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simple de rapporter ce mot à pékin, étoffe qui sous l’Empire était beaucoup portée en pantalon ; on distinguait de la sorte à première vue le militaire de celui qui ne l’était pas. Ceci est plus raisonnable, sans être certain.

PÉKIN, en chinois Pë-king (cour du nord) ou King-sse (la capitale), capitale de l’empire chinois et de la province de Pé-tcbi-li, sur le Yu-ho, dans une vaste plainei à 50 kilom. S. de la grande muraille de la Chine, à 1,980 kilom. N.-E. de Calcutta, à environ 8,000 kilom. S.-E. de Paris, par 39° 54’ de latit. N. et 114°8’30" de longit. E. Le pourtour de la ville, sans y comprendre les faubourgs, est de 35 kilom. et sa superficie de 6,000 hectares ; la population est d’environ 2 millions d’habitants. Cette vaste cité est la résidence de l’empereur et des principaux fonctionnaires du Céleste-Empire. On y trouve de grandes cours

de justice ; le tribunal de l’histoire et de la littérature ; un observatoire bâù en 1279 ; l’imprimerie impériale ; une bibliothèque, des collections impériales ; des écoles de toutes "ortes, des établissements debienfaisance, etc. . Au commencement du xixe siècle, cette ville n’était guère connue que par les récits de quelques missionnaires et d’un petit nombre de voyageurs. Les rapports de plus en plus fréquents qui se sont établis entre la Chine et l’Occident, et surtout la dernière expédition anglo-française, qui u arboré le drapeau français dans la capitale du Fils du Ciel, ont déchiré le voile qui cachait aux yeux des Européens les merveilles de Pékin. Nous donnons ici la description de cette ville ll’après le Voyage en Chine et en Mongolie de M. de Bourboulon, ministre de France, publié par M. Poussielgue (1SGS). Pékin est à peu près à égale distance de deux cours d’eau, le Peiboet ! e"Wen-ho, qui vont se réunir à quelques kilomètres au nord de Tien-tsin. Les lacs et les fossés de Pékin sont alimentés par un canal qui vient des étangs de Yuen-min-yuen (le palais d’été) et qui traverse la face nord de l’enceinte de la ville tartare sous une voûte fermée par une grille en bois, qu’on découvre au loin dans la campagne ; un autre canal qui sort de la ville chinoise, près de la porte de Tong-pien, relie Pékin au Pei-ho et, par suite, àTien-tsin et au grand canal impérial, qui y amène les marchandises du centre et même du sud de la ville. Douze faubourgs entourent la capitale, mais ils ne sont pas bien considérables. On y voit un grand nombre de briqueteries et des établissements de maraîchers et de fleuristes. Elle est composée de deux, villes différentes, entourées chacune de remparts et de fossés, et qui ne sont reliées l’une à l’autre que par trois portes fortifiées : la ville tartare, Nei-tehen, ou la ville officielle et militaire, au nord, et la ville chinoise, Ouei-tchen, ou la ville marchande, au sud. La ville tartaA, appelée aussi Ringtchiiig ou Combalott, a la tonne d’un rectangle dont les faces sont dirigées vers les quatre points cardinaux, et dont l’angle nord-ouest est abattu. Les rues en sont larges, longues et propres. Neuf portes y donnent accès, savoir : au nord, Ngang-ting-men, la porte de la Paix, qui est celle par on les alliés entrèrent à Pékin, Toa-ehang-men, la porte de la Victoire ; à l’ouest, Si-tche-men, la porte de l’Ouest, Pin-tse-inen, la porte de la Soumission ; à l’est, Toiig.-tche-men, la porte de l’Est, Tehi-koua-men, la porte du Peuple ; au sud, Tien-men, la porte de l’Aurore, Hai-tai-men et Tchouen-iche-inen (ces deux dernières ont reçu les noms de deux empereurs). Chacune des trois portes au sud de la ville tartare communique avec la ville chinoise par une demi-lune fortifiée. De toutes ces portes partent des boulevards de 30 mètres de largeur, qui sont dirigés vers un des quatre points cardinaux et divisen’t la ville en grands carrés. Ceux-ci sont partagés à leur tour, par des rues parallèles de 2 mètres de largeur, en carrés plus petits, reliés par une foule de ruelles étroites orientées de toutes les façons. Les boulevards sont formés d’une chaussée pavée élevée au-dessus des accotements ; les rues ordinaires ne sont pas pavées. Les maisons qui bordent les boulevards ontunaspectmisérablejellesn’ont point d’étages, sauf quelques-unes qui possèdent un entre-sol servant de magasin. Quelques boutiques sont richement décorées en bois sculpté ; on y rencontre cependant des établissements impériaux et des temples, reconnaissubles à leurs toits jaunes ou verts ; les palais, les Fou et les hôtels des mandarins ont tous leur entrée dans des ruelles, et les grands arbres de leurs pares en font seuls soupçonner le voisinage. Au centre de la ville tartare est une enceinte formée par un mur de clôture percé de quatre portes fortifiées : c’est la ville Jaune ou Houang-tchen, dont la superficie est d’environ 608 hectares. Elle contient beaucoup de temples et de Fou appartenant aux grands dignitaires de l’empire ; la partie occidentale est occupée par des jardins impériaux, qui- sont groupés autour de deux lacs artificiels ; au centre est la montagne de Charbon, qui a 80 mètres de hauteur et qui est le point le plus élevé de Pékin. Cette colfine touche à la face septentrionale d’une troisième enceinte qui entoure le palais impérial ou ville Rouge, Houang-chan-ti-kong ; la ville Rouge forme un cadru parfuit, percé également de quatre portes et entouré de profonds fossés. La, superficie est d’environ S0 hectares. On voit par ces détails que la

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ville tartare se compose réellement de trois villes entourées de remparts fortifiés, et qui pourraient être successivement défendues.

La ville chinoise, appelée aussi Wai-lotching, Lao-tching, forme à peu près un rectangle, dont l’une des bases est accolée à la face sud de la ville tartare et déborde cette face d’environ 500 mètres à. l’est et à l’ouest. Sept portes y donnent accès, savoir : au nord, Si-pien-men, Tong-pien-men, petites portes de l’est et de l’ouest ; à l’est, Cha-coua-men (nom propre) ; à l’ouest, Couanza-men (nom propre) ; au sud, Soung-ling-men, la porte Sacrée, Tiang-tse-men, Nan-si-men, portes de droite et de gauche du sud. Des trois portes qui relient la ville tartare et la ville chinoise, ainsi que de Cha-coua-men et de Couanzamen, partent de larges rues dans lesquelles viennent déboucher un grand nombre de ruelles. La grande avenue du centre qui part de Tien-men partage la ville du nord au sud et vient aboutir à Soung-ting-men, après avoir traversé la vaste plaine cultivée qui occupe le sud de la ville chinoise et qui ne contient que quelques pagodes isolées, outre les deux enceintes des temples du Ciel et de l’Agriculture. Les rues de la ville chinoise sont tortueuses et très-étroites ; le commerce de Pékin s’y fait presque en entier, et on n’y rencontre ni palais impériaux ai résidences officielles.

Il n’existe aux environs de Pékin aucune colline, aucune hauteur même qui permette aux regards curieux d’en dominer 1 immense panorama. L’enceinte de ses hautes murailles, qui l’enserrent de tous côtés, n’offre aux yeux du voyageur qu’un vaste paravent projetant son ombre sur les fossés profonds et sur les misérables ruelles des faubourgs. Pour se rendre compte de l’aspect général de cette grande cité, il faut se placer sur un point culminant. Lorsqu’on monte sur le terre-plein des murailles, on jouit d’un étrange et magnifique panorama : le ciel d’un azur profond, te soleil étincelant, projetant de grandes ombres d’un noir opaque ; ci et là des rayons de lumière éclatante, glissant sur les tuiles vernissées, font ressortir comme des taches le jaune d’or, le bleu lapis, le rouge vermillon, qui se mêlent, qui se heurtent au vert sombre des cèdres, au pâle feuillage des robiniers. Les pagodes, les temples, les kiosques, les tours, les portiques se tordent en spirales, se dressent en lames recour, bées, s’arrondissent en boule, s’élèvent en pointes aiguës et dentelées au milieu des troncs dénudés et dos longues branches des arbres centenaires ; les mâts des résidences princières laissent flotter au vent leurs longues banderoles. C’est un mélange inouï de formes et de couleurs.

Devant nous, à droite, voici les toits dorés du palais impérial avec sa haute coupole de marbre blanc ; plus loin, la montagne de Charbon et ses cinq pagodes étagées les unes au-dessus des autres ; puis le Peï-tha-ssé, placé dans une presqu’île, qui se mire dans les eaux paisibles de la mer du Milieu, au centre même de la ville. En se portant vers le nord, le regard suit la sombre ligne des murailles chargées de tours, de pavillons et de batteries, 1 jusqu’à 50 mètres au-dessus du sol. Si nous nous retournpus vers la gauche, le coup d’œil change entièrement. C’est la ville chinoise, un amas inextricable de ruelles et de masures

basses à un seul étage, avec des toits en torchis

et des tuiles rougeâtres. On aperçoit seulement la grande avenue du centre, qui forme une profonde ligne de démarcation, coupant la ville en deux. Dans cette grande artère se presse une foule compacte et affairée ; c’est la ville des marchands, des revendeurs, de la populace, des mendiants. Au loin, le regard s’arrête sur la masse sombre d’une forêt, d’où ressortent les coupoles bleues de deux immenses rotondes : ce sont les temples célèbres du Ciel et de l’Agriculture, avec leurs’parcs renfermés dans une enceinte réservée. Enfin, du côté de la campagne, au-dessus des misérables faubourgs qui entourent Pékin, on aperçoit une grande plaine couverte d’une luxuriante verdure, mais où il n’y a pas un bosquet, pas un grand arbre même. À l’horizon, au-dessus da la plaine, se dessinent des ombres bleuâtres : ce sont les montagnes de Yuen-min-yuen, le palais d’été (v. palais d’été). Enfin, sous les pieds s’étend ce prodigieux entassement de fortifications qui déroute toutes les idées qu’on peut avoir sur l’art de défendre les places fortes, et qui rappelle, avec une forme étrange, les gigantesques constructions du moyen âge.

On compte, comme nous l’avons dit, neuf portes dans la ville tartare et sept dans la ville chinoise ; chacune de ces portes forme une redoutable forteresse. Les abords en sont défendus, à l’extérieur, par des sortes de demi-lunes rectangulaires percées, sur une de leurs faces, de voûtes de 6 mètres, qui communiquent, par une chaussée pavée de grandes dalles, à d’autres voûtes traversant l’épaisseur des murailles ; ces voûtes sont fermées chacune par des portes en bois garnies de gros clous en fer. Quand le couvre-feu a sonné, personne ne peut plus entrer ni sortir de la ville ; cependant, soyez certain que le chef de la porte, autrement dit le portier, ce prétorien mandchou à longues moustaches et à bonnet à queue de renard, sera toujours prêt, moyennant une rétribution convenable, à violer la consigne et à ouvrir les longues et sombres voûtes dont il

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tient les clefs. Sur chaque porte s’élèvent deux pavillons : celui qui regarde la ville a deux étages ; il sert de magasin et de caserne ; celui qui regarde la campagne forme une batterie a quatre étages de feux, dont chaque étage a douze embrasures de face et quatre de flanc. Voilà sans doute de formidables défenses. Mais ces batteries ne peuvent être armées à canse de la faiblesse des planchers, qui sont vermoulus et hors d’état de supporter le poids des immenses canons chinois. L’ouverture de la face delà demi-lune est surmontée d’un corps de garde percé d’embrasures et de meurtrières. Les murailles des fortifications sont couvertes d’affiches et de réclames de toute sorte. Dans l’espace vide qui s’étend entre la demi-lune et les flancs de ces énormes pavillons est une place d’armes couverte, où 500 hommes peuvent se ranger en bataille. Enfin les portes, avec leurs casernements et leurs batteries, ne sont pas les seules fortifications ; chaque angle de la muraille est défendu par une tour ayant quatre étages de feux ; il existe, devant chaque courtine, un grand bâtiment pouvant servir de magasin. Ces fortifications étonnantes, qui ont dû exiger le travail de plusieurs générations, n ont pu arrêter une poignée do soldats européens manquant de batteries de siège. D’ailleurs, depuis que les Mandchoux ont conquis la Chine, Pékin a perdu son importance de place forte protégeant le pays contre les invasions du nord. L’enceinte des murailles est formée d’un massif contenu entre deux murs et composé de couches de chaux grasse éteinte et de terre végétale ; le terre-plein est couvert d’un dallage de briques fixées sur une couche épaisse de béton. Les murailles, hautes de 15 à 20 mètres et épaisses de 12 à 15 mètres, sont bordées d’un mur d’appui crénelé : douze cavaliers pourraient aisément se promener de front, et malgré les ronces et les herbes qui les obstruent par endroits, c’est réellement une des plus belles promenades de la ville. Les remparts, les portes, les tours de Pékin ne sont plus que les souvenirs imposants du vieux temps : ils ne sont ni entretenus par l’État, ni même respectés des habitants. On voit adossées dans un pôle-mêle pittoresque, aux parois des murailles, de misérables échoppes, dos huttes en torchis, où habitent de nombreux mendiants. Dans les fossés, larges de 18 mètres, on ne trouve guère qu’un peu d’eau croupissante en été, tandis qu en hiver on les remplit jusqu’aux bords pour recueillir la glace qui s’y forme.

Parmi les monuments qu’on trouve dans la ville, nous citerons en premier lieu l’ancien observatoire des jésuites, grosse tour carrée qui domine les remparts du sud-est. Elle fut construite jadis pour l’usage des astrologues chinois. Au xvme siècle, le P. Verbiest, président du tribunal des mathématiques, détermina l’empereur Khang-hi à remplacer les instruments indigènes par d’autres plus grands et plus compliqués, qui furent fabriqués à Pékin sous la direction des jésuites et d après les principes de l’astronomie européenne. Quand les jésuites furent expulsés de l’empire, l’observatoire fut abandonné, aucun savant du pays n’étant de force à leur succéder. Depuis plus d’un siècle que l’établissement est placé sous les scellés impériaux, rien n’a été changé de place. L’enceinte de l’observatoire est voisine de celle du temple des lettrés ; ce vaste yamoun, qui s’appelle le Wen-kio-koung, est la propriété du corps des lettrés. C’est là qu’ont lieu chaque année les examens littéraires ; à cette époque, une foule nombreuse se presse à la porte pour on connaître les résultats. On ne peut arriver à aucune position en Chine sans avoir pris ses. grades. On trouve dans le Wen-hio-koung des salles spacieuses richement lambrissées pour les solennités littéraires ; dans le jardin, qui est magnifique, s’élève une pagode en 1 honneur de Confucius, et une rangée de petites cellules où sont enfermés les aspirants lettrés, qui y traitent par écrit la question assignée ; ils n’ont le droit d’emporter avec eux que du papier blanc, une écritoire et des pinceaux ; une sentinelle veille à la porte pour empêcher aucune communication des concurrents entre eux ou avec le dehors. Le yamoun des lettrés est habité par un gouverneur et un surintendant littéraire. Au nord de Pékin est le tribunal des rites et le ministère des affaires étrangères ; c’est un ancien temple qui n’a rien de remarquable, sinon qu’il servit aux entrevues du prince Kong et de ses acolytes avec les ministres européens ; c’est là que fut signé, le 25 octobre 1860, le traité d’e paix qui termina notre dernière guerre avec la Chine. L’avenue de l’est, où se trouve cet édifice, est une des plus populeuses et des plus commerçantes de la ville mongole ; mais dans ce concours d’êtres humains il n’y a presque pas de femmes ; sauf celles de la plus basse classe, elles restent toutes enfermées dans les maisons. En Chine, tout homme qui se respecte doit sortir à cheval ou en chaise ; aussi voit-on dans les rues un nombre considérable de chaises et de palanquins. Chez les loueurs de chaises, qui en ont de grands dépôts, on peut s’en procurer une pour ie prix modeste d’une piastre par jour. On trouve aussi des stations de voitures, ou plutôt de chariots, avec un ou deux mulets d’attelage : ils ont un aspect séduisant ; la caisse en est bariolée de couleurs éclatantes ; l’iatérieur en est garni de taffetas

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rouge ou vert ; mais ces affreux véhicules ne sont pas suspendus, et c’est s’exposer à un supplice horrible que d’y accomplir une course à travers la ville. Les avenues, jadis pavées de belles pierres de grès de i mètres carrés, sur une épaisseur de centimètres, n’ont subi aucune réparation depuis deux cents ans ; la moitié de ces dalles, usées ou détruites par le temps, a été remplacée pardegrands trous ; pour faire rouler une voiture sur ces avenues, qui ressemblent h un escalier de pierres dégradées et posées à plat, il faut être Chinois. Quand on’n’y verse pas, on y ressent des cahots affreux ; cependant les gens de Pékin s’en accommodent. Ils sont là paisiblement assis et fumant leur pipe. Le cocher, qui n’a d’autre Siège que le brancard, s’y maintient par un prodige d’équilibre. La longue perspective que présente l’avenue de l’est, régulièrement percée et bitie, est interrompue à moitié chemin par quatre arcs de triomphe, en pierre et en bois, chargés de sculptures représentant- des animaux fabuleux, des fleurs et des oiseaux. Ils se composent de deux grands piliers surmontés d’un entablement avec toiture chinoise. Ce sont plutôt des portes que des arcs de triomphe. Il y en a quatre pareils dans l’avenue parallèle, à l’ouest de la ville. À droite, prés des remparts, sont situés les greniers d’abondance. Les deux côtés de l’avenue, à l’extrémité septentrionale, sontoccupés par les deux temples les plus célèbres de Pékin : h gauche, le temple de Confucius ; à droite, celui des Mille lamas.

Non loin de la porte de Ngang-ting, par laquelle l’année anglo-française est entrée dans Pékin, s’élève la tour de la Cloche. La construction de cet édifice a beaucoup d’analogie avec celle des portes de la ville el, doit être du même temps. L’étage inférieur est formé d’une arcade percée de deux ouvertures ; au-dessus s’élève une tour rectangufaire que surplombe un large toit rouge avec un encadrement de tuiles vertes ; quatre arceaux élégamment sculptés à jour laissent entrevoir le corps d’une immense cloche de bronze qui n’a pas de battant, mais sur laquelle on frappe avec de gros marteaux cû bois de fer. Les gardes de la ville l’emploient la nuit en signe d’alarme, en cas d’attaque ou d’incendie : c’est le tocsin de Pékin. Il y a plusieurs cloches de ce genre dans les autres quartiers : celles-là servent à annoncerles veilles de nuit, qui sont de deux heures j on annonce la première en frappant un seul coup, qu’on répète de quart d’heure en quart d’heure ; on en frappe deux pour la seconde veille, trois pour la troisième, et ainsi do suite ; la nuit est divisée en cinq veilles.

L’avenue qui part du carrefour de la Cloche et qui remonte vers le nord-ouest, dans la direction de lu porte de Toa-chang, longe pendant quelque temps le plus septentrional des lacs de Pékin, appelé emphatiquement par lesChinois la mer du Nord. Il est alimenté par les eaux des fossés de la ville, qui s’y déversent au moyen d’une écluse surmontée d’une grille en bois. On ne remarque de ce côté d’autres monuments que le charmant temple de Fâ-qua, qui appartient à la secte de Tao, et qui est situé au centre d’une petite Ile, à l’extrémité septentrionale de la mer du Nord. La pagode principale est dans une position pittoresque, au milieu d’une végétation luxuriante ; elle contient une foule d’idoles appartenant à ce culte bizarre, dernier vestige du fétichisme ancien, méprisé par la plupart des Chinois, et qui n’a plus d’adorateurs que dans les derniers rangs du peuple.

Lorsqu’on descend directement vers la porte de Hao, qui donne accès dans l’enceinte de la ville Jaune, on rencontre la mer des Roseaux, couverte de nymphéas bleus et jaunes, de roseaux à aigrettes, de nélumbos. La porte de Hao ne diffère de celles de l’enceinte extérieure de la ville que par l’absence de corps de garde et de demi-lune. Après avoir franchi cette porte, on arrive au pied de la montagne de Charbon, qui est le point le plus élevé de Pékin.

La montagne de Charbon (Mee-cheen) est une montagne surmontée d’un mamelon, qui est lui-même couronné par un kiosque à deux étages d’une élégance merveilleuse. Rien da plus amusant qu’une promenade au milieu du labyrinthe de petites ruelles que forment les édifices bâtis sur cette colline, où habitent seulement des bonzes et des personnages d’un rang élevé. Aussi n’yrencontre-t-onpas les immondices habituelles aux quartiers populeux. Ce sont des surprises de tous les instants. Des ponts de rocailles, des fontaines avec des sculptures grotesques, des pagodes qui laissent entrevoir des dieux effrayants ; puis des bosquets de lilas, d’hydrangées, de vieux cèdres centenaires, des oiseaux qui chantent au milieu de cette nature en fête, et peu de Chinois, car le Chinois aristocratique ne se promène pas et ne sort de chez lui qu’en pompe. Du sommet de la montagne de Charbon, la vue embrasse un panorama immense : c’est le point culminant de Pékin, et on l’aperçoit da toutes les parties de la ville.

En tournant à droite, on arrive au Peïtha-sse, qui s’élève dans une presqu’île au centre de la mer du Milieu. Le Peï-tha-sse est à la fois une bonzerie et un monument funéraire élevé à la mémoire du dernier empereur de la dynastie des Ming. Dans le jardin impérial se trouve encore l’arbre ou so