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le syllogisme simple et le syllogisme conjonctif.

Les syllogismes simples sont ceux dont la majeure et la mineure ne comparent le moyen terme qu’à l’un des deux autres ; ils se divisent en complexes et incomplexes.

Les incomplexes sont ceux où chaque terme est joint tout entier avec le moyen, comme dans : Tout animal est morte ! j or l’homme est un animal ; donc l’homme est mortel.

Les complexes, où une partie seulement du sujet ou de l’attribut est unie au moyen dans 1 une des prémisses, admettent des termes formés de plusieurs mots. En voici un exemple : Le soleil est une chose insensible ; les Perses adoraient le soleil ; donc les Perses adoraient une chose insensible.

On appelle syllogismes conjonctifs ceux où le moyen est uni dans la majeure aux deux termes de la conclusion, comme dans l’exemple suivant : Si l’homme est un animal, il est mortel ; or l’homme est un animal ; donc l’homme est mortel.

On distingue quelquefois des syllogismes conditionnels, disjonotifs et copulatifs.

figures du syllogisme. Les diverses dispositions des trois termes du syllogisme prennent le nom de figures. La place du moyen dans chaque prémisse détermine la figure qui comprend plusieurs modes. Le mode est déterminé par la quulité et la quantité des trois propositions. Lu qualité d’une proposition est d’être affirmative ou négative ; sa quantité est d’être universelle, particulière ou individuelle.

La proposition universelle affirmative est désignée, dans l’école, par la lettre A, l’universelle négative par E, la particulière affirmative par I, la particulière négative par O ; d’où les vers suivants :

Asseril A, negat E, verum générabler ambo ; Asacrit 1, neyat O, sed parliculariter ambo. Ces propositions sont opposées les unes aux autres de la manière suivante : A et O, E et I sont contradictoires l’une de l’autre ; A et I, E et O, subalternes ; A et E, contraires ; I et O, subcontraires.

Les contradictoires ne sont jamais ni vraies ni fausses ensemble. Les contraires ne peuvent jamais être vraies ensemble, mais elles peuvent être toutes deux fausses. Les subcojitraires peuvent être vraies ensemble ; mais elles ne peuvent être toutes deux fausses. Dans les subalternes, la vérité d’A et d’E emporte celle d’I et d’O ; mais la vérité d’I et d’O n’emporte pas celle d’A et d’E ; tandis que la fausseté d’I et d’O emporte celle d’A et d’E, et que la fausseté d A et d’K n’emporte pas celle d’I et d’O.

Le moyen terme pouvant occuper quatre places, il s’ensuit qu’il y a quatre figures.

La première figure, dans laquelle le moyen est Sujet dans la majeure et attribut dans la mineure, a quatre modes : AAA, EAE, AU, EIO ; ce qui revient à dire qu’un syllogisme du troisième mode, par exemple, doit avoir une majeure universelle affirmative, A ; une mineuïe particulière afdrmative, 1, et une condusion’pareillement particulière uflirma•ïve, 1. Les règles des modes de la première figure sont ; 1° la mineure doit être afdrmative ; î» la majeure doit être universelle.

La deuxième figure, dans laquelle le moyen est attribut dans la majeure et la mineuïe, compte également quatre modes : EAE, AEE, ElO, AOO, dont les règles particulières sont : 1° il faut qu’il y ait deux propositions négatives, parmi lesquelles la conclusion ; 2° il faut que la majeure soit universelle.

La troisième figure, dans laquelle le moyen est sujet dans la majeure et la mineure, a six modes : AAl, EAO, 1AI, Ali, OAO, EIO, dont les règles sont que : 1" la mineure doit être affirmative ; 2» la conclusion doit être particulière.

La quatrième figure, dans laquelle le moyen est attribut dans la majeure et sujet dans la mineure, ne s’emploie que fort rarement, parce qu’elle se présente sous une forme peu naturelle et qu’il est toujours possible, en modifiant convenablement les propositions, de la ramener à quelqu’une des trois premières.

Quand on opère sur des propositions affirmatives universelles et que c’est une proposition affirmative universelle qu’on veut prouver, le moyen, il est vrai, ne peut pas être mis aillours qu’à sa place naturelle, entre le grand terme et le petit terme, sujet du premier dans la majeure, attribut du second dans la mineure. Mais d’autres démonstrations s’accommodent d’une autre disposition. B restant le moyen entre A et C, on prouvera la conclusion : Nul A n’est C, par les prémisses. Nul C n’est B ; tout A est B, c’est-à-dire avec le moyen employé deux fois comme attribut. On prouvera que quelque A est C par les prémisses. Tout B est C, tout B est A, avec le moyen pris deux fois comme sujet. Lorsque le moyen est sujet du grand terme et attribut du petit, les syllogismes sont dits de la première figure ; ils sont de la seconde quand le moyeu est deux fois attribut ; de la troisième quand il est deux fois sujet.

On a encore inventé, pour retenir la composition de ces modes, certains procédés mnémotechniques d’un emploi assez commode. On appelle À les propositions affirmatives universelles ; Ë, les négatives universelles ; I, les affirmatives particulières ; O, les uuga, iives particulières, et l’on fait

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entrer ces lettres dans certains mots, forgés pour la plupart et groupés avec une sorte de rhythme, où l’ensemble et la suite des syllabes représente ainsi la nature et l’ordre des propositions :

Barbara, Celarent, Darii, Ferio. Baralipton, Calentes, Dabitis, Fapesmo. Fresisomorum, Césare, Camestres, Feslino, Baroco, Darapti, Felapton, Disamis, Datisi, Bocardo, Fresison ou Ferison.

Barbara est un syllogisme dont toutes les propositions sont universelles et affirmatives. Festino, un syllogisme dont’la majeure est négative universelle, la mineure affirmative particulière, la conclusion négative particulière, et ainsi des autres. Ces inventions, en apparence assez bizarres, n’intéressent en rien le fond de la théorie. Ce ne sont que des procédés factices, assez ingénieux, pour en retenir certaines parties.

Voici maintenant 1 opinion de M. Géruzez :

  • Sans doute, il est inutile de savoir si un

argument est en barbara ou en celarent ; mais il ne l’est pas de savoir que deux propositions universelles affirmatives donneront légitimement une conclusion de même nature, et qu’une majeure particulière affirmative, suivie d’une mineure universelle affirmative, ne peut engendrer qu’une affirmation particulière. Après tout, ces dénominations bizarres, qu’il ne s’agit pas de remettre en honneur, n’étaient qu’une algèbre logique dont les scolastiques ne donnaient pas les formules pour des modèles d’élégance ou de poésie, et qu’ils n’employaient que pour le soulagement de la mémoire. »

La logique de Port-Koyal dit très-judicieusement a ce propos : «On n’a pas cru devoir s’arrêter au dégoût de quelques personnes, qui ont en horreur certains termes artificiels qu’on a formés pour retenir plus facilement les diverses manières de raisonner, comme si c’étaient des mots de magie... La vraie raison et le bon sens ne permettent pas qu’on traite de ridicule ce qui ne Test point. Or, il n’y a rien de ridicule dans ces termes, pourvu qu’on n’en fasse pas un trop grand mystère, et que, comme ils n’ont été faits qua pour soulager ta mémoire, on ne veuille pas les faire passer dans l’usage ordinaire et dire, par exemple, qu’on va faire un argument en bocardo ou en felapton, ce qui serait, en effet, très-ridicule. •

Règles du syllogisme. Les règles du syllogisme sont contenues dans les huit vers suivants :

Terminus estû triplex, médius, majorque, minorque. Latius hune {termimtm) quam pr&missje conclusio

(non vull. Nunquam continent médium conclusio fas est. Aut semel aut iterum médius neneraliter esta. Otraque si presmissa negel, ni/iil inde. sequetur. Ambae affirmantes nequeunt yenerare neyantem. Pejorem sequitur semper conclusio partem. Hil sequitur geminis ex particulariôus unquam.

De ces vers latins il ressort que : c Tout syllogisme doit être composé de trois termes, le petit, le grand et le moyen.

« Les termes de la conclusion ne peuvent être pris plus universellement dans la conclusion que dans les prémisses.

La conclusion ne doit jamais contenir le moyen terme.

Le moyen terme ne peut être pris deux fois particulièrement ; mais il doit être pris au moins une fois universellement.

■ On ne peut rien conclure de deux propositions négatives.

« On peut tirer une conclusion négative de deux propositions affirmatives.

La conclusion suit toujours la partie la plus faible.

On ne peut rien conclure de deux propositions particulières. »

Les anciennes logiques n’avaient que six règles générales qui régissaient le syllogisme pour qu’il fût concluait. Les voici avec les raisons qui les justifient :

10 Le moyen terme ne peut être pris deux fois particulièrement. En effet, pour conclure légitimement que l’attribut de la conclusion convient au sujet, il faut, de toute nécessité, que cet attribut s’applique à toute l’étendue du moyen ; or, le moyen uni particulièrement au sujet de la conclusion affirme seulement la convenance de ce sujet avec une partie quelconque de son étendue ; uni particulièrement à l’attribut, il affirme seulement la convenance de cet attribut avec une partie quelconque do son étendue, mais n’établit pas que la partie qui convient au sujet soit celle qui convient a l’attribut ; par conséquent, il ne saurait constater le rapport de ces deux termes, c’est-à-dire résoudre la question proposée. Ainsi, on dira bien : < Tout homme est pécheur ; or Paul est homme, donc Paul est pécheur ;» mais si l’on disait : « Quelque homme est pécheur ; or Paul est homme, donc Paul est pécheur, » l’argument ne vaudrait rien ; la dernière proposition, quoique vraie ou pouvant l’être, ne serait pas contenue dans les prémisses.

20 On no peut rien conclure de deux propositions particulières. Cette règle rentre dans la précédente.

3<> Les termes de la conclusion ne peuvent point être pris plus généralement que dans les prémisses. La raison de cette règle est dans ce principe qu’on ne peut rien conclure du particulier au général, parce que le plus n’est pas contenu dans le moins.

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40 On ne peut rien conclure de deux propositions négatives. En effet, dans les deux prémisses négatives, le moyen serait séparé du sujet et de l’attribut de la conclusion. Or, de ce qu’une idée ne convient ni a l’une ni h. l’autre des deux idées, il ne suit pas que ces deux idées se conviennent ou ne se conviennent pas.

5° On ne peut prouver une conclusion négative par deux propositions affirmatives ; car, de ce que les deux termes de la conclusion sont unis avec un troisième, on ne peut pas prouver qu’ils soient désunis entre eux. 6» La conclusion suit toujours la plus faible partie ; c’est-à-dire si l’une des prémisses est négative, la conclusion sera négative ; si l’une des prémisses est particulière, la conclusion sera particulière. En effet, dans la première hypothèse, le moyen sera nié du sujet ou de 1 attribut de la conclusion et affirmé de l’un ou de l’autre ; il y aura donc opposition entre le sujet et l’attribut ; or, cette opposition se résout par une négation. Dans la seconde hypothèse, une des prémisses étant universelle et l’autre particulière, il s’ensuit que le moyen terme embrasse dans l’une toute l’étendue soit du sujet, Soit de l’attribut de la conclusion, et dans l’autre une partie seulement de l’étendue de l’un des deux termes ; par conséquent, ces deux termes ne peuvent pas être pris dans toute leur étendue ; donc, la conclusion sera particulière, car toute proposition est particulière lorsque l’étendue de l’un de ses termes est restreinte.

Toutefois, la législation du syllogisme a été

fort simplifiée par les modernes, qui ont émis

les deux règles suivantes : îole moyen terme

doit conserver dans chaque prémisse une sij gnification identique ; 2° la conclusion ne

1 doit jamais être plus étendue que les pré j misses.

I Terminons cet article en disant que la sco[ lastique a abusé du syllogisme. Elle le rej gardait comme la seule forme de raisonnement véritablement scientifique, comme le I seul remède contre l’erreur et le seul moyen de découvrir la vérité. Auxviio siècle, Bacon, par excès contraire, décria et voulut proscrire le syllogisme. C’était proscrire en même temps la déduction, sans laquelle on ne peut descendre du principe à la conséquence, do la loi à son application, de la théorie à ia pratique, c’est-à-dire de la science à l’art.

N’est-ce pas l’argumentation qui a formé ces dialecticiens puissants, ces logiciens vigoureux qua l’on nomme J ?asc ; d, Mulebranehe, Bossuet, Bourdaloue, dont les écrits fortement tissus nous fiappent en même temps par la clarté et l’énergie. Lorsqu’on n’a pas été soumis à cette discipline sévère, on laisse volontiers flotter ses idées dans le vague ; on ne les enchaîne pas, on ne voit pas d’où elles viennent ni où elles conduisent. L’art syllogistique, a dit V. Cousin, est tout au moins une escrime puissante, qui donne a l’esprit l’habitude de la précision et de la rigueur. C’est à cette mâle école que se sont formés nos pères ; il n’y a que de l’avantage à y retenir quelque temps la jeunesse actuelle.

SYLLOGISTIQUE adj. (sil-lo-ji-sti-kegr. sullogistikos ; de sultogismos, calcul, raisonnement, qui est le type de notre mot syllogisme). Logiq. Qui appartient au syllogisme : Forme syllogistique. En tant que ta politique est censée résulter d’une construction syllogistique. elle ne peut rester en deçà ni aller au delà. (Proudh.) Il Chaîne syllogistique, Nom donné quelquefois au sorite.

SYLLOGIST1QUER v. n. ou intr. (sil-lo-jisti-ké — rad. syllogistique). Argumenter par syllogismes. Il Vieux mot.

SYLLYTHRIE s. f. (sil-li-trî — du gr. suit, ensemble ; luthroô, je souille). Entom. Genre d’insectes lépidoptères nocturnes, tribu des pyralides.

SYLOCHÉLIDON s. m. (si-lo-ké-li-dondu gr. sulê, rapine ; chelidân, hirondelle). Ornith. Genre d’oiseaux, formé aux dépens des sternes ou hirondelles de mer.

SYLPHE s. m. (sil-fe). Être surnaturel mâle, qui, selon les croyances des races celtes et germaines, occupait, dans le monde invisible, un rang intermédiaire entre lo latin et la fée : Les sylphes ont des sympathies moins aériennes, des communications moins invisibles. (Chateaub.)

..., Leg sylphçs vaporeux Ont caressé de leur souffle amoureux La vie rue pure, et font jouer dans t’ombre De leurs miroirs les facettes sans nombre.

MllAEVOÏE.

Je suis enfant de l’air, un sylphe, moins qu’un rûvc. Diaphane habitant de l’invisible éther.

V. Hugo. Le son qu’un coup de fouet produit Vient beaucoup moins de l’air froissé Que de quelque sylphe fessé.

J.-B. Rousseau. — Encycl. Le sylphe affectionnait l’Irlande et l’Angleterre centrale. « Les habitants de l’île de Man, chez qui les sylphes résident encore, les appellent « les bonnes gans » et disent qu’ils vivent dans les déserts, dans les forêts et sur les montagnes et évitent les grandes villes à cause des méfaits qui s’y commettent. t(Waldrom’s isleofMan, p. 126.) Ces lignes d’un historien anglais, en nous

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faisant connaître combien est persistante, dans certains pays, la croyance aux sylphes, nous renseignent sur le vrai caractère de ces êtres fabuleux. Amoureux de la nature, ils fuyaient l’homme parce qu’ils trouvaient l’homme méihant. Le printemps les ravissait ; ils en avaient pris la livrée et s’habillaient tout de vert. Un ministre d’Écosse, le révérend Graham d’Aberfoyle, dans ses Esquisses du comtéde Perth, affirme que le vert est une couleur funeste, quia causé de grands désastres dans sa famille même, et il n hésite pas dans sa naïveté à attribuer ces désastres à l’influence d’un sylphe irrité. Shakspeare nous parle des occupations ordinaires du sylphe. C’était de suivre, de son pas sans empreinte, les ondulations de la marée ; c’était de tracer sur le gazon ces cercles amers où la brebis ne mord pas ; c’était d’écouter le solennel couvre-feu ; c’était d’ouvrir à minuit les champignons et de se mettre sous ces parasols à 1 ombre de la lune. • Les sylphes, selon les livres cabalistiques du xvie sièole, étaient divisés en trois légions commandées par trois capitaines, Damalech, Taynor et Sayanon, lesquels obéissaient eux-mêmes à un prince qui était l’esprit de la terre, le vassal du roi des fées, et s’appelait Ariel. » Ariel avait eu des aventures. La hideuse sorcière Syoorax, bannie d’Alger pour ses méfaits, animée de la plus implacable rage, enferma Ariel dans le creux d un pin ; dans ce trou, le prisonnier passa douloureusement douze années. Ses gémissements faisaient hurler les loups et perçaient le cœur des ours. De, cette étroite prison, l’art d’un magicien sut enfin le tirer à la treizième année. Le sylphe joue un rôle important dans les féeries de Shakspeare. Dans la Tempête, il représente la pensée domptée et maîtrisée par la science et la volonté personnifiées en Prospero. Pour apprécier le rôle du sylphe dans ses rapports avec la hiérarchie du inonde fantastique et invisible, v. le mot

FÉKRIB.

SyipUe (lu), conte de Crébillon fils (1730, in-32). Il est souvent réimprimé à la suite des Egarements du cœur et de l’esprit. « L’illusion, écrit une belle comtesse à une de ses amies, est pour nous un bonheur réel et dont le flatteur souvenir contribue plus à notre félicité que ces plaisirs d’habitude qui reviennent sans cesse. « Cette comtesse désirait depuis longtemps voir un de ces esprits connus parmi les humains sous le nom de sylphe. Un jour que, retirée dans sa chambre, elle cherchait à se désennuyer en lisant un livre de morale, elle entend prononcer distinctement, quoique tout bas et avec un soupir, ces mots flatteurs : "O Dieu I que d’appas(» h’rappée de stupeur, elle regarde partout et, n’apercevant personne, se croit jouet d’une illusion. Elle commençait à se rassurer, lorsque la même voix frappe de nouveau son oreille : « O mortels, ètes-vous faits pour la posséder ? » Effrayée sérieusement cette fois, elle se réfugie dans son lit et cache sa tête sous la couverture. « Ab I cruelle, reprend la voix, pourquoi vous dérober k ma vue ? que craignez-vous de quelqu’un qui vous adore ? » La comtesse piête l’oreille à un langage aussi doux et peu k peu, charmée pur les procédés pleins de retenue du syiphe (car c’en était un), elle se laisse aller a une conversation dangereuse où le sylphe joue au naturel son rôle de don Juan.

« Une chose, dit-il, qui me déplaît, c’est la tristesse et la mauvaise humeur qui régnent Sur le visage d’une femme vertueuse, d’une prude, de ces personnes qui se sont fait de la venu par orgueil, pour avoir le plaisir d’insulter aux faiblesses de leur sexe. Et cependant il n’y a point de femme qui n’aie quelque faible, et ce faible, quelque bien déguisé qu’il soit, n’échappe jamais à la recherche opiniâtre de l’amant. La voluptueuse se rend au plaisir des sens ; la déboute au charme de sentir hou cœur occupé ; la curieuse au désir de s’instruire. Il en coûterait trop k l’iiidoiente de refuser. La vaine perdrait trop si ses appas étaient Ignorés ; elle veut lire dans la fureur des désirs d’un amant l’impression qu’elle peut faire sur les hommes. L’avara cède au vil amour des présents ; l’ambitieuse aux conquêtes éclatantes et la coquette à l’habitude de se rendre. » La conversation pusse insensiblement des hauteurs de la théorie à une pente plus pratique. Peu a peu, le cœur de la comtesse s’éuhautfe, et le sylphe cruit que l’heure du berger va sonner pour lui. La comtesse s’écrie : « Point de commerce avec vous, monsieur le Démon I » Enfin, après diverses péripéties, elle se met a soupirer : « Que vous êtes charmant I niais que je serais malheureuse si vous n’étiez qu’une illusion I Est-il bien vrai que, .. ? Ah I... Vous êtes palpable I»

« J’en étais là, madame, avec mon sylphe, dit-elle en terminant sa lettre, et je ne sais pas ce qui serait arrivé de mon égarement et de ses transports, si ma femme du chambre,

?ui entra dans ce moment, ne l’eût pas efrayél...

Il s’envola., Mais n’est-il pas dommage que ce ne soit qu’un songe ! ■ L’arrivéo de la femme de chambre eit fâcheuse ; elle nous prive de bien jolies choses.

Syipho (le), poésies de Charles Dovalle, précédées d’une notice par M. Louvet et d’une préface par Victor llugo (1830, in-8u). C’est sous ce titre qu’ont été publiées les poésies de Charles Dovalle, après la fin tra-