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paraître les Considérations. « La Pologne, dit-il (chap. m), est un grand État environné d’États encore plus considérables qui, par leur despotisme et par leur discipline militaire, ont une grande force offensive. Faible, au contraire, par son anarchie, elle est, malgré la valeur polonaise, en butte a tous leurs outrages. Elle n’a point de places fortes pour arrêter leurs incursions. Sa dépopulation la met presque absolument hors d’état de défense. Aucun ordre économique, peu ou point de troupes, nulle discipline militaire, nul ordre, nulle subordination ; toujours divisée au dedans, toujours menacée au dehors, elle n’a par elle-même aucune consistance et dépend du caprice de ses voisins. Je ne vois dons l’état-présent qu’un moyen de lui donner cette consistance qui lui manque ; c’est d’infuser, pour ainsi dire, dans toute la nation l’âme des confédérés (les confédérés de Bar), c’est d’établir tellement la république dans les cœurs des Polonais, qu’elle y subsiste malgré tous les efforts de ses oppresseurs. C’est là ce qui me semble l’unique asile où la force ne peut ni l’atteindre ni la détruire. On vient d en voir une preuve à jamais mémorable. La Pologne était dans les fers du Russe, mais les Polonais sont restés libres. Grand exemple qui vous montre comment vous pouvez braver la puissance et l’ambition de vos voisins. Vous ne sauriez empêcher qu’ils ne vous engloutissent ; faites uu moins qu’ils ne puissent vous digérer... Si vous faites en sorte qu’un Polonais ne puisse jamais devenir un Russe, je vous réponds que la Russie ne subjuguera pas la Pologne. » Entre autres réformes, Rousseau recommande aux Polonais l’émancipation des

paysans et de la bourgeoisie (chap. vi), réforme dont alors on osait à peine parler en France, le maintien de la royauté, mais avec "des attributions limitées (chap. vin), l’établissement de trois codes clairs et brefs : code politique, code civil, code criminel (chap. x) ; de l’impôt sur le revenu foncier (chap. xi), la suppression des armées permanentes et leur remplacement par des milices nationales (chap. xn), et plusieurs autres réformes moins importantes. Outre des projets de réforme, l’ouvrage contient diverses appréciations sur l’ancien gouvernement polonais. Oe l’avis des auteurs polonais, Rousseau est un de ceux qui ont le mieux eompris les affaires de ce pays. « Les Considérations sur le gouvernement de la Pologne, dit M ; Gasztowt, ne paraissent pas être l’œuvre d’un étranger, d’un homme du xvme siècle, mais bien d’un Polonais du xixb siècle ; je pourrais même dire » d’un prophète national.’ (Poglad filozofow, etc., »a sprawe polska, Paris, 1870.) L’ouvrage de Rousseau a eu le double mérite d’avoir donné les appréciations les plus exactes sur un Étatmal connu à cette époque en Europe et d’avoir vu un grand nombre des prédictions qu’il contenait justifiées par les événements.

Pologne (HISTOIRE DU l’aNARCIHE DE LA) et du tlénicinbreuifMil de cette république, Suivie des Anecdotes sur la révolution de Russie en 1702, parRulhière (Paris, 1807,4 vol. in-8» j 2e édition revue sur le texte et complétée par G. Ostrowsbi, Paris, 18G2, 3 vol. in-L2). C’est l’ouvrage français le plus célèbre qui ait été publié sur la Pologne jusqu’à nos jours, et il a mérité sa réputation. Il inspira des craintes à la diplomatie russe, qui chercha et aurait réussi, sans Napoléon 1er, à le supprimer. Lorsque Ruihière fit connaître ses Anecdotes sur la révolution de Jlussie en 1762 par les^ nombreuses lectures de son manuscrit qu’il faisait dans les sociétés, M. de Sartines, lieutenant de police a. Paris, avait mandé l’auteur et l’avait menacé de la Bastille s’il ne livrait son manuscrit ; Ruihière refusa, mais il dut s’engager à ne le publier qu’après la mort de Catherine II. L’Histoire de l’anarchie de la Pologne, qu’une mort subite de l’auteur l’empêcha de publier, tomba entre les mains d’un agent de la Russie, qui supprima ou altéra une multitude de passages et dénatura complètement l’ouvrage. Déjà on commençait à l’imprimer avec des falsifications inouïes quand le gouvernement de Napoléon 1er donna ordre de suspendre cette frauduleuse entreprise ; il réclama pour la plus parfaite sincérité de l’édition les droits incontestables qu’il avait sur un livre jadis composé par ordre des ministres de Louis XV et par un écrivain pensionné pour ce travail. Ce qui avait paru fut saisi et mis au pilon et Daunou fut chargé de publier le texte authentique de l’histoire de Ruihière.

Malheureusement, on n’a pu retrouver toute la moitié et peut-être même les deux tiers du X11U livre ou de la fin du XI* que le faussaire est parvenu k faire disparaître. Le sujet est triste, mais instructif : c’est l’histoire de l’anarchie de la Pologne et du démembrement de cette république. « Pour se faire une idée de l’anarchie de Pologne, dit un auteur polonais, qu’on se figure ce que fût devenue la France si, après 1814 et 1815, les étrangers, k la suite desquels sont rentrés les Bourbons, y étaient restés cinquante ans, au lieu de trois, en empêchant tout gouvernement régulier, dictant, des lois et fomentant des partis. • Le titre choisi ptimitivement par Ruihière pour son ouvrage avait été : le Despotisme de jlussie et l’anarchie de Pologne. L’auteur déroule un grand tableau ; en Russie, les violences d’un gouvernement despotique, les folies do

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Pierre III, l’astuce et les cruautés de Catherine II ; en Pologne, le désarroi de tous les pouvoirs publics, l’impuissance des diètes et des ministres, les intrigues et l’insolence de l’ambassadeur russe Repnine et enfin les efforts infructueux des patriotes polonais pour rendre la paix et l’ordre, à leur patrie impuissante et inondée da troupes étrangères. Plusieurs morceaux sur les réclamations des dissidents, sur la guerre des Turcs, sur les confédérations polonaises, sont animés par un talent rare. L’écrivain n’est point un compilateur d’anecdotes ; c’est un véritable historien qui sait choisir et classer les incidents, les resserrer, les étendre, les faire ressortir’selon le degré de leur importance. Des liaisons intimes avec les chefs des différents partis polonais, le concours officieux des ministres et des ambassadeurs les mieux instruits des affaires de l’Europe, tous les genres de secours, notes diplomatiques, mémoires particuliers, lettres, etc., avaient mis l’auteur a portée de recueillir des éclaircissements très-curieux et d’assigner quelquefois avec précison les causes longtemps secrètes des événements publics. C’est ainsi qu’en parlant de la correspondance établie durant quinze années entre Louis XV et le comte de Broglie, à l.’insu du ministère français, il explique par quelle intrigue bizarre les agents de la cour de Versailles purent recevoir en même temps des ordres directement opposés, donnés au nom du mémo roi. Il ne jette pus moins de jour sur la conduite des cabinets qui déterminèrent le sort de la Pologne ; il développe des caractères d’une vérité frappante : Catherine, dont l’ambition s’irrite par les voluptés, dévorant h la fois des yeux et la Turquie et la Pologne ; Frédéric, longtemps vainqueur rapide, désormais lent médiateur, n’usant ni ses soldats ni ses trésors ; Marie-Thérèse, faisant prouver par de vieux diplômes les droits qu’elle s’assu re avec l’épée ; son fils, l’empereur Joseph, impatient de régner, de réformer et d’envahir ; près d’eux, le prince de Kaunitz, fondant sa longue réputation sur un traité qui jadis étonna l’Europe en réconciliant la France et l’Autriche. A l’autre bout de l’Europe, les choses présentent un autre aspect : les agitations de Constantinople, l’indécision du divan, l’ineptie politique et militaire des grands vizirs ; le sultan Mustapha, trop bien intentionné pour ne pas sentir, mais trop ignorant pour guérir les maux d’une monarchie théocratique ; le descendant de Gengis-Khan, Crimguéraï, apparaissant tout à coup à la tête de ses Tartares, mais arrêté par une mort soudaine ; au milieu de ces mouvements, la Pologne envahie par les armes russes, déchirée par les factions intérieures, préférant au joug do l’étranger les caprices de sa liberté ombrageuse. On admire encore cette liberté sur des ruines et ses derniers soutiens qui succombent : un vieillard octogénaire, le grand-maréchal de Lithuanie, beau-frère du roi, mais tout entier à la patrie ; un prince de Radziwill, épuisant pour elle son immense fortune, bravant la persécution, la misère et la fuite ; des hommes nouveaux, des parvenus à la gloire ; Pulawski et ses deux fils levant des troupes qui sont quelquefois victorieuses ; deux prélats respectables, Krasinski, évêque de Iltimieniec, organisant avec son frère une confédération puissante, et l’évêque de Cracovie, Gaétan Soltyk, martyr intrépide, dévoué sans espoir à. la cause commune ; enfin Mokronowski, plus brillant qu’eux tous, se trouvant partout où l’intérêt public l’appelle, aux diètes, aux armées, k Versailles, k Berlin, héros des temps chevaleresques et républicain des temps antiques. Comme contraste k ces nobles caractères, il y a ce Poniatowskï, longtemps obscur cit03"en d’un État libre, amant favori d’une princesse étrangère, couronné par elle à force ouverte, lui vendant pour le nom de roi la servitude publique et la sienne, et, malgré son infatigable obéissance, ne parvenant k jouer sur le trône que le rôle d’un courtisan disgracié.

Cette histoire fut entreprise, comme nous l’avons dit, par ordre du gouvernement français (sous l’ancien légime), qui semble avoir voulu rendre hommage aux droits d’un peuple allié qu’il n’avait osé secourir. Ruihière n’en a pas moins rempli sans molle complaisance les devoirs de 1 historien véridiqùe.

«L’auteur, dit un critique, approche quelquefois de Thucydide, dont, il retrace les formes heureuses, et si l’ouvrage entier se soutenait à ce degré de vigueur, après les chefsd’œuvre de Voltaire, d’ailleurs conçus et exécutés dans une manière différente, nous cherchons en vain quelle histoire il serait possible de lui comparer, pour la beauté du plan, pour l’art de mettre en jeu les caractères, pour la chaleur et la grâce du

style. »

Pologuo nncieuno et moderne {TABLEAU J>E LA), par Malte-Brun (Paris, 1807, 1 vol. lii-80 ; 2e édition refondue par L. (Jhodzko, Paris, 1830, 2 vol. in-8o). Il existe, en outre, une édition de Bruxelles (l vol. iu-8* à deux colonnes) mentionnée dans la Pologne illustrée du même auteur, sans indication de date. Le célèbre géographe déclare modestement ■ qu’il faut juger son travail comme on jugerait un premier voyage de découvertes dans ce pays qui, par rapport au reste de l’Europe, était resté presque inconnu. » Et cependant aujourd’hui, quoique plusieurs ouvrages de

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mérite du même genre, comme ceux de Slowaczynski, de Forster, du marquis de Noailles, aient paru sur la Pologne, le Tableau de la Pologne n’en reste pas moins un ouvrage des plus utiles et des plus instructifs sur tout ce qui concerne ce pays jusqu’à son partage. Après une courte notice biographique sur les auteurs qui ont traité de la Pologne, l’ouvrage commence par une description générale de ce pays. Toutes ses anciennes provinces sont ensuite successivement passées en revue ; les institutions politiques, religieuses et judiciaires de l’ancienne Pologne, les poids et les mesures, la population, les finances, l’armée, rien n’est oublié dans le Tableau de la Pologne, qui se termine par un précis de l’histoire de la Pologne depuis les temps les plus reculés jusqu’en 1795. . M. Chodzko a publicV en 1830 une seconde édition de Malte-Brun, qu’il a revue et corrigée ou plutôt, connue il le dit lui-même, refondue ; il est k regretter qu’il ait supprimé l’étude si remarquable sur les Slaves dans l’antiquité, qui forme 50 pages dans la première édition de Malte-Brun et qui est un chef-d’œuvre d’érudition historico-archéologique. L’édition de M. Chodzko comprend : l"> le tableau de la Pologne ; 2" un essai historique sur la législation polonaise ancienne et moderne, par Lelewel ; 3° des fragments sur la littérature ancienne de la Pologne, par Podezaszynski. L’ouvrage tout entier a été traduit, en 1831, en italien à Livouine, en allemand à Leipzig, en anglais à Londres et en Amérique.

Pologne a*nol et son* le roi Jenn Sohleslcl

(histoire db la), par M. de Salvandy [Paris, 1829,3 vol. in-8<> ; ïeédit., Paris, 1844 ; 3e édit., 1 vol. in-12, Paris, 1863, 2 vol. in-8o). Lors delà publication en français d’un certain nombre de lettres inédites de Sobieski par M. Plater en 1827, M. de Salvandy avait été prié de ’ rédiger une notice biographique sur ce roi de Pologne. Au lieu d’une notice, ce fut toute l’histoire du règne de Jean Sobieski, ainsi qu’une rapide esquisse de l’histoire de la Pologne jusqu’à son avènement, qu’on dut à la plume de M, de Salvandy. L’Histoire de la Pologne est divisée en douze livres, précédée d’une exposition et suivie d’un résumé rapide de l’histoire de la Pologne depuis Sobieski jusqu’en 1814. Avant d’occuper le trône de Pologne, Sobieski s’était déjà fait remarquer comme général sous Jean-Casimir et sous Wisniowiecki. C’est au règne de Jean-Casimir que M. de Salvandy commence son histoire proprement dite. Il raconte ce règne fatal à la Pologne où, malgré le patriotisme du roi et des généraux polonais, d’immenses armées étrangères envahirent, ravagèrent et occupèrent pendant longtemps le pays. Sous le règne de Wisniowiecki, Sobieski avait remporté l’éclatante victoire de Choczim sur les Turcs ; plus tard, il fut élevé au trône de Pologne. D’après les historiens polonais, Sobieski, monté sur le trône, fit preuve d’une grande incapacité politique. Il eut la faiblesse d’écouter les conseils funestes de sa femme, Marie d’Arquien, abandonna l’alliance française et fut dupe de l’Autriche, guerroya sans utilité contre les Turcs et conclut avec les Russes le traité ignominieux de Moscou, qui provoqua une telle indignation en Pologne, que le négociateur qui l’avait conclu au nom de Sobieski, Grzymultowski, faillit être massacré, et que la diète refusa de ratifier le traité, ce qui n’empêcha pas la Russie de garder les provinces que Sobieski lui avait cédées. L’opinion des historiens polonais, Lelewel, Niemcewiez, etc., sur Sobieski pourrait être résumée en ces mots : * Bon général, mauvais souverain. » M. de Salvandyest loin d’être aussi sévère à l’égard de Sobieski. D’ailleurs, t quels que soient les torts de la politique de Sobieski, dirons-nous avec son historiographe, it lui reste une renommée impérissable. Sa valeur fut digne des anciens preux et sa science de la guerre fit l’admiration du inonde au temps de Turenne, du prince de Condé et de Charles de Lorraine. La*campagne de 1762 contre les Turcs rappelle ces jours où Napoléon, tombant du trône, illustrait par un combat chaque canton de la Champagne, et certes les prodiges de Kalusz, de Budziacz et de Choczim ne sont pas inférieurs k ceux.de Brienne, de Montmirail et de Champaubert. Quant k la délivrance de Vienne, c’est un des exploits les plus éblouissants de l’histoire, et, le lendemain de cette journée, Sobieski était vraiment le Charles-Martel de la chrétienté. »

La philosophie de l’histoire de M, de Salvandy se trouve résumée dans sa phrase : « L’histoire bien faite serait le tableau des justices du ciel. > C’est ainsi qu’un historien français intitule ses annales ; Gesta Dei per Francas. L’école historique moderne admet, en effet, que les lois qui régissent la société humaine sont invariables et.immuables comme toutes les lois physiques, et que, par conséquent, le règne artificiel de la violence et de l’injustice cède toujours tôt ou tard îa place aux besoins naturels et légitimes du bien-être et de ia liberté nécessaires au développement normal de l’humanité. Mais admettre une justice rendue sur la terre par le ciel ou par les saints n’est aujourd’hui orthodoxe ni en histoire, ni même en théologie.

11 existe une outre histoire de Sobieski en français, celle de l’abbé Coyer (Varsovie, 1761) ; mais elle est loin d’approcher de celle

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de M. de Salvandy, tant sous le rapport du style que sous celui de la valeur historique. Depuis la publication de l’ouvrage de M. de Salvandy, un grand nombre de lettres de Sobieski ont été retrouvées et publiées par les soins du marquis Wielopolski ; aujourd’hui l’Académie de Cracovie annonce la publication de toute une série de lettres et de documents inédits de Sobieski. L’Histoire de la Pologne avant et sous le roi Jean Sabiesfti n’en est pas moins jusqu’ici l’ouvrage, en langue française, le plus complet et le plus intéressant sur l’illustre vainqueur de la bataille do. Vienne.

Pologne historique, littéraire, monumentale et |iiiiare»que (la), rédigée par une société de littérateurs sous la direction de Léonard Chodzko (Paris, 1835-1836, 1 vol. in-4" ; 2« vol. in-4o, 1836-1837). À partir de là, il y a eu dédoublement. La commission des secours de l’émigration polonaise a fait paraître un tome 1U sous le même titre k Paris (1839-1842, l vol. in-4<>). Un autre volume, faisant également suite aux deux premiers, a parti sous ce titre : ia. Pologne historique, littéraire, monumentale et illustrée, rédigée par une société de littérateurs sous la direction de Léonard Chodzko (Paris, 1843,1 vol. in-4o). C’est une sorte d’encyclopédie sur tout ce qui concerne la Pologne. Histoire, littérature, architecture, beaux-arts, mœurs et coutumes de la nation polonaise, tout y forme une mosaïque instructive et agréable. On y trouve tout, depuis des romans jusqu’à des articles . de numismatique, depuis des descriptions do villes et de campagnes de la Pologne moderne jusqu’à des recherches historiques sur la mythologie slave. De nombreuses gravures sur acier ornent chaque volume. On a beaucoup raillé M. Léonard Chodzko d’avoir inséré son propre portrait et même celui de sa femme parmi ceux des héros de la Pologne ; la valeur de l’ouvrage fait pardonner cette fantaisie trop audacieuse,

Pologne (histoire db), par Joachim Lelewel (Paris, 1844, 2 vol. in-8o). M. Lelewel, un des plus éminents historiens polonais de notre siècle, a entrepris, en publiant cet ouvrage, de mettre l’histoire de la Pologne k la portée des enfants ; elle est supposée racontée par un oncle à ses neveux. Comme dans tous ses ouvrages en général, l’auteur y a fait preuve d’une érudition profonde. L’Histoire de Pologne est partagée en deux cent quatre-vingt-deux paragraphes, dont chacun résume un fuit ou une série de faits saillants. Lelewel n’avance rien à la légère, et chaque paragraphe est le fruit de longues et minutieuses recherches ; on a même pu dire avec raison que, quoique censée destinée aux enfants, bien peu d’enfants peuvent lire l’Histoire de M. Lelewel. Les légendes, si amusantes pour les enfants, qui émaillent l’his- ; toire des rois fabuleux de Leszek, de Popiel, ’ du dragon à trois têtes, de la victoire merveilleuse remportée par les Polonais sur

Alexandre le Grand, etc., n’y sont que mentionnées brièvement ; ainsi encore, dans l’ouvrage de M. Lelewel, le plus grand nombre des pages relatives au règne de Henri III en Pologne ne sont pas consacrées, comme dans certaine Histoire populaire de Pologne illustrée, en français, au récit des aventures de M. de Pibrae, poursuivi dans un marais par des paysans. Si M. Lelewel ne réussit pas toujours, dans son Histoire, à amuser les enfants, il fournit une ample moisson à quiconque y cherche k s’instruire sur l’histoire de la Pologne.

L’ouvrage est partagé en quatre parties : la première retrace l’nistoire de la Pologne depuis les temps les plus reculés jusqu’en 1795 ; la seconde la continue jusqu’en 1831 ; « la troisième retrace l’histoire des derniers temps de la république en décadence, dit la préface ; beaucoup de détails étaient ici nécessaires, car on a beaucoup écrit sur cette époque dans les langues étrangères, mais presque rien en polonais, la censure s’étaht toujours opposée k ce qu’on profitât des documents qui existent ; < la quatrième partie, enfin, consiste dans dos considérations sur l’état politique de l’ancienne Pologne et sur l’histoire de son peuple ; les institutions polonaises, si différentes de celles des autres États européens, y sont l’objet d’une étude toute particulière. Lelewel, comme Hallam, Mably, Rousseau, Ruihière, Mickiewicz, de Nouilles et la plupart des auteurs qui ont approfondi les institutions polonaises, critique « l’hypothèse qui fait de la Pologne un État féodal et l’assimile le plus faussement au système des pays occidentaux, d’où résultent bien d’autres hypothèses qui égarent l’esprit observateur. > Dès les premières pages de l’Histoire de Pologne, on voit que Lelewel respecte plus la vérité historique que les légendes orthodoxes forgées par de pieux faussaires. Il prend rang au milieu de ces historiens qui ont dégage la vérité des ténèbres et des mensonges dont les chroniqueurs du moyen âge l’ont si souvent entourée.

Pologne (HISTOIRE POPULAIRE DB), par

Adam Mickiewicz (Paris, 1867, 1 vol. in-18). M. Adam Mickiewicz, un des plus célèbres poètes de ta Pologne, professeur de langues et de littératures slaves au Collège de France de 1840 k 1844, avait à diverses reprises traité dans sou cours l’histoire de sa nation. Un extrait, fait sous ses yeux et sur ses indications, fut ensuite revu par lui-même. Son