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sants qui gênent le progrès social, qu eiles s’attaquent. Il faut, pour rédiger ces sortes de journaux, non-seulement beaucoup d’humour, d’esprit et de verve, mais du bon sens, de la philosophie et, sous une apparence légère, le désir de servir les hommes dans les droites voies de la vraie civilisation.

— Bibliogr. Sur la liberté de la presse, par Mirabeau (1788, in-8°) ; Discours sur la liberté de la presse, par Péthion (1791, in-8°) ; De la liberté indéfinie de la presse, par Lanthonas (1791, io-8">) ; De l’opposition et de la liberté de la presse, par Thuriot (an Vil, iu-8") ; De la liberté de la presse considérée sous le rapport de l’intérêt du gouvernement, par Benjamin Constant (1814, in-8°) ; De la législation anglaise sur la liberté de la presse et les journaux, par de Montveran (1817, in-8°) : Sur la liberté de la presse, par M. de Bonaid (1827, in-8<>) ; De la presse, par Chateaubriaud (1827, in-8°) ; Essai historique sur la liberté d’écrire chez les anciens et au moyen âge, par Gabr. Pergnot (1834, in-8°j ; De la liberté de la presse avant Louis XIV, par Ch. Nodier (1834, in-8°) ; De l’état réel de la presse et des pamphlets depuis Françoisjusqu’à Louis 'XIY, pur C. Leber (1834, in-8°) ; De la presse périodique au xixe siècle, par E. de Girardin (1837, in-S<>) ; De ta liberté de la presse et du journalisme, par E. de Girardin (1844, in-8°J ; Dictionnaire pratique de la presse, de l’imprimerie et de la librairie, par J. Bories et Bounassies (1847, 2 vol. in-S°) ; Code manuel de la presse, par Dubois et Ch. Jacob (1851, in-8°) ; Histoire politique et littéraire de la presse en France, par Eug. Hatin (1859-1861, sfvol. in-18) ; Martyrologe de la presse, par A. Germain (1861, in-18) ; Bibliographie de la presse périodique française, par Eug. Hatin (1866, in-8°).

Pn»it (sua LA liberté DE la), par Mirabeau (1788, in-8<>). Cet ouvrage est imité plutôt que tcaduit de Milton. L auteur y donne la substance des principaux arguments en faveur de la liberté de la presse et réfute les préventions que nourrissent contre elle les timides et les intéressés.

■ Une foule d’honnêtes gens, dit-il, oubliant que le sort des hommes est d’avoir à choisir entre les inconvénients, s’alarment sincèrement de la liberté de la presse, grâce à la prévention qu’on a su leur donner contre les écrivains qui ont paru les apôtres intéressés de cette liberté, parce que quelquefois ils en ont abusé. La liberté de la presse, disent-ils, enfante de mauvais livres ; donc il faut la restreindre. Tel est l’argument favori de ceux qu’on appelle les honnêtes gens, et dont en effet la morale privée, la probité de détail est très-estimable, mais qui, faute de généraliser leurs idées et de saisir l’ensemble du système social, sont vraiment de dangereux citoyens et les plus funestes ennemis peut-être de l’amélioration des choses humaines. ■ Ce qu’il faut mettre sous les yeux de ces honnêtes gens, c’est ce décret du 5 décembre 1688, par lequel le parlement déclare que ■ la liberté de la presse est le garant-unique et sacré de tous nos droits, que la liberté de la presse est la seule ressource prompte et certaine des gens de bien contre les méchants. >

Un attentat contre elle est pour le moins aussi grave.qu’un attentat contre la vie d’un citoyen ; car, Milton l’a dit, « tuer un-homme, c’est détruire une créature raisonnable, mais étouffer un bon livre, c’est tuer la raison elle-même. On n’a pas le droit d’attenter à lu vie intellectuelle dans les livres qui en sont tes dépositaires, car c’est une espèce d’homicide, quelquefois un martyre, et toujours un vrai massacre, si la proscription s’étend sur la liberté de la presse en général. • Qu’on ne l’oublie pas, la servitude intellectuelle prépare la servitude politique.

Mais, objectera-t-on, avec la liberté de la presse, l’esprit peut être bientôt infecté du venin de l’erreur. Alors, logiquement, il faudrait par la même considération anéantir toutes les connaissances humaines, ne plus discuter sur aucune doctrine, sur aucun point de religion et supprimer même les livres sacrés, car souvent on y trouve des blasphèmes, les plaisirs charnels des méchants y sont décrits sans beaucoup de ménagements, les hommes les plus saints y murmurent quelquefois contre la Providence, et il s’y rencontre une foule de passages si ambigus que les papistes eu ont prohibé la lecture. Les anciens n’ont pas connu ce système de prohibition ; c’est une invention de la politique moderne, et de la mauvaise politique. • Les peines et les prohibitions, dit Mirabeau, sont a la portée des esprit* les plus bornés ; on peut les regarder coirme le pont aux ânes des politiques. Ils les considèrent comme une manière expéditive de remédier à tout. Cependant une longue expérience devrait leur avoir appris qu’elles ne remédient à rien. » D’ailleurs, les prohibitions contre la presse sont illogiques. Tout ce que nous voyons ou ce que nous entendons peut s’appeler proprement notre livre vivant et produit sur nous au moins autant d’effet que les écrits. Il est donc évident que, si l’on ne peut supprimer que les livres, cette prohibition n’atteindra pas le but qu’elle se propose. En outre, si l’auteur ne peut se présenter au public que comme un mineur accompagné de celui qui le tient sous sa tutelle, s’il faut entiu que la signature du censeur lui serve de caution et

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garantisse au public qu’il n’est ni corrupteur, ni imbécile, c est avilir, c’est "dégrader à la fois l’auteur et le livre et flétrir en quelque sorte la dignité des lettres. Il est impossible de comprendre par quel miracle on pourrait renfermer dans vingt têtes de censeurs, quelque bonnes qu’on les suppose, le jugement, ] esprit et l’érudition de tout un peuple. Encore moins conçoit-on qu’elles eu aient la surintendance, que toutes les idées passent à leur crible et que cette monnaie ne puisse avoir de cours si elle n’est pas frappée à leur coin. L’intelligence et la vérité ne sont pas des denrées propres au monopole, ni dont on doive soumettre le commerce à des règlements particuliers. « Eh quoi l’s’écrie Mirabeau ironiquement, prétend-on les emmaganiser et les marquer comme nos draps et nos laines ? Quelle honteuse servitude s’il faut que vingt censeurs taillent toutes les plumes dont nous voulons nous servir I >

A moins que le gouvernement ne veuille conduire un troupeau d’aveugles, qu’il nous ôte toutes les libertés, mais qu’il nous laisse au moins celle de parier et d’écrire selon notre conscience. C’est d’ailleurs faire injure à la vérité que de croire qu’elle peut être déracinée par le vent des doctrines contraires. Qu’on leur livre le champ clos pour en venir aux mains, et on verra de quel côLé se rangera la victoire. La liberté n’a jamais le dessous quand elle est attaquée à découvert et qu’il lui est permis de se défendre- Laisser réfuter librement l’erreur après l’avoir laissée su produire librement, c’est le plus sûr moyen de la détruire. Lorsqu’un homme a médité sa cause, fourbi ses armes pour l’attaque et la défense, il appelle son adversaire dans la plaine et lui olire l’avantage du lieu, du vent et du soleil. Se cacher, tendre des embûches, s’établir sur le pont étroit de la censure, où l’agresseur est nécessairement obligé de passât, quoique toutes ces précautions puissent parfois s’accorder avec la valeur guerrière, c’est ordinairement un signe de faiblesse et de peur dans la guerre de la vérité. Qui peut douter de sa force éternelle et invincible ? Qu’a-t-elle besoin pour triompher de police et de prohibition ? Ne sont-ce pas là les armes favorites de l’erreur ? Accordez a la vérité un plus libre champ sous-quelque forme qu’elle se présente et ne vous avisez pas de l’enchaîner, car elle cesserait de parler son langage, et il est utile de l’entendre. Les erreurs sont presque aussi communes dans les bons gouvernements que dans les mauvais ; car quel est le ministre dont la religion ne puisse être surprise, surtout si l’on met des entraves à la liberté de la presse ? Mais redresser proinptement, éclairé par elle, les erreurs dans lesquelles on est tombé, préférer au triste plaisir d’enchaîner les hommes celui de les instruire, faire avec eux volontiers échange de lumières, c’est le devoir et le propre d’un gouvernement honnête et fort.

« Que lu première des lois, s’écrie en terminant Mirabeau, consacre à jamais la liberté de lu presse, la liberté la plus inviolable, la plus illimitée. Voilà le vrai drapeau de ralliement pour toute la nation. •

Prci.o (DE LA LIBERTÉ DE La) cooiidéree « ou» lo rapport d« l’iucérô* du gouvernemont, par Benjamin Constant (1814, in-go). B. Constant se déclare pour la liberté de ta presse et voit pour le gouvernement lui-même plus d’inconvénient à tout censurer qu’à tout permettre. La prohibition n’aboutit qu’à augmenter la vogue d’un ouvrage et à pousser l’écrivain hors des bornes fixées par la convenance. En en usant, le gouvernement se

fait un mal que le succès de ses rigueurs aggrave. De plus, il se rend pour ainsi dire solidaire de tout ce que les écrivains publient par l’intervention de sa police dans le domaine de la pensée. Quelques précautions que prenne l’autorité, elle ne peut avoir l’œil et la main partout, et ces précautions ne font, chez un peuple malin et spirituel, qu’inviter la dextérité à les surmonter. Si les journaux sont sous l’influence de la police, déconcerter la police par quelques phrases qu’elle ne saisit pas tout de suite sera une preuve d’esprit. Or, qui est-ce qui se refuserait parmi nous à donner une preuve d’esprit, s’il n’y a pas peine de mort ? La censure des journaux t’ait ce premier mal qu’elle donne plus d’influence à ce qu’ils peuvent dire de faux et de déplacé. Ensuite, elle nécessite dans l’administration un mouvement inquiet et minutieux, qui n’est pas conforme à sa dignité.

Il faut laisser à chacun le droit de publier sa pensée sous sa responsabilité, même dans" l’intérêt du gouvernement attaqué. • Quel est, en effet, dit B. Constant à la fin de son livre, le résultat de toutes les atteintes portées à la liberté des écrits ? D’exaspérer les écrivains qui ont le sentiment de 1 indépendance, inséparable du talent, de les forcer à recourir à des allusions qui deviennent araères, parce qu’elles sont indirectes, de nécessiter la circulation de productions clandestines et d’autant plus dangereuses, d’alimenter l’avidité du public pour les anecdotes, les personnalités, les principes séditieux, de donner à la calomnie l’air toujours intéressam du courage, enfin d’attacher une importance excessive aux ouvrages qui sont défendus. On confond toujours tes libelles avec la liberté de la presse, et c’est l’esclavage de la presse qui produit les libelles et qui assure leur sue PRES

ces. Ce sont ces précautions minutieuses contre les écrits, comme contre des phalanges ennemies, ce sont ces précautions qui, en leur attribuant une influence imaginaire, grossissent leur, influence réelle. Lorsque les hommes voient des codes entiers de lois prohibitives et des armées d’inquisiteurs, ils doivent supposer bien redoutables les attaques ainsi repoussées. Puisqu’on se donne tant de peine pour écarter de nous ces écrits, doivent-ils se dire, l’impression qu’ils produiraient serait bien protonde ; ils portent sans doute avec eux une évidence irrésistible. »

Preu« (sur la liberté db la), par M. de Bonaid (1827-, in-8°). Le théoricien de l’absolutisme monarchique a ressassé dans ce livre toutes les vieilleries que l’on débite encore de temps en temps contre la presse. Ses arguments peuvent se réduire à un seul : la liberté de la presse présente quelques inconvénients ; donc c’est une chose détestable" ; l’usage amène l’abus, supprimons l’usage. C’est là-dessus qu’ont toujours vécu ceux qui ne peuvent souffrir une presse libre, et il faut bien les excuser de répéter toujours le même argument niais, puisqu’il n’y en a pas d’autre.

M. de Bonaid pose en principe que la censure préalable de tout livre et de-tout journal est une chose excellente ; non pas seulement pour le publie à qui ainsi ne seront offerts que des mets de choix, des morceaux délicats, mais pour l’auteur lui-même, que l’on empêche de se compromettre vis-à-vis de ses lecteurs. Il serait bien impertinent de se croire plus d’esprit qu’un cénacle composé d’hommes aussi éminents que les censeurs ; on lui rend service en supprimant son livre, qui ne peut être que mauvais s’il a déplu à des gens d’un goût si éprouvé. « Sur tous les objets de littérature proprement dite ou de sciences physiques, permis à tout le inonde d’écrire à ses risques et périls, et les systèmes le plus universellement abandonnés, les théories les plus décriées peuvent être présentées de nouveau, parce qu’il ne peut en résulter aucun désordre dans le inonde moral ni dans le monde matériel. Mais dans les matières qui tiennent à l’ordre public, à la religion, au gouvernement, à la morale, aux mœurs, il ne serait pas raisonnable d’exiger du gouvernement qu’il se reposât uniquement sur la sagesse et la modestie des écrivains, tous beaucoup trop prévenus en faveur de leur esprit et de leurs œuvres. Il faut au public des garanties publiques, et ces garanties, il les trouve dans la censure préalable et légale des écrits. •

La liberté de la presse offrirait sans doute quelques avantages, mais ils sont loin de compenser les inconvénients, et le droit de tout dire.de tout écrire, est incompatible avec la stabilité des gouvernements. « Il n’y a pas, dit-il, d’homme d’État en Europe qui croie possible, avec la liberté de la presse, de gouverner une nation comme ia notre, vive, mobile, légère, avide de nouveautés et trop éprise des charmes de l’esprit. • On répète sans cesse que la liberté de la presse sert au gouvernement à obtenir des renseignements exacts, soit sur la situation de l’opinion à l’intérieur, soit, à l’extérieur, sur l’état des autres puissances ; M. de Uoimlil affinité qu’on se trompe ; la presse ne sert à rien de tout cela. La presse libre ne peut plus rien apprendre aux gouvernements, dit-il, sur les dangers qui les menacent du dehors, « aujourd’hui que les États ont tous, les uns chez les autres, d’honnêtes espions accrédités sous le nom de ministres on d’ambassadeurs. » Quant aux dangers intérieurs, les Chambres les connaissent mieux que les écrivains et, par conséquent, rendent inutile la mission que ces derniers s’attribuent. La liberté de la presse devient elle-même un danger, car, en critiquant les lois, elle leur ôte leur force morale, sinon leur effet matériel. Enfin, la prohibition est nécessaire pour q’ue le peuple, s’il a à se plaindre du roi, ne lui cause pas la contrariété de le lui faire savoir. « La presse a beau être libre, elle n’empêche rien et no saurait prévenir les maux sans nombre qui travaillent les États ; elle déconsidère trop souvent, au contraire, les gouvernements sans avantage pour les peuples et aigrit les peuples, qu’elle rend impossibles à gouverner. ■■

À quoi bon, d’ailleurs, la liberté de la presse ? Quelle illusion se font ceux qui croient à son utilité dans le développement progressif de l’humanité 1 ■ Comment, dit M. de Bonaid, la société aurait-elle pu naître, grandir, se civiliser s’il lui eut manqué la connaissance d’une seule vérité nécessaire à son développement ? Non, nous n’avons plus rien à apprendre sur les principes de la société. Et tous ces grands esprits qui ont paru ou peuvent paraître encore révélateurs de quelque nouvelle doctrine ne peuvent être que de grands esprits fufox, comme les appelle Bossuet, des apôtres d’erreur et de mensonge et qui ne peuvent, par conséquent, que porter le trouble et le désordre dans la société, l’erreur dans les lois, la licence dans les mœurs et verser enfin sur nous tous les maux dont nous gémissons et dont nous cherchons vainement le remède dans les opinions humaines.- !

Preaae (db la), par Chateaubriand (1828, broch. in-8°). Cet opuscule n’est que le texte, revu et corrigé, d’un éloquent discours prononcé par Chateaubriand à la Chambre des

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pairs sur la liberté de la presse : il réfute victorieusement les théories absurdesde M. de Bonaid et reprend, d’une façon neuve et saisissante, les arguments de Mirabeau. L’auteur commence par réclamer la gloire d’avoir toujours défendu la liberté de la presse et la titre d’un de ses fondateurs : « La liberté de la presse a été presque l’unique affaire de ma vie politique ; j’y m sacrifié tout ce que je pouvais y sacrifier : temps, travail ou repos-J’ai toujours considéré cette liberté comme une constitution entière ; les infractions à la charte m’ont paru peu de chose tant que nous conservions la liberté d’écrire. Si la charte était perdue, la liberté de la presse la retrouverait et nous la rendrait ; si la censure existait, c’est en vain qu’il y aurait une charte. C’est par la liberté de la presse que les droits des citoyens sont conservés, que justice est fuite à chacun selon son mérite ; c’est la liberté de la presse, quoi qu’on en puisse dire, qui est le plus ferme appui du trône et de 1 autel. » En effet, point de gouvernement représentatif sans la liberté de la presse. Le gouvernement représentatif s’éclaire par l’opinion publique et est fondé sur elle. Ses Chambres ne peuvent connaître cette opinion, si cette opinion n’a point d’organes. Dans un gouvernement reprè%eniatif il y a deux tribunaux : celui des Chambres, où les intérêts particuliers de la nation sont jugés ; celui de la nation elle-même, qui juge en dehors des deux Chtimbres. Dans les discussions qui s’élèvent nécessairement entre te ministère et les Chambres, comment le public connattra-t-il la vérité si les journaux sont sous la censure du ministère, c est-à-dire sous l’influence d’une des parties intéressées ? Comment le ministère et les Chambres connaîtrontils l’opinion publique, qui fuit la-volonté générale, si cette opinion ne peut librement s’expliquer ?

Qu’arrive-t-il lorsque les journaux sont, par le moyen de la censure, entre les mains du ministère ? Les ministres font admirer dans ces feuilles qui leur appartiennent tout ce qu’ils ont dit, tout ce qu’a dit, tout ce qu’a fait leur parti. Si, dans les journaux dont ils’ ne disposent pas, ils ne peuvent obtenir le même résultat, ils forcent les rédacteurs au silence et le public prend parti pour les opprimés. Mais la liberté de la presse a des dangers.

« Qui l’ignore ? répond Chateaubriand. Aussi cette liberté ne peut exister qu’ayant derrière elle une loi torte, qui prévienne la prévarication par la ruine, la calomnie par l’infamie, les écrits séditieux par lu prison et l’exil. C’est aux risques et périls de l’écrivain quejedemande pour lui la liberté de la presse, sans laquelle ta constitution n’est qu’un jeu, Sœur de la liberté individuelle, la liberté de la presse défend celle-ci, taudis que ses forces sont enchaînées. »’

Mais les ministres seront inquiétés par la liberté de la presse ; chacun leur donnera son avis. Entre les louanges, les conseils et les outrages, il n’y aura pas moyen de gouverner.

— Les ministres habiles ne craignent point la liberté de la presse : on les attaque et ils survivent. Sans doute, ils auront contre eux des journaux, mais ils en auront aussi pour eux : ils seront attaqués et défendus. Que les ministres se montrent hommes de talent ; qu’ils sachent mettre de leur parti le public et la majorité des Chambres, et les bons écrivains entreront dans leurs rangs, et les journaux les mieux faits et les plus répandus les soutiendront. Ils seront cent fois plus forts, car ils marcheront avec l’opinion générale. < Enfin, tout n’est pas fait dans un gouvernement pour les ministres : il faut vouloir ce qui est de la nature des institutions sous lesquelles on vit, et, encore une fois, il n’y a pas de liberté constitutionnelle sans liberté de la presse. L’État peut être troublé, comme dit M. de Bonaid, par ce que peuvent dire les journaux ; mais il peut périr par ce qu’ils ne disent pas. ■

Vouloir supprimer la liberté de la presse décèle une horreur profonde des lumières, de la raison et de la liberté. Cette prétention est en opposition directe aveu les mœurs, les progrès de la civilisation, l’esprit du temps et la franchise du caractère national. Elle respire la haine contre i’intelligeiice humaine et tend à faire considérer la pensée comme un mal, comme» une plaie, comme un fléau.

« On sent que les partisans de cette opinion anéantiraient l’imprimerie s’ils le pouvaient, qu’ils briseruient les presses, dresseraient des gibets^et élèveraient des bûchers pour les écrivains. «

Pre»e on France (HISTOIRE POLITIQUE ET littéraire db la), par M. Eug. Hatin (1859-1861, S vol. in-18). L’auteur avait d’abord ébauché le plan de ce grand ouvrage dans un petit volume intitulé Histoire du journal en France (1846, in-18). Engagé par le succès à pénétrer plus profondément dans un sujet qui attire 1 attention et que, cependant, personne n’avait traité d’une façon complète, il l’a repris et développé de manière à présenter l’enseipble le plus satisfaisant. Ce travail offrait de grandes difficultés, ce qui fait qu’on avait jusqu’ici reculé devant la tâche. U y a un siècle et demi, Bayle considérait déjà une pareille entreprise comme très-lourde ; il se demandait qui voudrait se charger d’énumérer le nombre prodigieux de" gazettes et de mercures qui se publiaient eu