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est interdit à un art de rester stationnaire, sous peine da déchéance, et le puff est un art, l’art de duper les gens naïfs avec de grands mots. Le mot est anglais et nous l’avons adopté faute de mieux, mais la chose est universelle et nous la connaissions avant les Anglais et les Américains, qui passent pour nos maîtres en ce genre de hâblerie. Il serait par trop simple aujourd’hui, en Amérique, d’anuoucer que tel grand artiste français se fera entendre tel jour dans un concert ; il faut au préalable chauffer l’enthousiasme et surexciter l’attention. On publiera d’abord les clauses du traité : il s agit toujours de dollars par milliers ; quand même l’artiste serait profondément inconnu, un Américain se persuadera difficilement qu’un homme qui vaut tant de dollars soit un homme comme un autre ; puis on imprime sa biographie, on affiche son portrait, on répand des anecdotes, on tient le public au courant de ses moindres faits et gestes. Enfin le grand homme est embarqué, on va le voir, l’entendre ; il ne s’agit plus que de compter les jours. Quand il n’est plus question que de lui, qu’il est le héros du moment, cracl survient une dépêche sinistre : le vaisseau a fait naufrage 1 Quel deuil t quelle perte pour l’art t 11 pleut des articles nécrologiques. Une seconde dépèche annonce alors que tout espoir n’est peut-être pas perdu : un naufragé, seul survivant du désastre, a été aperçu obstinément accroché à une épave. Si c’était lui ? î Les décrets de la Providence sont insondables !... C’est lui 1 Des transparents de 10 pieds de haut l’annoncent dans toute la ville ; on illumine, la foule se presse aux guichets du théâtre, les dollars pleuvent et l’artiste est porté en triomphe. Voilà le puff. C’est à faire avaler de pareilles bourdes à ses compatriotes que Barnum a gagné quelques millions.

D’Amérique, le puff a pénétré un peu purtout, mais en prenant des formes moins épaisses ; chez nous, on l’a appliqué avec succès à la réclame commerciale et même à la réclame littéraire. Un journal raconte un voyage en Chine ; rien n’y manque : laques, fleurs en nacre de perle, porcelaines, paravents, lanternes rouges, éventails, magots, mandarins à boutons de cristal et sièges en bambou ; suit l’adresse du magasin du boulevard où l’on peut faire ce voyage sans sortir de Paris. Une autre fois, il s’agit de papiers de famille perdus que le lecteur suit avec anxiété entre les mains de divers possesseurs ; les guerres, les invasions, les incendies surviennent : ils échappent, grâce à des hasards miraculeux, vingt fois ils courent risque d’être détruits, mais toujours une invisible main les protège. Enfin ils tombent entre des mains amies et, ce qu’il y a de bon dans l’affaire, c’est qu’ils contiennent tout au long une recette jusqu’à présent introuvable, celle de l’huile dout les Gauloises, nos aïeules, se servaient pour faire pousser leurs cheveux qui, comme on sait, étaient les plus beaux du monde.

Le puff littéraire prend volontiers la forme de l’anecdote : ;

■ Hier un bien fâcheux accident eut lieu, rue..., devant la librairie de MM.X... ; ces messieurs venaient de mettre en vente le Centaure, dernier et délicieux roman du célèbre Folempin ; la foule se pressait compacte devant le magasin ; Mme la marquise de Vieuport y avait fait arrêter son équipage et avait ordonné à son valet de pied d’aller lui acheter le charmant volume. Le valet ne pouvait percer la masse des chalands, et la sémillante et vive marquise, impatientée et croyant qu’on aurait plus d’égards pour son sexe et son rang, fit abaisser le marchepied et descendit pour faire l’emplette si ardemment désirée ; mais la foule, qui en effet s’ouvrit devant elle, s’étant brusquement refermée, une funeste pression s’ensuivit, durant laquelle Mme la marquise eut le bras cassé ; ce matin son état était alarmant, •

< Ce s’oir on disait au café de Foy que, le comte Ch... et le baron Fui... s’étant présentés ensemble chez le libraire P... pour y acheter les Chauffeurs, ouvrage de notre illustre Barbanchu, ils n’y avaient plus trouvé qu’un seul exemplaire de ce beau livre mis en vente depuis quelques jours. Tous deux ayant voulu s’emparer de l’unique volume, après quelques mots très-vifs échangés, une rencontre s’en était suivie, dans laquelle AL le comte Ch... avait reçu une balle dans le côté. La blessure est grave, à ce qu’on assure, et l’état du comte est très-alarmant. «Après la lecture de ces deux funestes accidents, quel est le bon bourgeois qui ne s’empressera pas de se procurer des ouvrages pour lesquels des marquises se font casser le bras et des comtes se font percer le flanc ? ’

Le puff littéraire se glisse parfois sournoisement dans le feuilleton :

« La princesse, agitée par les poignantes émotions de la journée, s était retirée dans sa chambre à coucher, puis, s’étant jetée sur une ottomane, elle y cherchait en vain le repos qui la fuyait ; son âme était brisée par la douleur, et son corps affaissé sous cette prostration morale qui suit toujours les peines du cœur ; sa main distraite saisit machinalement un livre posé sur sa cheminée ; elle l’ouvrit, puis porta sur la première page un regard vague et indécis, qui n’était ni l’envie de voir ni le désir de lire ; cependant elle lut : bientôt son œil s’alluma au feu d’un intérêt excité par une exposition pleine de charme, par

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on style rempli de magie, par des situations émouvantes, par des caractères neufs et parfaitement soutenus ; si bien qu’oubliant ses angoisses déchirantes et l’horreur de sa situation, la princesse fascinée l’ut enlevée à ses tourments au moyen du ravissant roman de la Sunamite de M. un tel. ■

Après avoir lu ces lignes décevantes, il est impossible que le beau sexe tout entier ne se procure point le livre phénomène qui calme a la minute les fiévreuses agitations et les peines déchirantes ; princesses, duchesses, marquises, comtesses doivent acheter ces deux miraculeux volumes, sinon comme chefd’œuvre littéraire, du moins comme spécifique pour apaiser leurs nerfs surexcités ; elles le peuvent d’autant mieux que l’adresse précise du fameux topique se trouve au bus de la page, ainsi que le prix des deux récipients typographiques qui le contiennent.

PUFFIN s. m. (pu-fain). Ornîth. Division du genre pétrel.

— Encycl. Le genre puffin a le bec aussi long ou plus long que la tête, grêle, droit, déprimé à sa base, très-comprimé à son extrémité et crochu ; la mandibule supérieure est pointue et courbée en bas, comme la mandibule supérieure ; les narines sont basâtes, ovales et s’ouvrent en deux tubes distincts ; les pieds et les ailes sont les mêmes que chez les pétrels proprement dits. Le puffin cendré, dit vulgairement pétrel puffin, est répandu sur la Méditerranée. Sa taille est celle d’un corbeau ; il est cendré en dessus, blanchâtre en dessous-, les ailes et la queue sont noirâtres. On aperçoit cet oiseau à l’approche des tempêtes, et pendant le crépuscule du matin et du soir. Il niche en Corse et pond un seul œuf. Le puffin des Anglais est une espèce que l’on a confondue longtemps avec le puffin cendré. Sa taille est celle de la bécasse ; le plumage est noir en dessus, blanc en dessous. Il habite les régions septentrionales de notre hémisphère. Les habitants du nord de l’Écosse et des lies voisines le saient pour leurs provisions d’hiver. Le puffin brun est long de 0™,75. Son plumage est brun, sans taches ; la gorge est blanche, le bec jaune et les pieds noirâtres. Cette espèce habite le Cap de BonneEspérance.

POFFINURE s. m. (pu-fl-nu-re — de puffin, et du gr. aura, queue). Ornith. Syn. de pélécanoïde, division du genre pétrel.

— Encycl. Les puffinures ou haladromes ont pour caractères : un bec droit, crochu à l’extrémité, composé de plusieurs pièces, plus long que la tête, garni de plumes depuis la base jusqu’aux narines, qui sont tournées en haut et offrent la forme a’un cœur ; les deux conduits nasaux séparés par une cloison ; une poche dilatable analogue à celle des pélicans ; la deuxième rémige la plus longue ; la queue petite, dépassant peu les ailes ; les pieds palmés, courts, dépourvus de pouce et d’ongle postérieur. Ces oiseaux se rapprochent des pétrels pur la forme du bec et des pieds, et des grèbes par leur port et leurs habitudes plongeuses. Le puffinure pëlécanoide a le plumage brun noir en dessus, blanc en dessous ; il habite les océans Pacifique et Austral. Le puffinure de Garnot est d’un brun noirâtre glacé de bleu en dessus, blanc en dessous ; il habite les mers australes.

PUFF1STE s. m. (pou-fi-ste — rad. puff). Faiseur de puffs, de réclames menteuses ; charlatan : On sait que le puffiste anglais dépasse tout ce qu’ont rêcë de plus hardi nos fabricants d’annonces et de réclames. (J. Lecomte.) L’Amérique est la patrie du puffistb Barnum. (O. Comettant.)

— Encycl. Ce n’est guère qu’en Amérique qu’il se trouve des puffisles de profession, des gens dout c’est l’industrie spéciale d’inventer de nouveaux sujets de curiosité, de great attraction, comme ils disent ; d’être à la piste de ce qui peut tenir l’attention en éveil ut de trouver dans la moindre des choses, pourvu qu’elle soit habilement et surtout bruyamment présentée, un moyen de faire fortune. Partout ailleurs, le puff n’est qu’un accident ; en Amérique, c’est une industrie ; elle a eu son héros, Barnum.

A considérer les résultats pécuniaires auxquels cette singulière profession aboutit souvent, on croirait volontiers que le puffiste américain est un homme d’une habileté consommée, d’une imagination exubérante. Il n’en est rien ; on peut même dire que l’iinugination leur fait presque entièrement défaut, tant les bourdes sur lesquelles ils spéculent sont grossières et mal agencées. Montrer un squelette de singe auquel on a vissé une queue de poisson et faire crier par les villes qu’on possède une des sirènes capturées par le Carthaginois Hannon, durant son fameux périple ; annoncer que l’on est en mesure de faire voir un nain de 5 pieds 6 pouces, ce qui est la taille la plus extraordinaire qu’un nain ait jamais atteinte ; arracheràune vieille négresse idiote ce qu’il lui reste de dents et la donner comme accomplissant eu ce moment sa oent-soixanteet-unième année, voilà d’ordinaire à quels prodiges d’imagination se montent ces étonnants artistes. Barnum ne s’est jamais mis en de plus grands frais, et tout le monde y a été pris, non-seulement les Américains, mais les Kuropéens et même les Français. Son Tom Pouce, qu’il nous a fait avaler tout comme aux gobe-mouches de l’autre côté de l’Océan, était un enfant de sept ans, tout pareil aux

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autres enfants de son âge ; le tour de force de Barnum a été de dire qu’il avait quinze ans, et de le faire croire. Tout l’art du puffiste est dans la mise en scène. Quand Barnum exhibait sa vieille négresse, qu’il avait baptisée Nourrice de Washington, il eut l’adresse de simuler, au moment où l’attention faiblissait, toutes sortes de contestations et de démêlés judiciaires. Il ferma- sa boutique et fit répandre le bruit qu’on l’attaquait comme suspect de supercherie : sa nourrice était une momie dont un mécanisme d’automate faisait mouvoir les yeux et les mâchoires. Grand émoi dans le public ; Barnum se montre fort inquiet des résultats de l’enquête ; il y a des consultations de médecins, des expertises, des rapports ; la presse n’est occupée qu’à enregistrer les bruits les plus contradictoires. Enfin les consultations sont publiées et il en résulte que la négresse est bien vivante et qu’elle a pour le inoins cent soixante ans ; la foule revient à flots chez Barnum. Tout cela s’était rédigé dans son-cabinet.

À tout prendre, c’est l’enfance de l’art et les Mesmer, les Cagliostro étaient des dupeurs autrement habiles. « Quelle distance infranchissable, dit M. Montégut, sépare cespuffistes américains des célèbres menteurs de tous les siècles t Quelle pauvre figure ils font à côté de ces géants du charlatanisme qui, au dernier siècle, furent pendant un moment les rois de l’Europe et tinrent dans l’étonnement, la terreur et l’espérance les souverains et les aristocraties 1 Casanova de Seingalt, Cagliostro, Mesmer étaient des héros, des poètes et des prophètes ; ils vivaient dans 1 élément du merveilleux et marchaient entourés d’un cortège d’esprits célestes et de génies infernaux, lis connaissaient l’art de disposer les chiffres en pyramides, le secret de faire de l’or, la poudre de projection, l’élixir de longue vie. Leur science était infinie. Casa—novu travaillait à faire des homunculi ; Cagliostro montrait à la cour de France la future Révolution française dans le transparent cristal d’unécarafe ; Mesmer eut la gloire de mettre en convulsions la moitié de Paris. Voilà de grands esprits et d’une éducation hors ligne, et des gens de bonne lignée, s’il vous plate, qui descendaient du dernier empereur de Trébizonde ou qui avaient étudié sous le sage AlthotasE >

PUGANZ, ville de l’empire d’Autriche, dans la Hongrie, comitat de Houth, à 17 kilom. S.-O. de Chemnitz ; 3,205 hab. Mines d’or et d’argent actuellement peu importantes.

PUGATSCHEFF, imposteur russe. V. PoHGATCHEFF.

PUGET-THÉNIERS, ville de France (Alpes-Maritimes), ch.-l. d’arrond. et de cant., sur la rive gauche du Yar, à 29 kilom. N. de Nice ; pop. aggl., 1,180 hab. — pop. tôt., l,282 hab. L’arrondissement comprend 6 cant., 48 comm. et 23,400 hab. Manufactures de draps, tanneries, culture, du mûrier et éducation de vers à soie. On y voit les ruines d’un ancien château fort et une vieille église bâtie par les templiers.

PUGET-V1LLB (lis), bourg et commune de France (Vur), cant. de Cuers, arrond. et à 29 kilom. N.-E. de Toulon ; pop. aggl., 1,637 hab. — pop. tôt., 2,296 hab. Sur une colline voisine, tour carrée qui domine le bourg. C’est sur le territoire de cette commune qu’éclata, au mois d’août 1863, l’incendie qui dévora, sur une longueur de 16 kilom., les belles forêts de supins et de chênes-liéges de l’arrondissement de Toulon.

PCGET (Pierre), peintre, sculpteur et architecte français, né à Marseille en 1622, mort dans la même ville en 1694. Pierre Puget représente, avec Nicolas Poussin, le plus haut degré qu’ait atteint l’art français au X.VIIC siècle, et leur existence a de plus ce point de ressemblance que tous deux, médiocres courtisans, vécurent volontairement loin de Versailles, où ils se sentaient mal à l’aise. Puget apprit d’abord la sculpture sur bois’et entra dans l’atelier d’un constructeur de navires nommé Roman, qui lui fit exécuter toutes les pièces de cette ornementation si chargée dont on décorait alors les parties extérieures des navires, À dix-sept uns, il partit pour l’Italie, à pied, sac au dos et payant ses frais de route en tournant de menus objets chez les fabricants de meubles ; il gagna ainsi Florence, où il séjourna quelque temps, puis Rome, où il apportait à Pierre de Cortone, alors chargé d’immenses décorations, une lettre de recommandation d’un Florentin. Pierre de Cortone demanda à voir ses dessins, en fut satisfait et lui persuada qu’il deviendrait un excellent peintre s’il voulait profiter de ses leçons. Puget se mit à l’œuvre et travailla au grand plafond du palais Barberini, le Triomphe de la Gloire ; on y montre encore deux Tritons qu’on prétend être de sa main. Revenu à Marseille en 1643, il y reprit son premier métier de sculpteur en bois pour les navires et.fut chargé de grandes décorations de ce genre. Ce fut lui qui imagina et exécuta le premier ces poupes colossales à double rang de galeries et ornées de figures, qu’on imita partout pour les vaisseaux de haut bord ce dont on peut voir les riches modèles au musée naval du Louvre. Le vaisseau la Heine fut son premier essai. En même temps, suivant le conseil de Pierre de Cortone, il s’adonnait aussi à la peinture ; les musées de Marseille, de Toulon, de La Ciotut

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possèdent de lui un certain nombre de toiles, ’ exécutées avec une certaine habileté et qui n’auraient certainement pas suffi à lui donner un grand renom. Ce sont, entre autres, à Marseille, quatre grandes toiles dans la manière de son maître : le Baptême de Constantin, le Baptême de Cloois, le Sauveur du monde et une Visitation ; elles ont été peintes de 1652 à 1654 ; la dernière est tout à fait dans le goût italien et parait un pastiche de Pierre de Cortone. Avant cette dernière date, Puget était retourné à Rome en compagnie d’un moine chargé par Anne d’Autriche de faire dessiner les plus beaux spécimens de l’architecture antique ; l’artiste, à qui il confia cette besogne, sentit mil ire en lui une vocation nouvelle en étudiant ces beaux monuments et il revint à Marseille excellent architecte. De 1656 à 1657, il exécuta la fameuse porte de l’hôtel de ville de Toulon, remarquable surtout par les deux magnifiques cariatides qui en soutiennent le balcon et qui lui offrirent l’occasion de se révéler comme sculpteur. Ces figures, dont le bas se termine en gaine, font des efforts surhumains pour ne pas se laisser écraser par le poids qu’elles portent et présentent des attitudes ’si vraies, d’une réalité si puissante, qu’elles provoquèrent l’admirution du cavalier Beruin. Le musée du Louvre en possède un moulage placé dans la salle affectée presque tout entière aux œuvres du grand artiste. Puget les a signées : P. Puget, pic.-sc.-arc. m.-t. (Pierre Puget, peintre, sculpteur, architecte marseillo-torulonnais). Encouragé par le succès, il exécuta immédiatement d’autres beaux ouvrages de sculpture : un Buste de Louis XIV placé au milieu d’un œil-de-bteuf, au-dessus de cette même porte de l’hôtel de ville de Toulon ; ce buste a disparu en 1793 ; et, pour ie marquis do Girardin, un Hercule, un groupe de /anus et la Terre, destinés au châteuu de Vaudreuit, en Normandie. À cette occasion, Puget vint à Paris ; il y fit connaissance avec l’architecte Lepuiitre, qui le présenta à Fouquet. Celui-ci le chargea d’un grand nombre de commandes pour son château de Vaux et l’envoya en Italie choisir lui-même, dans les carrières de Carrare, les marbres où il taillerait des chefs-d’œuvre. Puget s’y rendit aussitôt, mais la disgrâce du surintendant rendit sa mission sans objet (1661) ; il n’en resta |ias moins en Italie et, de 1661 h 1669, il enrichit les églises et les palais de Gènes d’un grand nombr.e de statues : le Martyr Alexandre Sauli, statue colossale placée dans l’église Notre-Dame-de-Carignan ; un Saint Sébastien (même église) ; une vierge, statue en marbre (Saint-Philippe-de-Neri) ; ('Assomption, groupe en marbre (Albergo-déPoveri) ; un tabernacle et les anges dorés du maître-autel, à San-Siro ; un maître-autel orné des symboles des quatre évangélistes, à Notre-Dume-des-Yignes ; une Vierge (chapelle du palais Balbi) ; une autre à la chapelle du palais Caregu ; un groupe en marbre, Y Enlèvement d’Hélène (au palais Doria). Il exécuta aussi, à la même époque, un Hercule qu’il envoya en France au surintendant Sublet des Noyers, et qui a été longtemps désigné sous le nom d’Hercule gaulois. Placé dans le parc de Sceaux, puis au Luxembourg, il est maintenant au Louvre. Beaucoup d’autres commandes avaient été confiées à Puget par de riches amateurs génois ; il devait construire une église paroissiale aux frais de la maison Dona ; les Sauli et les Lomellini lui servaient de riches pensions ; le Sénat de Gênes lui confia la décoration picturale de la salle du grand conseil ; mais Puget, rappelé par Colbert, préféra ren- • trer en France. Colbert le nomma directeur des décorations navales au port de Toulon, et Puget, reprenant son premier métier, fit une application encore plus développée du talent qu’il avait déjà manifesté sur le vaisseau la Heine et décora d’une façon splendide le Magnifique, vaisseau de haut bord équipé par le duc de Beaufort pour aller au secours des Vénitiens (1669). Un grand nombre d’autres navires, décorés avec la même élégance, sortirent de ses mains, et l’importance donnée aux détails artistiques lui suscita même up conflit avec la marine. Les officiers se plaignirent à Colbert et lui remontrèrent qu Colbert écrivit à Puget de s’assujettir désormais aux recommandations des officiers et charpentiers du port ; l’artiste ne tint aucun compte de l’injonction et Colbert lui retira son emploi.

Cette disgrâce fut heureuse en ce qu’elle força Puget à déployer son activité dans une sphère plus digne de lui. Marseille et Toulon lui confièrent de grands travaux d’architecture. À Marseille, il fournit les dessins des principales maisons du cours Saint-Louis, et l’on y voit encore cinq de ces maisons contiguës formant une remarquable ordonnance, composée aux extrémités latérales de deux ordres’ de pilastres ioniques et corinthiens.et, au centre, d’un balcon colossal supporté par destritons et des sirènes qui encadrent la porto ’ principale. L’ensemble paraît être.la façade1 d’un seul édifice. Dans larue-de Roiiie, Pugetse bâtit une maison à façade ornée de pilastrès composites surmontés d’un fronton, qu’il* habita, et au-devant de laquelle, a été érigé», en : 1806, une fontaine qui porte son nom. Son