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BEST

rut après les jeunes agneaux, et caressa les bestioles favorites de la fermière, (G. Sand.) La hideuse bestiole (une chauve-souris), après avoir brûlé son aile à plus d’une flamme, disparut dans quelque angle, et le concert commença (Th. Gaut.)

— Pam. Petit sot, petite sotte : Cette fille veut faire l’entendue, ce n’est qu’une bestiole. (Acad.)

bestion s. m. (bè-sti-on — dirain. du lat. bestia, bête). Petit animal :

La sœur de Philomèle, attentive à sa peine, Malgré le bestion happait mouches dans l’air. La Fontaine.

— Comm. Tapisseries à bestions, Celles sur lesquelles sont représentées des figures d’animaux, à Vieux mot.

— Mar. Bec ou éperon d’un vaisseau à l’avant des porte-vergues, ainsi appelé parce qu’on y sculptait autrefois une figure d’animal, II Vieux mot.

BESTIOT, OTE adj. (bè-sti-O, o-terad. bestia, bête). Neolog. Qui est un peu bôto : Dans la bouche des beaux esprits de la société, cela voulait dire qu’elle était igno' rante comme une carpe, et un peu bestiote.^ (Balz.) Comme elle était bestiote, elle amusa sas confidents par de délicieuses naïvetés. (Balz.)

BESTOCJEF-RIJMINE (Michel-Pétrovitch), d’une famille noble de Russie, né vers la fin du xviic siècle, mort en 1760. En 1721, il fut envoyé comme ministre k Stockholm, nommé grand maréchal de la cour sous e règne d’Elisabeth, et il occupa le poste d’ambassadeur russe à Paris, de 1750 k 1760. Sa femme, sœur du comte Gollolkine tombé en disgrâce, entra dans une conspiration contre Elisabeth, subit la peine du knout, eut la langue coupée et fut envoyée en Sibérie.

BESTOUJEF-RUMINE (Alexis, comte de), grand chancelier et sénateur russe, d’origine anglaise, né k Moscou en 1693, mort en 1766, fit son éducation, partie à Berlin, partie k Hanovre, et entra au service de l’Angleterre, qu’il quitta, au bout de quelques mois, pour se rendre en Russie. Il y remplit d’abord la charge de chambellan près de la grande-duchesse Anne, ce qui lui donna occasion de se lier avec Biren ; puis, la grande-duchesse étant montée sur le trône (1730), il fut envoyé, en qualité de ministre, k Copenhague, et, ensuite, grâce k la protection de Biren, rappelé à la cour et nommé conseiller privé et ministre du cabinet. Élevé, après la mort de l’impératrice Anne, k la dignité de sénateur et de grand chancelier (1740), il dirigea la politique extérieure de l’empire pendant tout le régné d’Elisabeth. En 174 ?., il conclut un traité d’alliance avec l’Angleterre ; en 1743, un traité avec la Suède, d’après lequel la question d’hérédité souveraine, dans ce royaume, fut réglée conformément aux volontés de la Russie ; en 1746, un traité d’alliance avec l’Autriche contre la France et la Prusse, suivi, en 1748, de l’envoi d’un corps de 30,000 hommes sur lé Rhin, sous le commandement de Repnin, corps dont la mort soudaine de son chef et la brusque conclusion de la paix rendirent l’intervention inutile. Peu de temps après, s’étant tourné contre Lestocq, son ancien protecteur, il devint le principal auteur de sa chute. Adversaire déclaré de la Prusse, il prit part, en 1756, k la guerre contre Frédéric II, et ensuite k la guerre de Sept ans. Accusé de trahison, il fut dépouillé de tous ses biens et dignités et exilé dans un petit village près de Moscou. Catherine II le rappela et le réhabilita (1762) ; mais son influence était désormais éteinte. Bestoujef était un homme d’un caractère énergique, habite, actif, mais grossier et brutal, avide, dissipateur et sans aucune conscience dans le choix de ses moyens.

BESTOUJEF-RUM1NE (Michel), arrière-petit-fils d’Alexis, lieutenant au régiment de Pultava, fut l’un des chefs les plus actifs du complot terrible qui éclata contre l’empereur Nicolas, lors de son avènement à la couronne en 1825. Toute la famille impériale devait être exterminée, et Bestoujef avait dit : « Il faut en disperser les cendres. » Pris tes armes à la main, il fut condamné k être pendu avec ses trois principaux complices, et fa sentence reçut son exécution le 25 juillet 1826 ; ij avait. a peine trente ans.

BESTOUJEF (Alexandre), romancier russe, né à Saint-iJétersbourg en 1802. Il était officier aux gardes et aide de camp du duc A. de Wurtemberg, lorsqu’il fut impliqué dans la conspiration de 1825. Dégradé et envoyé en exil en Sibérie, ’il fut amnistié par la suite et incorporé dans l’armée du Caucase, où il périt en 1837. Il est auteur de YÉtoile polaire, le premier almanach qui oit paru en Russie ; d’une nouvelle, Mullah- Nur, et du roman à’Ammaleth-Jieg. Ses sujets sont empruntés aux mœurs circassiennes et se font remarquer par un rare talent de description.

BESTOURNÉ adj. (bè-stour-né — du préf, péjorat. bes et de tourné). Autref. Mal tourné, placé à rebours du sens naturel ou ordinaire. il On écrit aussi bétournb.

— On avait donné cette qualification à l’éguse de Saint-Benoît de Paris, parce que, contre l’usage alors général, cet édifice avait son autel tourné du côté de l’ocoideni. Cette dénomination irrévérencieuse s’étendit même m saint, par suite de l’habitude déjà établie

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de désigner simplement une église par le nom du saint auquel elle est dédiée : Cette contravention à l’usage général valut à l’église de Saint-Benoit les surnoms de maie versus, de bétoorné ou mal tourné. (Dulaure.)

Saint Bénéois ti bestomez.

Aidiez à toi mal atornez. **•

BÉSUCHET (Jean-Claude), médecin’, né à Boulogne, près de Paris, en 1790, fit, comme chirurgien, les campagnes de l’Empire jusqu’en 1810. Il est surtout connu par un Traité de la gastrite (1837)’, plusieurs fois réimprimé, et par un Précis historique de la franc-maçonnerie (1829), ouvrage utile et curieux. Nous citerons également de lui : Petite médecine domestique à l’usage des campagnes (1818) ; l’Anttcftarlafan ou Traité de la syphilis (1819) ; le Choléra (1837).

BÉSY s. m. Autre orthographe de bési, qui est une abréviation de bésigue. V. ce dernier mot. Depuis notre dernière rédaction, des documents nouveaux nous sont arrivés sur l’origine fort obscure du mot bésigue, et nous croyons gu’il ne sera pas superflu de les consigner ici. La plupart des dictionnaires, nous l’avons déjà dit, sont muets à cet égard, et un grand nombre d’entre eux ne jugent même pas à propos de lui accorder droit de cité ; enfin ceux qui donnent le mot ne sont pas d’accord pour savoir si l’on doit écrire ou prononcer bési, bésigue, ou bési, bésigue. Essayons cependant de chercher l’étymologie de ce terme peu connu. Commençons par remarquer qu’on ne pourrait jamais chercher un rapport entre ce mot et son homophone bési, qui désigne une poire et dérive d’une racine celtique. Quelques auteurs ont cru qu’ils pouvaient faire venir la (orme bésigue d’un verbe allemand besiègen (vaincre). Cette étymologie paraît séduisante au premier abord ; on pourrait en effet chercher une analogie de signification dans le nom de cet autre jeu qu’on nomme triomphe. Malheureusement une objection rédhibitoire se présente aussitôt : pourquoi ne trouve-t-on pas en allemand même un substantif dérivé du verbe besiègen, et servant à désigner le jeu en question ? Il n’est pas admissible que le français ait traité directement le verbe allemand besiègen comme un mot de son propre fonds et en ait créé un terme français. La philologie n’admet pas ces générations hybrides. Pour faire accepter cette étymoloçie, il faut absolument fournir la transition nécessaire pour passer du domaine germanique sur le domaine roman. Nous proposons une autre étymologie qui, si elle ne satisfait pas complètement aux exigences de la science, ne présente du moins rien d’inadmissible. Au lieu de nous adresser aux langues germaniques, nous nous adressons au latin, où nous trouvons un mot, bijugus, composé de bis deux fois et àejugum, joug, lien, et signifiant doublement attaché,doublement lié, qui forme un double attelage. Ce point de départ une fois admis, nous avons à justifier d’abord la dérivation phonétique, et ensuite la dérivation idéologique. Rien ne s’oppose à ce que le mot bijugus ait produit le mot français bésigue, surtout si cette transformation s’est opérée dans certains dialectes provinciaux. En effet, le changement de i, de bi en e n’offre aucune difficulté ; nous avons des exemples identiques qui nous offrent ce changement effectué précisément dans la même particule préfixe : bestorné, pour bistourné ; besaiguë, pour bisaigué ; acuia-besace, pour bisace de bis et sacem et*. L’affaiblissement du premier u de jugus en t s’explique aussi aisément. Quant à la substitution du z au j, elle est le résultat d’une prononciation méridionale de cette dernière lettre. On sait en effet que, dans beaucoup de nos provinces, on zézaye le j, c’est-à-dire qu’on donne à cette chuintante douce le son de z. Enfin nous retrouvons encore dans ce mot, ainsi dérivé, le respect de cette grande loi de la persistance de l’accent tonique ; il occupe en effet la même place dans bésigue que celle qu’il occupait’ dans bijugus. Maintenant que nous avons établi avec assez de certitude la filiation matérielle de bijugus et de bésigue, il nous reste à rendre compte de l’origine de cette appellation, La nature même du jeu de bésigue nous fournira cette explication, et nous aurons môme l’embarras du choix. Le bésigue se joue, on le sait, à l’aide d’un double jeu de piquet ; le double jeu peut être parfaitement considéré comme accouplé, comme un attelage double ; en outre, si nous avons bonne mémoire, le jeu de bésigue repose en grande partie sur certaines séries de coups liés auxquels se prête la présence des deux jeux de cartes réunis. En voilà plus qu’il n’en faut, nous croyons, pour faire comprendre pourquoi l’on a donné au bésigue cette appellation pittoresque et imagée, qui l’assimile à un attelage ; pour peu que l’on admette que ce jeu ait été, k une époque, le jeu favori des valets d’écurie, des ecuyers, des lansquenets, comme cela n’a rien d’improbable, on comprend facilement pourquoi l’on s’est servi de cette métaphore.

BESYNGA, ville très-commerçante de l’Inde ancienne, au delà, du Gange, non loin de l’embouchure de la rivière de même nom, dans le folfe de Sabaracus, appelé aujourd’hui golfe e Martaban. La ville moderne de Pégou a remplacé l’ancienne Besynga.

bêta, asse s.-m. (bê-ta, a-se — mot qui

f.

BETA

signifie bétail}. Pop. Homme très-bête : Vous n’êtes qu’un beta. C’est un gros bêta. Tu sais

uej’ai quitté ma bêtasse de maîtresse, après

'histoire des radis. (E. Sue.)

— Adjectiv. : Elle est jolie, mais fort bêtasse. Pauvre enfant ! vous avez été un peu bêta ; vous vous êtes marié comme un affamé se jette sur du pain. (Balz.)

BÊTA s. m. (bê-ta — mot gr.). Linguist. Nom de la deuxième lettre de l’alphabet grec B, correspondant à notre B : Bêta est la première des labiales et ta première des douces.

— Astron. Lettre d’ordre qui sert à indiquer la deuxième étoile d’une constellation : Le bêta de la Grande-Ourse, de la Vierge. Il Ce mot est plus souvent remplacé par le caractère qu’il désigne : p de la Grande-Ourse, de la Vierge.

— Mathém. Caractère qui, avec les autres lettres de l’alphabet grec, sert à représenter des quantités, à déterminer des points, etc., après que l’on a épuisé l’alphabet français, ou que quelque autre raison empêche de s’en servir : Les angles a, p, T (alpha, bêta, gamma).

BÉTAIL s. m. (bé-tall ; Il mil. — Le moi latin pecus. qui sert à désigner d’une iaçon générique le bétail, et dont nous avons fait, dans une autre acception, le français pécule, se rattache, au point de vue étymologique^ à une famille qu’on retrouve dans la majorité des langues européennes. L’identité incontestable que présente ce vocable dans ces idiomes prouve, une fois de plus, qu’à une époque indéterminée, la race aryenne s’est trouvée réunie sur un seul point, et que ses principales occupations consistaient dans l’élève des bestiaux. Suivons un instant, avec M. A. Pictet, la filiation qui rattache le latin pecus à la souche étymologique dos autres langues collatérales. Examinons d’abord le mot sur le sol européen. Nous trouvons premièrement, à côté de pecus, pecoris, Je grec poris, qui s’en rapproche davantage par les formes non contractées de poku et posu. Le lithuanien pekus est identique au mot latin ; il a donné naissance à pelcwaris, berger. Les langues germaniques nous offrent le gothique faihu, qui a le même sens que le français pécule, et qui n’en diffère que par des substitutions phonétiques très-simples à expliquer : la forte p se transforme en la labiale aspirée correspondante f ; la voyelle e est allongée en ai, et enfin la gutturale douce c se change, comme toujours, en aspirée h. Dans Ulphilar, faihu ne désigne que l’argent, le bien ; il est facile de s’expliquer cette transformation de sens, si l’on songe que la principale richesse d’un peuple agricole ou nomade consiste en troupeaux ; le latin pecunia, argent, n’a pas d’autre origine, et dérive assurément de pecus. Du reste, nous trouvons, dans un groupe de langues tout à fait différentes, un phénomène analogue, qui vient confirmer cette manière de penser ; le mot arabe mal, qui signifie argent, bien, propriété, a été pris par les Tartares, peuple nomade, qui lui ont donné le sens de troupeau. Ainsi ils disent, par exemple, mal guèldi, le troupeau est venu. C’est ici le procédé inverse de celui que nous observons dans pecus et pecunia ; mais il n’en fait que mieux comprendre la filiation des idées. Du gothique faihu, dérivent l’ancien allemand fihu, et I allemand moderne vich, qui signifient bétail, bestiaux. Rapprochez encore, pour la forme et pour le sens, l’ancien saxon fehu, l’anglosaxon feoh, le Scandinave , etc. — Si, maintenant, nous passons en Asie, nous retrouvons la racine de pecus plus voisine de sa source, et, par conséquent, plus facile à expliquer. Le sanscrit et le zend nous donnent le mot paçu, qui est l’animal domestique, par opposition a la bête sauvage, l’animal captif que l’on attache, comme le dit M. Pictet. C est positivement là le sens primitif du mot, car il vient de la "racine paç, lier, attacher, d’où pàça, lien, chaîne pour le bétail. Un fait assez curieux, c’est que la famille des langues iraniennes à spécialisé le sens de bétail et l’a localisé dans l’acception de chèvre ; on peut rapprocher de cette particularité le sanscrit paça, qui »aussi le sens propre de mouton. M. Pictet fait encore remarquer fort ingénieusement que l’italien dit pecora, de pecus, pour une brebis ; remarquez le sens péjoratif que le français a prête à ce mot en en faisant pécore. Benfey fait observer que la série germanique se rattache immédiatement à une racine qui lui est propre, fah, fahan, prendre ; capere, et que c’est par cette racine qu’elle se relie au sanscrit. L erse pasgan, petit troupeau, ajoute M. Pictet, se rattache de même à la racine pasg, fasg, lier, envelopper). Nom collectif des animaux de pâture dans une ferme : Le gros bétail se compose du cheval, de l’âne, du mulet, du bœuf ;Je mouton, la chèvre et le porc forment le menu bétail. L’impôt du sel est un obstacle à l’élève du bétail, une interdiction de la salubrité. (Proudh.) Chaque espèce de bétail peut donner lieu à des spéculations fort diverses. (Math, de Dombasles.)

Le berger rassemblait et comptait son bétail.

Lamartine.

, — Ironiq. Bétail humain, Esclaves, hommes traités comme des animaux : C’est dans la Virginie qu’il faut aller pour voir tes grands propriétaires de bétail humain. (O. Comettant.) Sous la domination turque, il y avait un premier bétail, le troupeau, et un deuxième

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bétail, te paysan. (V. Hugo.) L’homme abaisse la femme tant qu’il peut, afin de l’employer à son profit comme un joli bétail. (E. Abouf.)

— Fam. Personnes considérées comme formant une sorte de troupeau :

Les nonnes sont un étrange bétail.

La Fontaine.

Quelques imitateurs, sot bétail, je l’avoue, ■ Suivent en vrais moutons le pasteur de Mantoue.

La Fontaine.

— Encycl, Le bétail étant, aujourd’hui surtout, la base de l’agriculture, nous allons entrer dans quelques détails sur les principes qui doivent régir cette partie intéressante de 1 économie rurale ; nous aurons à considérer : îo le but de la tenue du béïail ; 2" le bétail au point de vue de l’engrais ; au point de vue des autres produits ; 4° les qualités générales à rechercher dans le bétail ; 5° les moyens d’en rendre la tenue lucrative.

1o  But de la tenue du bétail. Les animaux domestiques compris sous la dénomination da bétail peuvent se diviser en deux catégories : les animaux de trait et les animaux de rente. Les premiers ont pour but le travail ; les seconds, bien plus nombreux et plus importants, sont ainsi nommés parCe qu’Us sont destinés à fournir des produits qui sont indispensables —à la consommation, et dont la vente, aussi facile qu’avantageuse, donne lieu nécessairement à un revenu direct. Ces produits sont des animaux de travail et de boucherie, du lait, du beurre, du fromage, de la laine, etc. ■ Pendant longtemps, dit M. Moll, tel a été le but principal, unique même, de la tenue du bétail de rente, et nous avons encore des localités où il en est ainsi, où le bétail est le seul, ou, du moins, le meilleur moyen de tirer une rente satisfaisante, ou même quelconque, de la terre. C’est le cas dans les contrées où sol et climat, l’un ou l’autre ou l’un et l’autre, apportent de grandes difficultés à la culture et n’admettent guère que des herbages. Partout ailleurs, o’est-k-dire dans la presque généralité des cas, le produit essentiel aujourd’hui, celui dont l’importance domine tout le reste, qui fait du bétail une nécessité de la culture, de son développement une question sine qua non de progrès et de bénéfices, qui est la cause de l’immense et constante influence de la production animale sur la production végétale, c’est l’engrais. »

2" Du bétail considéré au point de vue de l’engrais. Suivant l’expression reçue par les agronomes, les animaux, envisagés au point de vue de l’engrais, ne sont que des machines destinées à transformer le fourrage et la litière en fumier. Ce fumier, applique à la terre, devient ensuite la matière première des végétaux, de sorte eue, par une exception unique parmi les diverses branches de l’industrie humaine, l’agriculture seule a le privilège da créer en même temps et les denrées de vente et la matière première qui alimente sa production. Cette situation, qui parait excellente au premier abord, puisque, grâce k elle, le cultivateur ne dépend que de lui-même, présente pourtant des dangers. Habitués à voir la terre se couvrir annuellement de récoltes et payer avec usure les soins et le travail de l’homme, nous nous sommes mis à la considérer comme une source intarissable de produits. Sans nous préoccuper d’où lui venait sa fécondité, nous avons épuisé en peu d’années toutes ses richesses par le refus systématique des engrais qui lui étaient nécessaires. Alors l’appauvrissement est venu, amenant à sa suite

la dépopulation et la barbarie. C’est k ce principe dévastateur qu’est due la décadence ou la ruine de toutes les contrées riveraines de la Méditerranée. C’est la encore ce qui, dans un avenir moins éloigné peut-être qu on ne le croit, pourrait bien amener un résultat semblable dans quelques-uns des États du Sud de l’Union américaine. Déjà, en 1860, la Virginie, les deux Carolines, la Géorgie, présentaient le spectacle étrange d’une foule de grandes et importantes propriétés toutes bâties, défrichées, en plein rapport, qui étaient, non pas vendues, mais abandonnées par leurs propriétaires. Ces derniers allaient ensuite dans l’ouest pour fonder de nouveaux établissements, voilk bien de quoi nous surprendre, nous autres habitants de la vieille Europe, où chacun d’ordinaire tient si bien k sa maison, k son champ, k ses prairies ; mais notre étonnement cessera, si nous songeons que cet abandon était devenu nécessaire, par suite d’une culture k outrance, où tout l’art du colon consistait k enlever au sol le plus possible, à toujours prendre sans jamais rien rendre. > Nous avons vendu, écrivait il y a quelques années un journaliste de la Virginie, sous forme de tabac, de blé, de coton, la chair et le sang de nos terres, et nos terres, aujourd’hui épuisées, refusent de produire ou donnent des produits tels qu’ils ne payent plus les frais. »

L’engrais étant le seul moyen de conserver indéfiniment la fécondité du sol ; et le bétail étant le seul moyen d’obtenir les masses énormes d’engrais nécessaires dans ce but, la tenue du bétail est bien réellement la condition* première de toute production agricole ; d’où cet axiome admis aujourd’hui par tous les agronomes : Sans bétail point d’agriculture, et sans beaucoup de bétail point de bonne agriculture.

Du bétail considéré au point de vue des autres produits. Le fourrage et la litière soni