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Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 12, part. 1, P-Pate.djvu/60

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graphe, je décris). Celui qui se livre à la paléontographie.

PALÉONTOGRAPHIE S. f. (pa’-lé-on-togra-ft

— du préf. paléo, et du gr. on, être, graphâ, je décris). Histoire des animaux et des végétaux fossiles dont les espèces ont disparu, Il On dit plus ordinairement paléontologie.

PALÉONTOGRAPH1QCE adj. (pa-lé-onto-gra-ti-ke

— rad. paléontographie). Qui a rapport à la paléontographie : Essais pàléontographiques.

PALÉONTOLOGIE s. f. (pa-lé-on-to-lo-j !

— du préf. paléo, et du gr. on, être ; logos, discours). Hist. nat. Partie des sciences naturelles’qui traite des fossiles, des êtres organisés aujourd’hui disparus de la surface du globe : La partie de la paléontologie gui traite des animaux vertébrés offre de grandes difficultés. (Laurillard.) L’étude de te paléontologie montre que notre globe a été le théâtre de plusieurs créations successives, gui, de perfectionnement en perfectionnement, se sont élevées jusqu’à l’homme. (G. Sand.)

— Encycl. On donne le nom de paléontologie à la science des êtres organisés fossiles, ti’est-à-dire enfouis dans les couches diverses qui entrent dans la composition de la croûte terrestre. Ces êtres organisés, dont il ne reste plus une des débris, ont vécu à des époques très-éloignées de nous et bien avant l’apparition de 1 homme sur la terre. La paléontologie se divise en paléozoologie, qui traite des animaux fossiles, et en paléophytologie, qui truite des plantes fossiles.

La paléontologie est, à coup sûr, l’une des sciences qui ont apporté le plus de matériaux pour l’œuvre de l’émancipation de l’esprit humain. Non-seuleinéiit elle a fait faire djmmenses progrès aux diverses branches de la géologie, mais elle a encore et surtout démontré la fausseté d’hypothèses cosmogoniques qui, au nom de telle ou telle dogmatique autoritaire, s’imposaient k la crédulité des peuples. La véritable histoire de la terre s’en est lentement dégagée, et l’on peut dire sans exa géralion que la philosophie de l’histoire naturelle est demeurée lettre morte jusqu’au jour où nous ont été révélés par la paléonto~ logie les principaux mystères relatifs au passé de notre globe. Si l’on admet avec l’école de Pythagore chez les anciens, avec Descartes, Leibniz, Buffon et Laplace chez les modernes, c’est-à-dire avec les philosophes, les astronomes et les naturalistes ; si l’on admet, disons-nous, l’origine ignée de notre globe et sa lluidité primitive, on concevra que la vie n’a été possible k sa surface que lorsque celle-ci, solidifiée par suite du refroidissement de la masse, avait atteint une

température assez basse pour que l’eau due à la condensation des vapeurs contenues dans l’atmosphère pût se maintenir d’une manière permanente à l’état liquide dans ses dépressions, l’eau et l’humidité étant, comme on sait, une des conditions essentielles de tout organisme vivant.

Les premières eaux ainsi formées durent contenir des principes salins et avoir une composition assez analogue k celle des mers actuelles. C’est du moins ce que l’on peut conclure des caractères des plus anciens organismes, tandis que nous n’avons de preuves de l’existence d’eaux douces semblables à celtes des rivières et des lacs de nos jours qu’à partir d’une époque beaucoup moins reculée.

L’Océan d’alors était sans bornes, peu profond, mais parsemé d’innombrables ilôts représentant les aspects de la couche oxydée

du globe ; aussi les premiers organismes animaux et végétaux étaient tous aquatiques et marins.

Dès qu’il y eut des eaux permanentes, des sédiments s’y déposèrent par suite de l’altération et de la décomposition des roches émergées et du transport dans leurs bassins, par les eaux atmosphériques, des éléments qui en provenaient. Ainsi commence un nouvel ordre de choses : aux roches cristallines, massives, résultant du refroidissement.extérieur de la masse fluide incandescente et formant les parois des premières dépressions océaniques, s’ajoutent au fond de celles-ci des dépôts en couches superposées ou comme on dit stratifiées, indiquant par leur structure en grand, comme par la nature et l’arrangement de leurs matériaux, leur origine sédimentaire.

Ces causes et leurs effets s’étant continués sans interruption générale jusque sous nos yeux, où ils se produisent encore, il en est résulté une série de dépôts argileux, sableux, marneux, calcaires, caillouteux, se recouvrant les uns les autres. Les divisions établies dans ces couches superposées représentent pour le géologue les divisions du temps en unités et en fractions de diverses valeurs correspondant à ces couches. La

; lassification qui eu résulte, et pour laquelle

nous allons voir que les animaux et les végétaux que ces sédiments renferment ont été d’un si grand secours, consiste donc à présemer, suivant leur ordre d’ancienneté, les phénomènes dont ces roches ont conservé les traces et dont l’ensemble forme le tableau chronologique de l’histoire de la terre.

L’étude des corps organisés enfouis dans les couches de la terre est donc intimement liée à celle des phénomènes géologiques.

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Les fossiles peuvent être envisagés soua divers points de vue, soit qu’on les considère dans leurs rapports avec les animaux et les plantes qui vivent encore sous nos yeux (c’est le point de vue zoologique et botanique, le premier qui s’offre k l’esprit de l’observateur), soit que, de leurs caractères comparés, on déduise l’état du globe lorsqu’ils vivaient ; soit qu’enfin, étudiés dans leurs relations avec l’ancienneté des couches qui les renferment, ils fournissent les moyens d’établir, tantôt la succession, tantôt la conternporanéité des couches. C’est le point de vue géologique ou stratigraphique-et sans lequel la paléontologie n’existerait pas comme science distincte.

Ainsi caractérisée, l’étude des fossiles vient relier sans les confondre la zoologie et la botanique à la géologie ; elle complète et agrandit le domaine des deux premières et jette une vive lumière ainsi qu’un intérêt non moins vif sur la troisième qui, sans elle, n’aurait pu atteindre le degré de précision où est arrivée la généralisation de ces lois, ni trouver de chronomètre comparatif d’une marche assez sûre et assez régulière pour apprécier la succession des temps.

La paléontologie, ou l’histoire de la vie à la surface de la terre, embrasse donc la connaissance des formes innombrables d’animaux et de végétaux qui se sont succédé et qui se sont remplacés graduellement, sans interruption complète et sans jamais se répéter ensemble.

Mais comment est-on arrivé à saisir cette relation constante des caractères organiques d’une couche du sol avec son ancienneté ? k pouvoir dire avec certitude : ces ossements de mammifères, de reptiles, de poissons, ces restes de crustacés, ces coquilles, ces oursins, ces zoophytes, ces débris de plantes sont de tel âge ? C’est uniquement par l’observation directe des faits et pur leur comparaison attentive.

La première idée et la première application de cette grande loi de la nature appartient à un Français dont le nom. était fort obscur jusque dans ces dernières années : c’est l’abbé Giraud Soulavie qui, dans divers ouvrages sur la géologie du Languedoc et dû Vivarais, publiés de 1777 k 1780, a formulé le double principe que les fossiles différent d’une couche k une autre suivant la place que cette couche occupe dans la profondeur du sol, et qu’ils sont les mêmes dans toute l’étendue de chacune d’elles. Giraud Soulavie a été méconnu, mais son principe n’a pas tardé k faire le tour du monde et k porter de nombreux fruits.

Toutefois, on peut dire que la science de la paléontologie n’existait pas avant Cuvier, qui en jeta les premières bases par ses travaux sur les ossements fossiles du bassin de Paris, car les travaux antérieurs de Daubenton, Camper, Hunter, Pallas, etc., n’avaient laissé entrevoir^ii les lois, ni même les données générales que la paléontologie moderne a été amenée à formuler d’une façon incontestable. Qu’il nous suffise de citer, parmi les noms des savants auxquels on doit les plus belles découvertes, ceux de Blatnville, Owen, Alcide d’Orbigny, Laurillard, Lartet, Boucher de Perthes, Lyell, Darwin, Garrigou, Huxley, Le Hon, Vogt, Pruuerbey, etc.

Les anciens avaient été frappés par la découverte de certains fossiles, et particulièrement par la présence de coquilles diverses au milieu de bancs de pierre j mais ils se sont bornés à attribuer ces faits à des mouvements alternatifs de la mer abandonnant et recouvrant ses rivages, par suite- de variations accidentelles dans le niveau du sol. À la Renaissance, le3 fossiles étaient considérés, tantôt comme de simples jeux du hasard, tantôt comme les ébauches d’une certaine force plastique, qui s’essayait k mieux faire. Les savants les plus hardis supposaient que les êtres dont on retrouvait les débris dans la terre, ne possédant pas les forces nécessaires k une vie normale capable de se perpétuer, étaient morts sans postérité. Toutefois, ce qui embarrassait fort ces faiseurs d’hypothèses, c’était la place qu’occupaient ces fossiles, au milieu d’énormes masses pierreuses, loin des côtes de la mer et à des hauteurs souvent considérables ; c’est alors que furent émises diverses théories encore existantes sur les révolutions de la terre, et particulièrement sur le rôle presque unique du

déluge, auquel on attribuait la plupart des résultats produits dans l’enfouissement des débris fossiles. De nos jours, dit M. Laurillard, une comparaison plus approfondie a montré que la plupart des fossiles sont les débris d espèces qui n’ont séjourné sur la terre que pendant un certain nombre d’années ou plutôt de siècles, et qu’il existe, d’une façon générale, un ordre de succession qui va des animaux inférieurs aux animaux supérieurs. De là, la théorie de l’échelle des êtres supposant l’extinction de beaucoup d’espèces qui comblaient les lacunes que l’on y remarque. Suivant d’autres hypothèses, la série des êtres serait due k une éternelle métamorphose desespèces, lentement modifiées par les siècles. C’est ainsi, pour citer l’un des exemples les plus remarquables, que l’homme serait issu, après de nombreuses transformations, de quelque race de singe perdue dont celles qui existent encore ne seraient qu’une branche demeurée sans développement. 11 est inutile d’ajouter que ces orangs eux-mê PALE

mes étaient une transformation d’autres singes moins rapprochés de l’homme, et ceux-ci la. métamorphose d’autres quadrupèdes inférieurs. Et c est ainsi, en descendant d’espèce en espèce moins parfaite, que l’on arrive iusqu’k la monade ou cellule primitive, qui, a l’origine des choses, a dû naître spontanément et d’un premier jet. D’autres auteurs admettent une force vitale progressive, parfois enrayée par une force contraire, appelée arrêt de développement. Cette théorie a été appuyée sur le fait des transformations successives que subit l’embryon humain pendant la vie fœtale, transformations que l’on a cru un moment représenter les divers types généraux de structure qui existent dans les races d’animaux et qui constituent la progrèssion de l’échelle des êtres. Une dernière théorie enfin, celle qui a eu et a le plus de retentissement encore, est due au savant Darwin ; aussi est-elle généralement désignée, du nom de son promoteur, sous la dénomination de darwinisme. Ce savant, s’inspirant d’idées anciennes et coordonnant les théories de quelques devanciers, théories qu’il corrobore et appuie sur des recherches immenses qu’une érudition comme la sienne pouvait seule accumuler, suppose que, par suite d’une sélection naturelle reposant sur un fait constaté qu’il appelle la « lutte pour l’existence, » chaque individu se développe, formant d’abord 1 espèce, puis passant k une autre espèce par l’évolution de la variété, ce qui l’amène, comme certains de ses devanciers, k admettre l’existence d’uni prototype primitif, qui naturellement a dû réaliser dès l’origine la forme la plus élémentaire possible. Ce n’est point ici le lieu de faire la critique de ces diverses théories (v. espèce, genre, organe, organisation). Il est toutefois une observation relative à la nature des fossiles, que nous sommes amené k faire, car elle caractérise un des grands côtés de la question paléontologique, c’est que la série ou échelle des êtres est encore difficile ou impossible à constater dans, l’ensemble des fossiles. Non-seulement on remarque d’énormes lacunes, mais encore une coexistence singulière de genres fort divers qui ensemble paraissent et disparaissent dans les couches géologiques. Aussi est-il très-imprudent de généraliser, dans l’état actuel de la science ; la découverte du lendemain renverse l’échafaudage de la veille. C’est ainsi, dit M. Dussieux, qu’on a échoué quand on a voulu prouver par les fossiles le déluge universel, et, quand on a voulu au contraire le nier, on s’est trouvé en présence non plus d’un déluge général, mais de plusieurs déluges partiels, et, quand on a cherché des preuves pour établir la marche ascendante des modifications progressives, ou a trouvé, entre autres faits négatifs, la coexistence de végétaux phanérogames et cryptogames. D’autre part, on avait voulu établir que les reptiles étaient postérieurs aux poissons, les insectes et les oiseaux aux reptiles, les mammifères aux oiseaux et l’homme aux mammifères ; or, il se trouve que les reptiles semblent avoir fait leur apparition en même temps que les poissons. Dans les terrains houillers de l’Angleterre, il y a déjà des insectes. Tandis que les mammifères n’auraient dû apparaître, suivant la théorie, que pendant l’époque tertiaire, on rencontre des fossiles de didelphes dans le terrain jurassique. Quant k l’homme, qui était censé n’avoir paru qu’après le dépôt des alluvions anciennes et après la création des mammifères, il a laissé des débris fossiles dans des couches fort antérieures, et c’est bien avant dans les temps géologiques qu’il faut remonter pour trouver les premières traces de son apparition. Philosophiquement parlant, on ne peut donc encore

rien affirmer de positif sur ces ténébreuses questions d’origine. Il faut attendre pour cela que l’on puisse accumuler en plus grand nombre les faits d’observation directe. Ce qui parait toutefois incontestable dès maintenant, c’est qu’en raison de la haute température à laquelle le globe a été primitivement soumis les êtres ont dû paraître à mesure que la température et l’état de l’atmosphère leur permettaient d’exister ; qu’en général les êtres élémentaires ont commencé à peupler le globe, et que successivement ont paru des créatures à organisation plus complexe, sans qu’on puisse en aucune ’façon préciser les époques certaines de leur apparition.

L’une des parties de la paléontologie qui présente le plus de difficultés est celle qui s’occupe des animaux vertébrés. Les débris fossiles, toujours jetés pêle-mêle et confondus entre eux, sont souvent brisés en fragments fort petits. Il a donc fallu, pour l’étude de ces restes incomplets, recourir k toutes les applications de l’anatomie comparée, c’est-à-dire mettre k côté des fragments recueillis des parties analogues des animaux encore vivants, afin de pouvoir apprécier jusqu’à quel foint les analogies compensaient les différences. Le principe qui domine l’étude des fossiles est ce qu’on pourrait appeler la loi des conditions d’existence, en vertu de laquelle chaque être organisé constitue un ensemble de parties harmoniques qui tendent vers un même but, de telle sorte que la connaissance de telle partie organique peut donner par induction la connaissance des organes voisins. Un second principe corrélatif du premier est l’unité d’un même plan d’organisation applicable k chaque embranche

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ment. C’est ainsi que le squelette des vertébrés indique l’ensemble des conditions générales au milieu desquelles s’écoule la vie de ces animaux. Le tout est indiqué par la forme des os, des dents, des mâchoires et des extrémités. La vérité de ces faits est rendue manifeste par les minimes différences que présentent le squelette et les dents des espèces d’un même genre, dont les conditions générales d’existence sont naturellement semblables. Dans ces cas, l’on ne trouve guère quo des différences de taille, telles qu’on en constate entre les squelettes des carnassiers d’une part (chiens, chats, tigres, etc.), et ceux des herbivores d’autre part (bœufs, chevaux, ânes, cerfs, etc.) ; et encore tous ces principes étant donnés, il ne faut pas oublier que l’ignorance où nous sommes de certaines relations organiques en fausse parfois l’application la plus légitime en apparence. Dans l’impossibilité où se trouve le paléontologiste de reconstituer en imagination les principales fonctions animales du fossile qu’il étudie, par suite de l’absence du grand ressort de ces fonctions, c’est-à-dire du système nerveux, il est contraint de se contenter de l’observation des organes applicables aux fonctions végétatives seules, c est-k-dire des dents et des mâchoires, après avoir profité des indications fournies par la composition du crâne, des vertèbres et des membres. Tandis que ces derniers organes font connaître la nature des mouvements propres à l’animal étudié, en même temps que le milieu qu’il habite (terre, eau ou air), les mâchoires et les dents indiqueront le genre de proie ou de pâture oui lui est habituel. L’importance caractéristique des dents se révèle jusque dans leur structure intime ; aussi est-il incontestable qu’elles peuvent donner de sûres indications pour le genre et même pour l’espèce, quand il s’agit de mammifères. N’a-t-on pas vu maintes fois des genres créés par un naturaliste qui n’avait eu qu’une seule dent fossile pour baser ses reconstitutions ?

Étant admis que l’on considère comme incontestable la loi de la détermination des fossiles, il ne nous reste plus qu’à donner un résumé rapide des principales races animales qui ont successivement peuplé le monde. En procédant de bas en haut, c’est-a-diro des couches les plus profondes aux couches superficielles, on ne trouve guère dans les terrains de transition ou païéozoïques que des poissons, dont quelques-uns de grande taille. Dans les terrains triasiques, on trouve do grands reptiles de formes bizarres, tels que les nothosaures, les simosaures, les labyrinthodons, etc. ; les terrains jurassiques et crétacés offrent des débris d’énormes sauriens, tels que les mosasaures, les dinosauriens, les ptérodactyles et quelques mammifères marsupiaux ; les terrains tertiaires renferment des débris de paléothériums, d’anoplothcriums de mylodons, de mégathériums, de dinothériums, de mastodontes, de rhinocéros ;

et dans le diluvium, enfin, nous trouvons des débris d’animaux d’espèces très-voisines dos nôtres, mêlés à ceux d’espèces éteintes, telles que le rhinocéros tichorhynos et quelques espèces d’éléphants.

En ce qui concerne les mollusques, on est arrivé à des résultats analogues, c’est-à-dire k la constatation de cinq faunes à peu près distinctes. Pour les plantes, M. Ad. Brongniart reconnaît quatre périodes pendant chacune desquelles la végétation a revêtu un aspect particulier, dû k la prédominance de certaines familles végétales. Arrivons enfin, pour terminer, à la question si controversée de l’antiquité de la race humaine. Dès la plus haute antiquité, la question de l’origine de" l’homme a préoccupé les philosophes et les naturalistes..Le problème parait ne pouvoir être jamais résolu, si l’on s’obstine à remonter jusqu’à l’apparition du premier ou des premiers ancêtres de notre race, et non-seulement à signaler cette apparition, mais encore à dire ce que fut cet ancêtre primitif ; mais si l’on se borne à vouloir déterminer approximativement l’époque où l’être méritant

le nom d’homme est apparu pour la première fois dans la série des créatures, la question se présente entourée de beaucoup moins do difficultés, puisqu’il ne s’agit en définitive que de fixer une date. La question en litige entre les naturalistes porte en réalité sur un seul point : à savoir, si l’homme a fait son apparition au commencement de l’époque quaternaire, c’est-à-dire avant la formation du diluvium. En d’autres termes, l’homme fossile existe-t-il ?

Oui, disons-le tout d’abord, l’homme fossile existe ; il est d’âge antédiluvien et son origine, dépassant et l’histoire et les temps fabuleux eux-mêmes, se perd dans les ténèbres des temps géologiques. Il n’y a pas longtemps encore que les géologues et les paléontologistes, croyant devoir se conformer à la chronologie biblique, ne donnaient à l’homme qu’une antiquité qui ne dépassait guère huit ou dix mille ans. Ce n’est point que quelques géologues du siècle dernier n’aient parfois tenté de secouer les langes dogmatiques. Ils ont même appelé i homme ou préadamite, c’est-à-dire aïeul d’Adam, les restes d’une grande salamandre trouvés dans le terrain crétacé ; mais leurs successeurs rentrèrent dans les saines traditions d’orthodoxie, et Cuvier lui-même ne manquait jamais de répondre : « Il n’y a pas d’homme fossile ■, quand on lui apportait des ossements de mammifères