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on fait une deuxième infusion de manière à obtenir en tout 430 grammes ; on ajoute 100 grammes d’eau distillée de valériane, 1,000 grammes de sucre et l’on fait un sirop au bain-marié couvert.

— Sirop de violette». Sur 1,000 grammes de pétales récents et mondés de violettes, placés dans un bain-marié d’étain, on verse une quantité d’eau bouillante, de manière à obtenir, après dis. heures d’infusion et après avoir passé avec expression, a, 120 grammes de liquide. On ajoute 4,000 grammes de sucre et on fait un sirop par simple solution au bain-marié couvert. Il faut que les violettes aient été préalablement lavées à l’eau tiède.

SIBOPER v. a. ou tr. (si-ro-pé — rad. sirop). Edulcorer avec un sirop : Siropkr un verre d’eau, il Peu usité.

SIROSIPHON s. m. (si-ro-si-fon — du gr. seira, chaîne, et de siphon). Bot. Genre d’algues filamenteuses, de la tribu des scvtonéînées, comprenant une dizaine d’espèces, qui croissent sur les rochers et la terre humide : Dans les sirosiphons, les rameaux naissent d’une expansion latérale du tronc. (Brébisson.)

S1ROSPORE s. m. (si-ro-spo-re — du gr. seira, chaîne, et de spore). Bot. Genre d’algues, formé aux dépens descallithamnions, et dont l’espèce type croit dans le sud-ouest de l’Angleterre.

SIROT s. m. (si-ro). Ornith. Nom vulgaire du pluvier guignard.

SIROT (Claude LÉtodf, baron de), général français, mort en 1652. Il servit assez longtemps à l’étranger, combattit sous les ordres du roi de Suède Gustave-Adolphe, puis revint en France (1834). Pendant la campagne de Flandre, il se signala par sa bravoure, notamment aux sièges d’Arras, de Courtrai, d’Armentières, et à la bataille de Rocroi, devint’maréchal de camp en 1643 et reçut en 1649 le grade de lieutenant général. Pendant ses loisirs, Sirot écrivit des Mémoires très-intéressants et très-curieux qui furent publiés après sa mort (Paris, 1683, 2 vol. n-12).

SIROTER v. a. ou tr. (si-ro-té — rad. sirop. Dans la formation du verbe, ou n’a pas tenu compte de l’orthographe du substantif ; cela est arrivé dans d’autres cas, où, comme ici, il s’agissait de mots rarement écrits). Boire en dégustant et par petits coups : Siroter son café. Les vrais amateurs sirotent leur vin. (Br.-Savarin.)

Je sirote mon vin, quel qu’il ûoit, vieux, nouveau ;

Je fais rubis sur l’ongle, et n’y mets jamais d’eau.

Regkaeb.

— Absol. : Il aime à sirotkr.

SIROTEUR, EUSE s. (si-ro-teur, eu-zerad. siroter). Personne qui sirote, qui aime à siroter.

SIRSACAS s. m. (sir-sa-ka). Comm. Etoffe de coton de l’Inde,

SIRSAIR s. m. (sir-sèr). Oinith. Espèce de sarcelle d’Afrique.

SIRTALE s. f. (sir-ta-le). Erpét. Espèce de couleuvre.

SIRTE ou SYRTE s. f. (sir-te — gr. surtis ; de sureà, j’agite). Mar. Sables mouvants, dangereux pour les navires.

— s. m. Entom, Genre d’insectes coléoptères pentamères, de la famille des serricornes, section des malacodermes, tribu des cébrionites, comprenant une vingtaine d’espèces, répandues dans les deux continents.

SIRTHÉNÉE s. f. (sir-té-né — du gr, skirtaô, je saute). Entom. Genre d’insectes hémiptères, de la famille des réduviens, tribu des réduviides, dont l’espèce type habite la Caroline,

SIRTORI, général italien, né en 1813, mort à, Rome le 1S septembre 1874. Envoyé au séminaire, il fut ordonné prêtre à vingt-cinq ans, puis alla exercer son ministère près du lac de (Jôme. Au bout de deux ans, en 1840, l’abbé Sirtori, dont les idées s’étaient singulièrement modifiées, déposa la soutane, partit pour Paris et y vécut de la vie la plus studieuse jusqu’en 1848. Après avoir pris quelque part à la révolution française du 24 février, il retourna eu Italie. Ardent patriote, épris d’une noble passion pour la grande cause de la liberté, Sirtori devint un des soldats de la révolution italienne et combattit vaillamment à Rome sous les ordres de Garibaldi, qui fut vivement frappé de sa bravoure et de son mérite. Lorsque le grand mouvement national de 184S-1S49 eut été étouffe en Italie par les armées-de la France et de l’Autriche, Sirtori vécut de nouveau dans l’exil à Paris, puis à Londres, n Evitant les théories absolues de Mazzini, dit M. Erdan, il s’était attaché à l’idée de Manin, à ses tendances en faveur de l’hégémonie du Piémont et de sa monarchie libérale. » Les événements de 1859 vinrent lui fournir l’occasion de jouer un rôle important. Lorsque Garibaldi décida d’envahir la Sicile à la lète de son héroïque légion des Mille, ce fut Sirtori qu’il choisit pour chef d’état-inajor. L’ancien prêtre, devenu colonel, se conduisit de la façon la plus brillante, et, lors de la fusion de la petite année de Garibaldi dans l’armée italienne, il fut créé général, en même temps que Cosenz, Bixio, etc. Lors de la guerre de 186C contre l’Autriche, le général Sirtori reçut le commandement d’une division ; malgré

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sa bravoure, il éprouva un échec, dû en partie à de mauvaises dispositions, et fut mis en disponibilité. Douloureusement affecté, il refusa le traitement de disponibilité et vécut dans la pauvreté de 1866 à 1872, époque où il fut remis en activité et reçut la présidence du comité général de l’infanterie. Sirtori mourut de la rupture d’un anévrisme. Ses obsèques, purement civiles, eurent lieu avec une grande pompe militaire. Tous les officiers de la garnison de Rome suivirent le cercueil de ce prêtre devenu libre penseur, anticlérical et soldat.

S1RCC (Bernard-Matthieu), philologue et historien polonais, né en 1731, mort en 1784. 11 entra de bonne heure dans l’ordre despiaristes, alla terminer ses études à Rome, enseigna ensuite les mathématiques à l’académie Thérésienne de Vienne et devint en dernier lieu professeur de droit romain et d’Ecriture sainte à l’université de Wilna. On a de lui : Histoire de Pologne, traduite du français, de Solignac, et précédée d’une préface et d’éclaircissements (Wilna, 1703-1767, 5 vol. in-8°) ; les Meilleures harangues judiciaires de Quintilien (Wilna, 1760-1771, 2 vol. in-8") ; les Moeurs des anciens Itarfnains (Wilna, 1762, in-8» ; 3« édit., 1774) ; Cullectanea e probalis latins linyuB scriptoribus (Wilna, 1770) ; Histoire de l’empire russe (Wilna, 1781, 5 vol. in-8o).

SIRUPEUX, EUSE adj. (si-ru-peu, eu-ze — du bas lat. sirupus, sirop). Qui a la nature ou la consistance du sirop : Liquide SIRUPEUX.

S1BVEN (Pierre-Paul), protestant célèbre dans l’histoire des persécutions religieuses du xvme siècle, né à Castres en 1709. Feudiste de son état, c’est-à-dire à la fois archiviste et notaire, il était établi depuis vingt ans dans la ville de Castres et avait trois filles, élevées par ses soins dans la religion protestante. Mais on sait que, depuis la révocation de l’édit de Nantes, les protestants n’avaient pas d’existence légale en France ; ils étaient considérés comme nouveaux convertis. Cette situation déplorable permettait au clergé catholique d’exercer toute espèce de vexations sur les réformés. Sirven en est un exemple mémorable.

Sur un ordre de l’évêque, Elisabeth, l’aînée de ses filles, lui fut enlevée. On la conduisit au couvent des Dames-Noires de Castres, afin de lui faire abjurer le protestantisme, et on l’enferma. Séparée de ses parents, la jeune fille tomba dans une profonde mélancolie. Tous les moyens cependant étaient mis en œuvre pour sa conversion ; mais ni les menaces, ni les promesses, ni les mauvais traitements ne purent fléchir sa volonté. Après sept mois de séquestration, il fallut la rendre à sa famille. Elisabeth Sirven avait perdu la raison. « Le 9 octobre de l’année 1760, raconte Court de Gébelin dans ses Toulousaines, l’évêque fait rendre leur fille à sé parents, en disant qu’elle ne veut point être catholique. Mais dans quel état revient-elle î Exténuée, pale, défaite, dévorant au lieu de manger, craignant, au moindre bruit, qu’on ne veuille l’enfermer au château de Ferrières, qu’elle appelle un couvent ; d’autres fois, se figurant qu’elle doit épouser un grand seigneur, déchirant et brisant tout ce qui lui tombe sous la main, arrachant même les cheveux à sa mère et à sa sœur..., en un mot, complètement folle I... Ou s’aperçut qu’elle était chargée de cicatrices, comme si elle avait reçu souvent la discipline. «

Pendant les terribles accès de sa maladie, il fallait mettre à la malheureuse enfant la camisole de force et cadenasser les fenêtres de sa chambre, pour l’empêcher de se précipiter. Le bruit courut bientôt, parmi les catholiques de Castres, qu’Elisabeth était retenue prisonnière par ses parents et qu’on l’accablait de mauvais traitements parce qu’elle voulait se convertir au catholicisme. Le subdétêgué de Castres s’émut de ces rumeurs, et il commit, en juin 1761, un médecin chargé de visiter la jeune tille. La folie fut constatée.

À cette époque, Sirven alla s’établir au château de Saint-Alby, chez M. d’Espérandieu, seigneur de cette paroisse. Les tentatives de Castres s’y renouvelèrent ; le vicaire et les consuls d’Alby vinrent chercher Elisabeth pour la mener à l’église ; mais, en voyant la pauvre folle, ils renoncèrent à leur dessein. Sirven cependant, craignant un malheur pour lui et sa famille, à cause des bruits qui circulaient dans la fouie, conçut le projet de confier Elisabeth à l’évêque de Castres. En conséquence, il alla demander conseil à la dame d’Espérandieu, au château d’Aiguefonds, et il passa la nuit dans le château.

Le lendemain matin, on vient lui annoncer que sa fille a disparu. Il court à Saint-Alby, trouve sa femme et ses deux autres filles dans les larmes. On court de tous côtés à la recherche d’Elisabeth ; on explore la campagne, on fouille les bois du voisinage, mais on ne trouve pas Elisabeth. Vingt jours après seulement, le 4 janvier 17G2, des enfants jouant autour de la margelle d’un puits aperçoivent un corps de femme flottant à fleur d’eau ; c’était celui d’Elisabeth Sirven,

Le haut justicier de Mazamet, accompagné d’un médecin et d’un chirurgien, se transporte sur les lieux. Il s’informe ; on lui répond que la jeune fille était folle, qu’elle a dû se précipiter elle-même dans le puits ; le fiscal

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demande au vicaire la permission d’inhumer et on s’apprête à procéder à l’ensevelissement. Le malheureux père allait se joindre au cortège, quand il apprend qu’il n’y a point de permission écrite. Une trop légitime défiance le porte à s’éloigner. Cependant les consuls font faire la levée du cadavre, déposé à la maison de ville, et le font enterrer.

Le lendemain, le juge de Mazamet arrive et s’indigne qu’on ait procédé sans son ordre. Dans un nouveau rapport, il déclare que la tête paraissait ébranlée, que le cou était taché de sang caillé, qu’il n’y avait point d’eau dans l’estomac. On n’était donc pas en présence d’un suicide, mais bien d’un assassinat. Quel pouvait en être l’auteur ? On n’osait pas encore le dire, mais on l’osa bientôt : l’assassin d’Elisabeth, c’était Sirven, c’était son père lui-même 1 Cette odieuse accusation, renouvelée de l’affaire Calas, eut du succès au sein de la populace fanatique.

Sirven prouva qu’il était au château d’Aiguefonds quand l’événement était arrivé. Les dame3 noires de Castres déclarèrent qu’Elisabeth « avait donné par intervalles des traits de folie ou d’imbécillité, tant le jour que la nuit ; » mais rien n’y fit. Le 20 janvier, Sirven fut décrété d’infanticide, et sa femme et ses filles condamnées comme ses complices.

L’exemple des Calas était là pour apprendre aux protestants ce qu’ils avaient à redouter. Mra« Sirven était malade, une de ses filles était dans un état de grossesse avancée, la saison était rigoureuse, les montagnes couvertes de neige : il n’en fallut pas moins partir pour échapper à la main des bourreaux. D’asile en asile, les infortunés gagnèrent les montagnes ; là, ils se séparèrent pour mieux échapper aux recherches. Ce que furent les misères, les angoisses de cette fuite terrible, par les sentiers glacés, par les gorges neigeuses, avec la crainte de ne se retrouver jamais, on ne pourrait le dire. La fille aînée accoucha dans les bois avant terme. Il fallut trois mois au père, cinq mois à la mère et aux filles pour gagner la Suisse, cette terre de délivrance et d’hospitalité. Là, ils trouvèrent aide et protection ; les républiques de Berne et de Genève leur firent une pension. Voltaire les accueillit à Fertiey avec bienveillance et se laissa toucher par le récit de leurs malheurs. < Figurez-vous, écrivait-il à la suite de leur visite, figurez-vous quatre moutons que des bouchers accusent d’avoir mangé un agneau I »

Cependant l’instruction avait suivi son cours ; le 29 mars 1764, sur le rapport fait par le juge de Mazamet, une sentence de mort fut portée contre Sirven et sa femme. Cette sentence déclarait le père et la mère coupables d’infanticide, et ne leur infligeait cependant que la peine appliquée à l’assassin ordinaire, — celle de la pendaison ; elle dénonçait la complicité des deux filles et se contentait de les bannir et de confisquer leurs biens. Le parlement de Toulouse, déjà trop célèbre par son arrêt contre Calas, autorisa, par un arrêt daté du 5 mai 1764, l’exécution du jugement par effigie, et cette exécution figurative eut lieu sur la place de Mazamet, le il septembre.

Mais déjà la réaction se faisait en faveur de Calas. Ici encore Voltaire et avec lui d’illustres avocats prirent en main la cause des accusés. L’indignation était générale dans le Languedoc. Après cinq ans de généreux efforts, l’arrêt capital et infamant prononcé contre Sirven fut cassé et la malheureuse famille fut réhabilitée. Il était temps que la Révolution vînt balayer ces lois barbares et frapper le cléricalisme d’un coup dont, en dépit de ses efforts, il ne se relèvera pas.

SIRVEN (Alfred), littérateur et journaliste français, né à Toulouse le 28 mai 1838. Il descend de la famille Sirven, victime du fanatisme religieux au xvme siècle et que défendit Voltaire. Lorsqu’il eut terminé ses études dans sa ville natale, il se rendit à Paris pour y suivre les cours de l’École centrale ; mais, à peine arrivé, il résolut de suivie la carrière des lettres, collabora au Dictionnaire encyclopédique (1838), publia deux brochures, les Cinq centimes, projet d’assistance générale et maternelle, et le Travail, projet d organisation contre le chômage des ouvriers, puis fonda la même année la Petite presse, qui cessa de paraître en 1859. Peu après, M. Sirven devint rédacteur en chef du Oaulois, journal illustré, qui fut supprimé en 1861 pour des articles qui firent condamner le jeune journaliste à deux mois de prison et 500 francs d’amende. À partir de cette époque jusqu’en 1865, il publia un certain nombre de satires de moeurs portant des titres à sensation et qui firent un certain bruit. Une brochure, intitulée Devenons à l’Évangile, lui attira une nouvelle condamnation à deux mois de prison et 500 francs d’amende. Condamné de nouveau pour un article publié- dans le Pamphlet, il subit une quatrième condamnation, cette fois à trois mois de prison et 300 francs d’amende, pour la publication d’un livre, les Vieux polissons (1865, in-12), qui avait été saisi à la requête d’un personnage de l’Empire. À cette époque, M. Sirven entreprit de publier, sous le titre de Journaux et journalistes, la monographie des principaux organes de la presse. Il devint ensuite rédacteur en chef du Pamphlet, un des collaborateurs du. Siècle et se

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mit, en 1869, à faire paraître 1 s Orateurs de la liberté, par livraisons illustrées ; inui.s cette publication fut suspendue à la troisième livraison. Après la révolution du 4 septembre 1870, M. Alfred Sirven fut envoyé comme sous-préfet à Dreux pour y organiser la défense. Après la prise de cette ville (10 octobre 1870), il se retira à Tours, puis à Bordeaux, où il fonda en janvier 1871 un journal, intitulé le Châtiment, qu’il publia à Paris du mois de mars au 27 avril suivant, et dans lequel il s’attacha vainement à amener une entente et la fin de la guerre civile. Au mois d’avril 1872, M. Sirven a fondé le Correspondant français, ugence de correspondance politique pour tes journaux français et étrangers. Outre les écrits précités, on lui doit : Lèona ou Une mauvaise influence, roman ; Léon Soulié (1862, in-8°) ; les Imbéciles (18G2, in-12) ; les Confidences d’un canapé (1862, in-10) ; les Tripots d’Allemagne (1863, in-12) ; es Infâmes de ta Bourse (1803, in-12) ; VSomme noir, roman anticlérical, avec préface de V. Hugo (1864, in-12) ; les Crétins de province (1864, in-12) ; les Mauvaises langues (1864, in-32) ; les Plaisirs de Bade (1865, in-12) ; les Abrutis (1865, in-12 -, la Première à Dupanloup (1865, in-8°) ; Almanach des imbéciles (1866, in-18) ; Journaux et journalistes (18S5-1867, 4 vol. in-12), comprenant le Journal des Débats, la Gazette de France, le Siècle, la Presse et la Liberté, Prisons politiques, | Sainte-Pélagie (1867, in-18) ; les Prussiens à I Dreux, rapport (1870, in-8") ; la Forêt de I Dondy (1873, in-12), étude satirique sur les joueurs à la Bourse et les financiers.

| SIRVENTE s. m. (sir-van-te. — Ce mot

désigne proprement un poème cnmposé par

I un ménestrel au service de son maître. Il

I vient du latin servire, servir). Littér. Sorte

de poésie ancienne des troubadours et des

trouvères, ordinairement satirique, et qui

était presque toujours divisée en strophes ou

couplets propres à être chantés : Les sirven-

Tes et les iensons.

— Encycl. Le sirvente fut d’abord pratiqué par les trouvères, qui l’appelaient sirventois (v, ce mot), et passa de la Picardie, où il fut, dit-on, inventé, en Provence, où les troubadours le cultivèrent avec ardeur, Il en reste, tant manuscrits qu’imprimés, des collections considérables, ce qui permet de suivre le développement du goût de la satire dans la poésie provençale.

Comme la chanson ou cansà, le sirvente était presque toujours divisé en strophes ; il pouvait aussi se réciter au son de lanm-dque, comme le prouvent ces deux vers, cités par Raynouard :

Ab nov cor et ab novel son Voill un nov sirventes bastir.

Avec nouvelle ardeur et avec nouveau son je veux un nouveau sirvente bâtir, o

Les troubadours distinguaient deux espèces de sirventes : le sirvente proprement dit et celui qu’ils nommaient joijlaresc, parce qu’il était sans doute le partage des jongleurs (joculatores), qui le chantaient ou le récitaient dans les maisons où ils étaient accueillis. Le caractère principal du sirvente joglaresque paraît avoir été de réunir l’éloge et la satire. Ainsi, Folquet de Romans et Augier firent des pièces de ce genre, dans lesquelles ils louaient les preux et blâmaient les méchants. Toutefois, le biographe de Pierre Guilhem donne aussi le nom de sirventes joglaresques aux poésies de ce troubadour, qui se bornaient à dénoncer les vices des barons.

Les sirveutes proprement dits se divisent en sirventes satiriques et en sirventes politiques. Il nous reste un grand nombre de sirventes satiriques, dont les uns ont pour objet la satire personnelle, les autres la satire générale des mœurs. Ceux qui ont pour objet la satire personnelle se distinguent par leur causticité et leur amertume. Ceux dont l’objet est la satire des mœurs accusent la dépravation, la cupidité, l’éguïsme des diverses classes de la société. Dans les pièces de ce genre, la franchise sévère et quelquefois hardie des troubadours donna souvent d«ï leçons utiles aux contemporains, dont ils dénonçaient hautement les excès, les erreurs et les vices. Sainte-Palaye remarque, à ce sujet, que les mœurs du • bon vieux temps • ne méritent pas nos regrets, comme certaines gens l’attirmeiit. Beaucoup de sirventes satiriques attaquent avec véhémence les vices du clergé et des moines. On en sera peu surpris, si Ion se retrace les abus énormes, la scandaleuse licence, les fraudes, etc., qui déshonoraient alors les ministres de la religion. Un troubadour, qui fut peut-être prêtre, Pierre Cardinal, a surtout attaqué le clergé avec une sorte de fureur, mais aussi avec un talent très-remarquable. Voici le portrait qu’il fait des prêtres de son temps : « 11 n’est point de vautour qui évente d’aussi loin une charogne que les gens d’église et leurs prédicateurs senteut un homme riche. Aussitôt ils en font leur ami, et, quand il lui survient unes maladie, ils lui font faire une donation qui dépouille ses parents. Les mauvais ecclésiastiques ont réuni tout l’orgueil, toute la cupidité et toute la trahison du monde. Ils font prêcher que le vol est défendu, après avoir tout envahi eux-mêmes. Vous les voyez sortir tête levée des mauvais lieux pour aller à l’autel. Rois, empereurs, ducs, comtes et che-