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semblables. Les livres apocryphes, tels que les Macchabées, te livre de Tobie, celui de Baruch, le troisième livre d’Esdras et d’autres de ce genre appartiennent au domaine de l’Agadah. À cette catégorie, il faut encore ajouter les livres contenant des préceptes moraux, tel que Sirach, que le Talmud cite souvent, et le livre de la Sagesse de Salomon. L’agadiste est l’homme qui s’occupe de ces sortes d’interprétations ; il a toute liberté dans l’application des textes des Prophètes et, en général, des textes contenant un sujet narratif, aussi longtemps qu’il ne se met pas en contradiction avec la loi proprement dite. Les docteurs ne trouvaient généralement rien de nuisible dans l’Agadah, de manière qu’on permettait même de copier ces sortes de livres. Cette littérature devait prendre des développements rapides en raison de la liberté dont elle jouissait.

On désigne sous le nom de Halakha un commentaire casuistique de la loi. Ce mot vient probablement de la racine halakh, aller ; c’est l’interprétation traditionnelle de la thora, qui passe oralement d’une génération à l’autre. « La Halakha, dit M. Neubauer, est l’opposé de l’Agadah ; elle s’appuie en général sur le texte du Pentateuque, puisqu’elle interprète la loi. » Il ne pouvait y avoir là de liberté complète comme pour l’Agadah. L’exégète devait suivre constamment une autorité reconnue. La Mischua fait remonter cette autorité jusqu’à la révélation orale que Moïse avait reçue sur le mont Sinaï. Voici comment elle s’exprime sur ce point : « Moïse reçut la loi du Sinaï ; il la transmit à Josué, la remit aux anciens, les anciens la passèrent aux prophètes et ces derniers la transmirent aux hommes de la grande synagogue. ».

Quand a-t-on commencé à employer le mot Halakha ! Quelles ont été les premières Halakhoth ? 11 y n’a là-dessus, dit M. Neubauer, rien de positif ; il faut se borner aux conjectures. Tout ce que nous savons, c’est qu’on cite quelques institutions halachiques de Yosé lien Yoézer, qui vivait au commencement de la guerre des Macchabées(180-170). Toutefois, il est certain qu’une partie de la Mùchna, notamment celle qui concerne les sacrifices, les prélèvements pour le temple et les purifications, contient d’anciennes Halakholh. Fendant la guerre des Macchabées, toute activité littéraire avait probablement cessé ; une fois l’État rétabli, les rois asmonéens présidèrent, sinon en personne, du moins par leur influence royale, un tribunal institué par eux sous le nom de sanhédrin. Nous trouvons, en effet, quelques institutions halachiques du roi Jean Hyrcan. Sous ce roi, la rupture entre les pharisiens et les sadueèens devint flagrante. Les saducéens possédaient un code écrit, tandis que les pharisiens n’admettaient pas qu’on écrivit la tradition orale. Était-ce pour avoir la supériorité de la science, à l’exemple des prêtres égyptiens, ou bien craignaient-ils que, par des fautes de copistes ou par des falsilioations volontaires, on ne vît se produire un autre schisme ? Il est difficile de se prononcer sur ce point. La mémoire jouait un grand rôle dans les écoles ; cette faculté est très-développée chez les peuples orientaux. Dès l’enfance, l’éducation consistait probablement à apprendre avant tout par cœur les interprétations de la loi. Aujourd’hui encore, les vrais élèves du Talmud connaissent ce vaste livre presque entièrement de mémoire. Qu’on leur demande

un passage, ils indiquent à l’instant la page où il se trouve. On sait qu’il en a été de même chtz les lndous ; une partie de leur littérature n’a été conservée que par des efforts de mémoire. « On ne peut se l’aire une idée, dit M. Max Muller, des puissantes facultés qu’acquiert la mémoire dans une organisation sociale aussi éloignéo de la nôtre que les parishad indous le sont de nos universités. La force de la mémoire, telle que nous la voyou» et l’entendons souvent, montre que nos notions des limites de cette faculté sont tout à fait arbitraires. Notre mémoire a été affaiblie systématiquement de temps immémorial... Aujourd’hui encore, où les manuscrits ne sont ni rares ni chers, les jeunes brahmanes qui apprennent les chants des Vèdas, les brahmauas et les sutras le font invariablement par la tradition orale et les savent par cœur. ■

Le mot halakha parait pour la première fois à propos de Hillel (trente-deux ans avant notre ère). Il fut nommé président du sanhédrin tout en étant étranger (il venait de la Babylonie), parce qu’il sut donner des explications sur une Halakha que le président d’ulurs ignorait. Avec l’époque de Hiilel commence la véritable discussion scolastique et subtile que nous trouverons dans le Talmud. Tout ce qui est rapporté de ce docteur, modèle de modestie, de bonté, de probité, de patience, nous autorise a croire que ces sortes de discussions n’étaient pas du goût de Hillel. Était-il obligé de les subir comme étranger, ou le goût scolastique était-il déjà développé chez ses élèves ? On ne nous en dit rien. Les discussions entre les écoles de Hillel et de son coprésident Sohammaï devaient être ardentes, et elles amenaient souvent des scissions complètes. Voici comment le Talmud s’exprime lui-même sur ce point : « Avant Hillel et Schammaï, il n’y avait qu’une seule interprétation de la Thora (loi). Ces deux écoles ont fait do la Thora deux versions différentes. » La Mischna contient un grand nombre

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des décisions halachiques de ces deux docteurs.

La tranquillité dans les discussions semble avoir été rétablie un moment sous la présidence de Rabbi Gamaliel l’ainé, qui jouit d’une grande autorité. Ce docteur est connu par sa modération à l’égard des premiers prédicateurs de la foi chrétienne ; son fils, R. Siméon, lui succéda au patriarcat. Plusieurs autres célébrités vivaient à cette époque si funeste au peuple juif. R. Yohananben-Zaccaï, ainsi que R. Siméon, fils de Gamaliel, ont vu la destruction du temple. La dernière étincelle de la nationalité juive s’étant politiquement éteinte, on s’efforça de sauver au moins son existence spirituelle. R. "Yohanan forma une école à Yabneh, dont R. Gamaliel le second fut plus tard le chef. Dans le voisinage de cette ville se trouvaient les écoles de R. Akiba, do R. Eliézer ben Azaryah et d’autres docteurs célèbres. Toutes ces écoles ajoutaient des décisions aux Halakhoth antérieures ou y introduisaient même des changements. La. matière s’accumulait de plus en plus et on ne pouvait plus s’en fier pour l’exactitude de ces textes à la simple mémoire. Déjà on rapportait une seule et même Halakha à des docteurs différents ; il était facile de voir qu’il allait devenir impossible d’appuyer rigoureusement la loi orale sur des autorités reconnues. R. Akiba et R. Eliézer écrivaient déjà leurs décisions halacbiques.

Après la guerre de Bar Coziba (130 de notre ère), quand le siège de l’école dut être transporté en Galilée, et, même dans ce pays, changer successivement de lieu, R. Yehouda, surnommé le Saint, descendant du fameux Hillel et chef de l’école de Tibériade, essaya (180 de notre ère), probablement malgré bien des résistances, de réunir les diverses Halakhoth dans un seul et même livre. La Mischna, qui signifie étude, est le nom de ce fameux recueil ; il ne contient presque point <Y Agadah, si l’on en excepte les Articles des Pères (Pirké aboth), qui renferment les sentences morales des différents docteurs.

La Mischna se compose de six parties appelées sedarim. Voici les noms de ces six parties :

1° La partie dite des semences (Seder Ze- raïnt), contenant Ses formules des bénédictions qui doivent être prononcées sur les différents aliments, et les règles qui concernent les dîmes et les offrandes à prélever sur les produits de la terre.

2° La partie dite des fêtes (Seder Moëd), renfermant les prescriptions pour le sabbat et les fêtes de 1 année.

3° La partie des femmes (Seder Naschim)t qui traite des lois sur le mariage, ie lévirat et sur les ablutions et purifications.

4° La partie des dommages (Seder Nezikin), comprenant le droit civil et criminel avec un traité sur les crimes de l’idolâtrie.

50 La partie des oblatione destinées au templ« (Seder Kodaschim). >

6U Enfin la partie des purifications (Seder Tohoroth), applicable aux ustensiles devenus impurs et aux purifications pour divers cas de maladies.

Chacune de ces parties de la Mischna a des subdivisions sous le nom de Massekheth (mot à mot tissu) ; il y a deux rédactions de la Mischna ; elles diffèrent peu entre elles ; l’une sert de base au Talmud de Jérusalem efr l’autre au Talmud de Babylone.

À la même époque où fut rédigée la Mischna, R. Iliya composait en Babylonie un ouvrage analogue, que nous possédons sous le nom de la Tosiftha ou Toseflha (collection). Ce R. Hiya était originaire de la Palestine ; niais on peut ranger son travail parmi les productions babyloniennes. La Tosiftha renferme plusieurs éléments agadiques.

Avant la rédaction même de la Mischna et de la Tosiftha, on possêdaitd’anciennesjVischnas, dont il y a quelques citations, mais qui ne sont pas parvenues jusqu’à nous. Simëon ben Gamaliel (166 de notre ère) avait commencé aussi une révision de la loi orale ; néanmoins, l’honneur de la rédaction définitive du livre de la Mischna contenant cette loi revient, comme nous l’avons dit, àR. Yehouda le Saint.

Trois autres traités, dont la rédaction est postérieure a la Mischna et à la Tosiftha, forment une sorte de commentaire balachique et agadique sur le Pentateuque, selon que le texte se prête à l’une ou à 1 autre espèce d’interprétation. Ces trois traités sont : 1<> le Mekhilta (mesure), commençant au chapitre xiv de Y Exode ; 20 le Sifra {le livre par excellence), commentaire sur le Lévitique ; 30 le Sifré (les deux livres), commentaire sur les Nombres et le Deutéronome. Les deux derniers sont censés appartenir à l’école de Rab en Babylonie (190-240 de notre ère). Bien que postérieurs à la Mischna et à la Tosiftha, ces trois ouvrages offrent des traces plus complètes de l’ancienne Halakha et de l’ancienne Agadah.

Les livres dont nous venons de parler, Mischna, Tosiftha, etc., forment la première collection talmudique. La seconde est la Gcmare, La Gemafe (ce mot veut dire élude), nous offre, un commentaire de la Mischna, c’est-à-dire un commentaire de commentaire. Voici comment la Gémare prit naissance et développement.

Dans les discussions de la Mischna, les doc TALM

teurs devaient nécessairement s’appuyer sur des passages bibliques ; chaque opinion interprétait donc le texte sacré à sa guise. Il est facile de s’imaginer à quelles subtilités d’exposition on dut arriver. On raisonnait sur un pléonasme, sur une particule superflue ; on tirait des inductions d’une lettre qui n’était pas indispensable, même des lettres qui, par un hasard quelconque, avaient des dimensions différentes des autres, méthode

d’interprétations minutieuses qu’on retrouve aussi chez les brahmanes. La Mischna n’est pas envahie par ces subtilités-, le texte ne contient que la décision finale de la Halakha, selon l’opinion des différents docteurs. Dans les écoles, on reprenait les raisonnements sur lesquels se fondaient les décisions de la Mischna ; chaque école, avec le temps, en ajoutait de nouvelles. Quelques docteurs talmudiques ne se bornaient pas à ces.études ; ils cultivaient aussi les autres sciences : Samuel avait étudié l’astronomie, Thodos la médecine, R. Yosé-ben-Halaphthala chronolog : e ; mais tout cela était amené par une discussion halachique et subordonné à cette discussion. L’astronomie servait surtout à fixer la nouvelle lune, et c’est à propos de cette détermination qu’on donne incidemment quelques notions sur la matière. S’occupe-t-on du règlement du sabbat, discute-t-on la permission de faire du feu ce jour-là pour un malade ; le sujet amène quelques remarques médicales. Traite-t-on de prélèvements des produits de la terre, il intervient accidentellement quelques observations sur la botanique. Quant à la géographie et à l’histoire, comme pour le reste, il n’en est question qu’incidemment, quand on parle d’une institution religieuse établie par un personnage historique ou dans un lieu précis. Aussi ces notions sont-elles des plus vagues et très-souvent des plus erronées. Telle est la Gémare ou commentaire de la Mischna.

Nous avons deux Gémares : la Gémare de Jérusalem, comme son nom l’indique, est l’œuvre dos écoles de la Palestine ; elle a été rédigée à Tibériade et achevée probablement vers la fin du ive siècle (le notre ère. Elle contenait les commentaires sur les cinq premières parties de la Mischna ; le commentaire sur la cinquième partie ne nous est pas parvenu. Les quatre autres parties ont aussi quelques traités incomplets. Cette Gémare était négligée dans les études des écoles juives du moyen âge. Ellea subi lesortdesécoles où elle avait pris naissance, et qui avaient été éclipsées par celles de la Babylonie. Si les éditions du Talmud de Jérusalem sont moins bonnes, c’est qu’on n’a pas encore découvert un manuscrit de cet ouvrage à l’aide duquel on pût rétablir les passages nombreux qui ont été mutilés par les copistes. Ce Talmud offre, en outre, beaucoup de difficultés à cause de l’idiome étrange dans lequel il est écrit, et qui est entremêlé d’un grand nombre de termes grecs. Il n’en est pas moins d’une importance considérable pour la géographie et l’histoire de la Palestine. Les discussions qu’il contient ne sont pas aussi souvent entrecoupées de sujets agadiques que celles du Talmud de Babylone.

Le Talmud de Babylone a au moins quatre fois l’étendue de l’autre ; les discussions y sont plus développées, car il a été clos un siècle plus tard, c’est-à-dire à la fin du ve siècle. Il renferme même les débats des écoles palestiniennes, outre ceux des nombreuses école3 babyloniennes. Il abonde en notions agadiques de différentes sortes. Les élèves qui affluaient à Babylone de tous les pays, de l’Arménie, de l’Asie Mineure, de la Perse, de la Syrie et de la vaste région comprise entre l’Euphrato et le Tigre, y apportaient non-seulement les décisions de leurs écoles particulières, mais encore des notions de différentes sciences, des renseignements sur les coutumes des habitants de leurs pays, des théories de mysticisme propres aux païens. Chacune de ces écoles était souvent représentée dans un idiome particulier. C’est là ce qui explique comment nous trouvons dans le Talmud de Babylone des pages entières consacrées aux sujets les plus bizarres, totalement étrangers à la discussion dogmatique, et qui sont souvent intercalés sans aucune raison entre deux Halakhoth. On traitait dans l’école une question dogmatique quelconque et on y rattachait un sujet agadique qui ne s’y rapportait que de très-loin. Cette première Agadah en entraînait une autre d’un genre analogue qui se rapportait à un pays différent, et ainsi de suite. Il en résulte qu’il n’y a dans la composition de l’ensemble ni enchaînement logique, ni traces d’une suite régulière de faits ou d’idées.

De3 Gémares nous passons à la troisième catégorie des livres talmudiques, aux Midraschim qui, sauf quelques exceptions, sont purement agadiques. Midrasch vient du mot darasch, rechercher minutieusement, et, dans le langage postbiblique, ce mot signifie expliquer. On explique donc, dans les Midraschim, d’une manière subtile, les versets bibliques, pour en tirer des solutions pratiques selon les circonstances. M. Neubauer sigrale les caractères de l’interprétation agadique dans plusieurs livres de l’Ancien et du Nouveau Testament. Le livre de Daniel applique, par exemple, les visions des prophètes aux événements de son temps ; lo livre des Chroniques est plutôt un commentaire agadique qu’un livre historique. Les Apocryphes

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sont remplis de légendes et d’explications sur les paroles des prophètes. Le Nouveau Testament abonde en paraboles et en citations des prophètes appliquées aux faits contemporains.’Enfin, les œuvres d’Aristéas, de

Philon et de Josèphe contiennent une foule d’indications agadiques que nous retrouvons quelquefois sous mie autre forme dans l’Agadah juive. Celle-ci est donc d’une origine ancienne, et ce n’est pas s’aventurer trop que de la faire remonter jusqu’au siècle d’Esdras. À cette époque, le sentiment patriotique ne pouvait être plus vivement excité que par des récits légendaires remplis d’actes d’héroïsme et d’abnégation des anciens juifs. Cette interprétation spéciale des paroles des prophètes poursuivait son développement en même temps que le Halakha, avec cette différence que, pour YAgadah, sa diffusion ne rencontrait aucune résistance, car elle ne touchait presque jamais aux préceptes religieux.

Ainsi, les Midraschim contiennent le développement de YAgadah, qui s’est toujours Conservée parmi les juifs, et qui règne, même de nos jours, dans les communautés dont les membres se vouent exclusivement aux études talmudiques. Cependant, ces Midraschim, tels que nu 11 s les possédons aujourd’hui, sont d’une rédaction postérieur à à la Gémare de Babylone ; mais le fondement est ancien et une critique minutieuse pourrait y retrouver les intercalations postérieures. Il est inutile de dire que les Midraschim forment une collection agadique de différents docteurs et qu’ils ne sont nullement l’œuvre d’un rédacteur unique. La tradition juive attribue les Midraschim à des autorités talmudiques. Voici les principaux ouvrages qui appartiennent à cette troisième catégorie des monuments talmudiques :

10 La Pesiktha, qui contient des discours agadiques pour les différentes solennités sabbatiques de l’année. On en cite trois, savoir : la Pesiktha par excellence, la Pesiktha rabbathi (la grande Pesiktha) et la Pesiktha soutratha (la petite Pesiktha). De ces trois Pesiktha, il n y a que la seconde qui soit imprimée, et encore est-elle incomplète. L’idiome dans lequel elle est écrite indique une origine palestinienne. L’auteur en est, à ce qu’on croit, R. Cahana.

2° Le Midrasch Rabba, attribué à R. Hoschéa Cabba ; il est relatif au Penlateugue et aux cinq Meguilloth.

3" Le Midrasch Tanhouma ou Yelamdenou ; il se rapporte au Pentateuque et commence par un sujet halachique avec le mot Yelamdenou rabbenou (Que notre maître nous enseigne).

40 Le Midrasch Schoher Tûb, commentaire agadique sur les Psaumes, les Proverbes et quelques chapitres des Livres de Samuel.

Les ouvrages des rabbins du xi« au xvc siècle citent des Midraschim sur Isaïe, Esdras, et les Chroniques qui ne nous sont pas parvenus. On composait aussi de petits Midraschim sur certains sujets bibliques, sur l’aspect du ciel, sur l’angélologiiî, etc.

Tous les livres dont nous venons de parler, Mischna, Tosiftha, Gémare, Midraschim, sont compris sous la dénomination commune de Talmud, Assez souvent ce nom est donné exclusivement aux deux Gémares.

En résumé, deux éléments entrent dans la composition du Talmud : la Halakha et YAgadah. Celle-ci est l’interprétation libre, représentant la pensée et le sentiment de simples individus, tandis que la Halakha est une tradition orale de maître à élève, qui représente la pensée et le jugement de l’école. La Halakha est la prescription formelle et obligatoire pour quiconque se reconnaît juif, l’A^adah est accommodée aux besoins moraux d’une fraction peu nombreuse des Israélites. La Halakha est une autorité fixe et durable, YAgadah n’est qu’une application momentanée. Tout ce qui n’est pas halachique dans le Talmud appartient au domaine de YAgadah. Ce domaine de YAgadah est aussi large que varié : on y trouve des notions de tout genre sur la médecine, l’astronomie, la cosmographie, le mysticisme, la géographie et 1 histoire, h’Agadah abonda surtout en paraboles et en préceptes de morale et de conduite pratique.

La Mischna et le Sifra sont complètement halachiques ;. les Midraschim sont complètement agadiques. Les autres livres talmudiques tels que les deux Gémares, le Sifra, etc., sont à la fois halachiques et agadiques ; aussi la méthode y devient-elle de plus en plus illogique, et l’exposition y est-elle souvent dérangée par des digressions en dehors du sujet qu’on se propose de traiter.

« Dans le Talmud, dit M. Renan, la forme n’a aucun prix... Le style du Talmud est celui de notes de cours ; les rédacteurs ne firent frobablement que classer sous certains titres énorme fatras d’écritures qui s’était accumulé dans les différentes écoles durant des générations. »

« On ne peut pas se faire une idée, dit M. Neubauer, de la manière dont les derniers rédacteurs, Rabina et R. Arche, sont arrivés k cet étrange classement, où d’ailleurs le désordre est si majestueux. La Gémare de Babylone est à la fois trop régulière pour être un simple amas de hasard et trop embrouillée pour qu’on puisse y supposer la

main d’un rédacteur attentif et intelligent.