il se vit accueilli à Versailles avec une extrême froideur, mais encore Marie-Antoinette se chargea elle-même de lui signifier au nom du roi l’ordre d’avoir à quitter le service de mer (20 juillet 1779). Pour lui fermer la carrière de la marine, Louis XVI le nomma colonel général des hussards, fonction nouvelle et purement honorifique qui, sous l’apparence d’une faveur, marquait une disgrâce. Profondément froissé, le duc de Chartres cessa à peu près complètement, depuis cette époque, de paraître à la cour. Peu après, il partit pour l’Angleterre, où il se lia avec le prince de Galles, s’éprit des mœurs de ce pays, introduisit, à son retour en France, les jockeys, les courses, la simplicité des vêtements, visita ensuite la Hollande, l’Italie, succéda au comte de Clermont comme grand maître de la franc-maçonnerie et vit se grouper autour de lui tous ceux qui étaient hostiles à la cour. À cette époque, son goût effréné pour les plaisirs, ses prodigalités avaient largement entamé son énorme fortune. C’est alors que, pour la réparer, il eut l’idée de faire construire les galeries du Palais-Royal, où s’installèrent des marchands et des industriels de tout genre, où les joueurs se donnèrent rendez-vous, où la débauche s’étala sous toutes ses formes. Cette opération, très-fructueuse au point de vue pécuniaire, fut vivement critiquée. La cour s’en indigna, et, dans une caricature, on représenta le duc sous le costume d’un chiffonnier ramassant des loques à terre (des locataires).

Depuis deux ans le duc de Chartres portait le nom de duc d’Orléans, lorsqu’il devint membre de l’Assemblée des notables en 1787. Il osa interpeller le roi dans le fameux lit de justice du 19 novembre, en lui déclarant que le droit de voter des impôts n’appartenait qu’aux états généraux. Cette hardiesse lui valut un exil dans sa terre de Villers-Cotterets (21 novembre), d’où il revint, le 23 mars 1788, pour reprendre son attitude hostile aux projets de la cour, à la tête du 3e bureau de la seconde Assemblée des notables. Nommé aux états généraux par la noblesse de Paris, de Villers-Cotterets et de Crespy-en-Valois, il opta pour Crespy, dont les cahiers demandaient de nombreuses et importantes réformes. Lors de la procession qui eut lieu à Versailles le 4 mai, veille de l’ouverture des états généraux, le duc d’Orléans affecta de se mêler aux députés du tiers, et la foule, reconnaissante de ce que, pendant l’hiver précédent, il avait fait de nombreuses distributions de vivres aux pauvres, le salua de telles acclamations que la reine, au dire de Mme  de Campan, fut sur le point de s’évanouir de colère et de douleur. Dans la discussion relative aux délibérations des trois ordres, le duc d’Orléans se prononça pour leur réunion en une Chambre unique et, suivi de 46 députés de la noblesse, il se réunit le 25 juin au tiers, qui venait de se constituer en Assemblée nationale. Élu président de la Chambre le 3 juillet, il refusa d’accepter cette fonction en déclarant qu’il ne se regardait pas comme capable de la remplir. Telle était alors sa popularité, habilement accrue par ses partisans, que, après le renvoi du ministère, le peuple de Paris promena son buste en triomphe avec celui de Necker dans la journée du 12 juillet. Le jardin du Palais-Royal, où se réunissaient les orateurs populaires, notamment Camille Desmoulins, devint un centre d’agitation d’où partirent les colonnes qui allèrent s’emparer de la Bastille. Lors des journées du 5 et du 6 octobre, pendant lesquelles le peuple affamé se porta sur Versailles et envahit le palais, le duc d’Orléans fut vivement accusé d’avoir excité le mouvement. On l’accusait, en outre, d’avoir accaparé les grains en 1787 pour créer une famine factice, puis d’en avoir revendu une partie à un prix très-élevé pour gagner des sommes énormes, et d’avoir distribué l’autre au peuple pour se rendre populaire ; on l’accusait de soudoyer les émeutiers, d’avoir à ses gages des libellistes pour attaquer Louis XVI et Marie-Antoinette, de mettre tout en œuvre pour renverser le roi et se faire proclamer régent du royaume, enfin d’aspirer à ceindre la couronne, même par un assassinat. Parmi ces accusations, plusieurs n’étaient pas absolument dénuées de fondement. Le duc d’Orléans, dont le principal agent était Laclos, se trouvait réellement, dans les premiers temps de la Révolution, à la tête d’un parti qui ne reculait devant rien pour lui faciliter l’accès du trône. Mais incertain, sans décision, il n’était pas de taille à remplir le rôle qu’on voulait lui faire jouer ; et il n’est pas absolument prouvé, du reste, qu’il n’était pas sincère lorsqu’il disait plus tard, pour repousser les accusations portées contre lui : « Un assassinat, en tuant le roi ou la reine, laissait vivre la monarchie, les lois du royaume et les princes héritiers du trône. Je ne pouvais y monter que sur cinq cadavres placés entre mon ambition et lui. Ces échelons du crime ne m’auraient conduit qu’à l’exécration de la nation et auraient lassé même les assassins. » Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il avait pour la cour et pour Marie-Antoinette une haine, un désir de vengeance qu’on avait tout fait pour exciter. Barnave, Linguet, Duport, les Lameth, etc., se rangèrent dans son parti. « Mirabeau, qui cherchait un prétendant pour personnifier la révolte, dit Lamartine, avait eu des entrevues avec le duc d’Orléans ; il avait tâté son ambition pour voir si elle irait jusqu’au trône. Il s’était retiré mécontent; il avait trahi sa déception par des mots injurieux. » C’est ainsi qu’il disait un jour : « Ce j… f… ne mérite pas la peine qu’on se donne pour lui. »

Les accusations qui s’élevèrent contre le duc d’Orléans après les journées d’octobre furent telles, que La Fayette lui-même demanda au roi de l’éloigner et de lui donner une mission fictive pour l’Angleterre (14 octobre). « Le roi, en écrivant au duc d’Orléans, dit M. Thiers, lui dit qu’il fallait que lui ou M. de La Fayette se retirassent ; que, dans l’état des opinions, le choix n’était pas douteux, et que, en conséquence, il lui donnait une commission pour l’Angleterre. On a su depuis que M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères, pour se délivrer de l’ambition du duc d’Orléans, l’avait dirigé sur les Pays-Bas, alors insurgés contre l’Autriche, et qu’il lui avait fait espérer le titre de duc de Brabant. Ses amis, en apprenant sa résolution, s’irritèrent de sa faiblesse. » Pendant son absence, le Châtelet ouvrit une enquête sur les événements d’octobre et conclut à la mise en accusation du duc et de Mirabeau. De retour à Paris depuis le 7 juillet, le duc d’Orléans prononça, le 11, devant l’Assemblée nationale un discours pour repousser les accusations dont il était l’objet, et, le 2 octobre suivant, à la suite d’une discussion à laquelle Mirabeau prit une part brillante, l’Assemblée, après avoir entendu le rapport du député Chabroud, décida à une grande majorité qu’il n’y avait lieu à accusation ni contre le duc ni contre Mirabeau. Après la fuite de Louis XVI et son arrestation à Varennes, au mois de juin 1791, le duc d’Orléans ne fit rien pour tenter de ramasser la couronne qui venait de rouler à terre. Toutefois, ce furent deux orléanistes, Laclos et Brissot, qui rédigèrent au club des Jacobins, dont le duc faisait partie, la pétition dans laquelle on demandait la déchéance de Louis XVI comme traître à ses serments, pétition qui fut l’occasion des massacres du Champ de Mars (juillet 1791). Lors de la discussion de la constitution, au mois d’août suivant, le duc d’Orléans déclara qu’il renonçait aux prérogatives de son rang et à ses droits éventuels sur la régence. Dans l’Assemblée constituante, qui termina ses admirables travaux le 30 septembre 1791, il n’avait pris que rarement la parole et il avait joué un rôle très-secondaire, se bornant, le plus souvent, à voter avec le parti constitutionnel.

Pendant l’Assemblée législative, dont il ne pouvait faire partie, il fit peu parler de lui. Bertrand de Molleville, ministre de la marine, entreprit de le rapprocher du roi, après l’avoir compris au nombre des vice-amiraux, et lui fit avoir, en janvier 1792, un entretien secret avec Louis XVI. Cet entretien eut le résultat espéré par le ministre, à qui Louis XVI dit, à la suite de l’entrevue : « Je crois, comme vous, que le duc d’Orléans revient de bonne foi et qu’il fera tout ce qui dépendra de lui pour réparer le mal qu’il a fait et auquel il est possible qu’il n’ait pas eu autant de part que nous l’avons cru. » Mais le parti de la reine devait rendre cette démarche stérile et éveiller avec une nouvelle force la haine du duc contre la cour. « Le dimanche suivant, dit un écrivain, le nouvel amiral se présenta pour faire sa cour au roi. Le couvert de la reine était mis, et tous les courtisans s’y trouvaient en grand nombre. À peine l’eut-on aperçu que les mots les plus outrageants furent prononcés. « Prenez garde aux plats ! » criait-on de toutes parts et comme si l’on eût redouté qu’il y jetât du poison. On le poussait, on lui marchait sur les pieds et on l’obligea de se retirer. En descendant l’escalier, il reçut plusieurs crachats sur la tête et sur ses habits. Il sortit justement indigné et plus irrité que jamais, croyant que le roi et la reine lui avaient préparé cette scène humiliante. Le roi n’y était pour rien ; mais il ne fit non plus rien pour en réparer l’effet. La reine fut secrètement flattée de l’approbation de ses familiers, de l’avilissement de son ennemi. » Quelque temps après, le duc d’Orléans se rendit à l’armée du Nord, où ses deux fils, le duc de Chartres, depuis Louis-Philippe, et le duc de Montpensier, faisaient partie de l’état-major de Dumouriez ; mais la cour, redoutant qu’il ne se fît un parti dans l’armée, lui intima bientôt un ordre de rappel.

De retour à Paris, le duc d’Orléans, se retrouvant en plein dans le courant révolutionnaire, s’y jeta à corps perdu et, lors des élections de septembre 1792, les Parisiens l’élurent au nombre de leurs députés à la Convention nationale. Depuis l’abolition des titres nobiliaires, on le désignait ordinairement sous le nom de M. d’Orléans. Le 15 septembre, il accepta de la commune celui de Philippe-Égalité proposé par Manuel. À la Convention, il alla siéger à l’extrême gauche parmi les montagnards, qui le défendirent contre les girondins, aussi acharnés contre lui que les vieux royalistes, et ce fut grâce aux premiers que la loi qui bannissait de France tous les Bourbons fut ajournée dans sa mise à exécution pour qu’elle ne l’atteignît point. Dans le procès de Louis XVI, Philippe-Égalité n’hésita point à voter la mort sans sursis ni appel au peuple. « Uniquement occupé de mon devoir, dit-il, convaincu que tous ceux qui ont attenté ou attenteraient par la suite à la souveraineté du peuple méritent la mort, je vote la mort ! » Un tel acte, lorsqu’il s’agissait de frapper un homme auquel il était uni par les liens de la parenté, surprit les républicains eux-mêmes et excita au plus haut point l’indignation des royalistes. La participation de son fils aîné, le duc de Chartres, à la trahison de Dumouriez vint précipiter sa perte. La Convention ayant ordonné l’arrestation de tous les membres de la famille des Bourbons pour servir d’otages à la République, Philippe-Égalité fut arrêté le 5 avril 1793, conduit à l’Abbaye, puis envoyé dans les prisons de Marseille. Vainement, à diverses reprises, il s’adressa à la Convention pour protester de son civisme et demander sa mise en liberté. Le 3 octobre, sur la proposition de Billaud-Varennes, il fut compris dans le procès fait à 45 députés girondins, ramené à Paris et traduit devant le tribunal révolutionnaire, comme ayant aspiré à monter sur le trône et conspiré avec Dumouriez. Condamné à la peine de mort, il demanda à être exécuté sur-le-champ, et, le jour même, son vœu fut exaucé (6 novembre 1793). Il marcha à la mort avec une fermeté qu’on ne lui aurait pas soupçonnée et montra, jusqu’au dernier moment, un imperturbable sang-froid.


ORLÉANS (Louise-Marie-Adélaïde de Bourbon-Penthièvre, duchesse d’), femme du précédent et mère du roi Louis-Philippe, née à Paris en 1753, morte à Ivry-sur-Seine en 1821. Fille unique du duc de Penthièvre et de Marie-Thérèse-Félicité d’Esté, elle se trouva l’héritière de l’immense fortune de la maison de Penthièvre. Elle venait d’accomplir à peine sa seizième année lorsqu’elle fut mariée, le 5 avril 1769, à Louis-Philippe d’Orléans, alors duc de Chartres, depuis duc d’Orléans et surnommé Égalité. De ce mariage naquirent trois fils, savoir : celui qui fut depuis le roi Louis-Philippe, le duc de Montpensier et le comte de Beaujolais, morts tous deux jeunes, et deux filles jumelles, Mademoiselle de Chartres et Louise-Marie-Adélaïde-Eugène, connue plus tard sous le nom de Madame Adélaïde. Bien que, dès les premières années de son mariage, les goûts de la duchesse d’Orléans différassent à quelques égards de ceux de son mari, elle fit tout pour lui être agréable et vécut toujours dans une parfaite harmonie avec lui. Elle consentit pour lui plaire à paraître à la cour, pour laquelle elle avait peu de goût, et elle se fit recevoir franc-maçonne à la loge de la Folie-Titon le 28 février 1776. Elle suivit son mari dans plusieurs voyages en Hollande, dans le midi de la France, en Italie, et visita Gênes, Rome, Naples et les diverses cours de la péninsule. D’un caractère doux et paisible, elle trouva un vif sujet d’affliction dans les circonstances qui tourmentèrent si violemment la vie de son mari. De mœurs irréprochables, elle sut conserver sa réputation intacte et pure et s’attirer le respect de tous les partis. Aussi ne crut-elle point devoir quitter la France à l’époque la plus terrible de la Révolution. Après la mort tragique de son mari, elle put traverser ces temps d’orages, protégée par sa qualité de femme, malgré ses titres et sa parenté, et eut le bonheur de sauver sa personne, ses enfants et tous les biens de sa famille, du côté paternel, c’est-à-dire l’entier héritage des biens de la maison de Bourbon-Penthièvre.

Le 10 février 1791, la duchesse d’Orléans était allée joindre le duc de Penthièvre, son père, à sa résidence d’Eu. À l’occasion du voyage de Varennes, ils furent tous deux mis en arrestation pendant quinze jours, après lesquels, rendus à la liberté, ils vinrent habiter successivement Radepont, Anet et enfin, au mois de juin 1792, le château de Bizy, près de Vernon.

Le duc de Penthièvre venait de mourir paisiblement, lorsque parut le décret du 24 brumaire an II (6 oct. 1793) prononçant l’expulsion de tous les membres de la famille des Bourbons qui n’étaient pas mis en jugement. La duchesse d’Orléans, conduite à Paris, fut détenue provisoirement à la prison du Luxembourg, puis transférée dans la maison de